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Guerre de l'Ukraine : Volodymyr Zelensky, le comédien devenu président et chef de guerre

Novice en politique jusqu'à son élection en 2019, le jeune président ukrainien tente de se forger une stature d'homme d'Etat capable de tenir tête à Vladimir Poutine.

Article rédigé par franceinfo
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Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, s'adresse à ses concitoyens, le 25 février 2022. (UKRAINE PRESIDENCY / AFP)

Du petit écran aux devants de la scène internationale. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, ancienne star de la télévision, s'est mué depuis le lancement de l'invasion militaire russe, jeudi 24 février, en chef de guerre. Face à l'avancée des troupes de Vladimir Poutine, le dirigeant de 44 ans a assuré que ses soldats faisaient "tout leur possible" pour défendre le pays.

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Novice en politique jusqu'à son accession au pouvoir en 2019, Volodymyr Zelensky s'est attelé ces derniers mois à gommer son inexpérience, qui avait fait sa popularité, pour tenter de se construire une stature d'homme d'Etat capable de tenir tête à Vladimir Poutine.

Le "Serviteur du peuple"

Son aventure politique commence comme une farce. Volodymyr Zelensky tient depuis 2015 le premier rôle d'une série à succès quasi prémonitoire, diffusée sur la chaîne ukrainienne 1+1. Dans Serviteur du peuple, il incarne Vasyl Petrovych Holoborodko, professeur d'histoire arrivé au pouvoir par hasard. Ce président novice, naïf et honnête, qui vit chez ses parents et se déplace à vélo, se démène alors pour lutter contre la corruption politique.

La série est "le plus gros succès de l'histoire de la télévision ukrainienne", soulignait Wojciech Kononczuk, à la tête du département ukrainien du Centre d'études orientales, auprès de franceinfo en 2019. "Tout le monde rêv[ait] d'un président comme Holoborodko", assurait quant à lui le réalisateur de la série, Aleksey Kiryushchenko.

Volodymyr Zelensky se prend au jeu et ambitionne de transformer la fiction en réalité. En 2017, toujours à l'affiche de la série, il fait changer le nom du parti dont il est membre. Le tout jeune Parti du changement décisif est rebaptisé Serviteur du peuple, jouant de la confusion entre l'acteur et le personnage. Dès l'été 2018, la popularité de Zelensky est testée dans les sondages électoraux. Le 31 décembre, l'acteur déclare sa candidature. Il s'invite dans une course à la présidentielle qui s'annonçait comme un duel entre le président sortant, Petro Porochenko, et l'ancienne Première ministre, Ioulia Timochenko.

Premiers pas hésitants à la présidence

Originaire d'une ville industrielle du sud du pays, russophone, Volodymyr Zelensky fait campagne sur le dialogue avec la Russie pour mettre fin au conflit dans le Donbass. Il promet de "lutter pour la paix en Ukraine", d'assurer une "victoire contre la corruption", de rendre ses concitoyens "prospères" et d'exercer leur volonté exprimée "via des référendums" réguliers. En donnant toutefois peu de détails sur son programme.

"Je n'ai pas d'expérience mais j'ai suffisamment de force et d'énergie."

Volodomyr Zelensky

à l'AFP en mars 2019

En avril 2019, il obtient plus de 73% des suffrages au second tour de l'élection face à Petro Porochenko, et devient, à 41 ans, le plus jeune président de l'histoire de l'Ukraine"Je ne vous laisserai jamais tomber", promet-il le soir de sa victoire. 

Volodymyr Zelensky "a été élu parce qu'il n'était pas entaché des affaires de corruption qui salissent l'image de la classe politique", analyse pour Le Figaro (abonnés) Carole Grimaud Potter, professeure de géopolitique de la Russie à l'université de Montpellier et à l'Institut diplomatique de Paris. "L'élire, c'était jouer une carte blanche, en misant sur un personnage connu de tous", complète la spécialiste.

Trois mois plus tard, son parti remporte la majorité absolue au Parlement. Malgré ce succès dans les urnes, le costume de chef d'Etat semble un peu grand pour Volodymyr Zelensky. "On pensait qu'il n'allait pas faire le poids", commente Cécile Vaissié, professeure à l'université Rennes 2, dans les colonnes du Parisien (abonnés).

Volodymyr Zelensky, à son QG de campagne à Kiev (Ukraine), le soir de son élection à la présidence, le 21 avril 2019. (SERGEI GAPON / AFP)

Dans les premiers temps de son mandat, Volodymyr Zelensky est accusé d'être naïf vis-à-vis de Vladimir Poutine, comme le rappelle Le Monde (abonnés). En août 2019, il déclare par exemple qu'il suffit de "se regarder dans les yeux" avec les Russes et de "mettre fin à cette guerre".

"Il a gagné une carrure de chef d'Etat"

Le regain de tensions avec Moscou, depuis l'automne 2021, marque un tournant dans sa présidence. Ces dernières semaines, "il a gagné une carrure de chef d'Etat", décrypte Cécile Vaissié au Parisien. Son ton s'est durci face à Vladimir Poutine. "Il a été extrêmement ferme face à quelqu'un qui veut la guerre, mais il n'y a jamais eu d'agressivité", constate l'universitaire. "Ce n'est plus le même homme qu'au début de son mandat. Il s'est rendu compte qu'il avait affaire à un adversaire coriace, prédateur et cynique, hostile à tout compromis", avance au Monde Oleksiy Melnyk, codirecteur du centre de réflexion Razumkov, à Kiev.

Volodymyr Zelensky fait son possible pour rassurer ses concitoyens, même quand Washington avertit, d'un ton de plus en plus alarmiste, qu'une guerre "imminente" peut commencer "sans préavis". "Que devons-nous faire ? Une seule chose : rester calme", répète-t-il en janvier dans une adresse à ses 40 millions de concitoyens. Alors que la Russie annonce l'envoi de ses troupes en Ukraine, jeudi, c'est dans un message vidéo sur les réseaux sociaux qu'il appelle ses concitoyens à ne pas paniquer avant d'instaurer la loi martiale. 

Dans l'adversité, Volodymyr Zelensky garde "un niveau de popularité supérieur à celle de ses prédécesseurs", affirme à franceinfo Antoine Arjakovsky, historien, directeur de recherche au Collège des Bernardins et spécialiste de l'Ukraine.

"Les Ukrainiens ont une force supérieure par rapport à la Russie : ils font bloc autour de Zelensky."

Antoine Arjakovsky, historien

à franceinfo

Une nouvelle stature internationale

Les récents événements renforcent aussi sa stature internationale. Lors de la Conférence de Munich sur la sécurité, le 18 février, les participants l'ovationnent avant même qu'il ne prenne la parole, pour marquer leur soutien et leur unité face à Moscou. L'Elysée salue le "sang-froid" du président ukrainien, qui a multiplié les appels avec ses homologues, dont Emmanuel Macron, ces derniers jours.

Volodymyr Zelensky n'hésite pas non plus à hausser le ton face à ses partenaires. "Qui est prêt à combattre avec nous ? Je ne vois personne", a lancé vendredi le chef d'Etat, le visage marqué. "Qui est prêt à donner à l'Ukraine la garantie d'une adhésion à l'Otan ? Tout le monde a peur", a-t-il encore dénoncé, alors que l'Alliance atlantique, que l'Ukraine souhaite rejoindre, déclarait n'avoir "aucune intention de déployer des troupes dans ce pays". Le président ukrainien a aussi fustigé la "lente" réponse européenne à l'invasion russe. L'Ukraine est "laissée seule" sur ce théâtre de guerre. "Comment allez-vous vous-mêmes vous défendre si vous êtes si lent à aider l'Ukraine ?" a-t-il raillé.

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