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"On va doubler nos recettes pendant cinq ans" : les législatives, manne financière pour les "petits" partis éliminés partout dès le premier tour

Article rédigé par Thomas Destelle
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le premier tour des élections législatives aura lieu le 30 juin 2024. (ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP)

Même s’ils n’ont pas de candidats au second tour, les formations politiques vont toucher des subventions publiques à l'issue de ces législatives, grâce aux suffrages recueillis au premier tour.

Malgré de mauvais résultats aux législatives, dimanche 12 juin, tout n’est pas perdu pour certaines organisations politiques. Le financement des partis est en effet lié aux résultats de ces élections et représente un enjeu majeur. Si une partie de l’aide publique est versée selon le nombre de parlementaires, une autre est calculée selon le score réalisé au premier tour, sans avoir besoin de qualifier un candidat pour le tour suivant. Par exemple, le parti Reconquête! d’Éric Zemmour, qui a récolté 964 868 voix et 4,24% des suffrages exprimés, touchera de l’argent public pendant cinq ans même s’il ne présentera pas de candidat au second tour le 19 juin prochain.

CARTE >> Retrouvez les résultats du premier tour des élections législatives dans votre circonscription

Pour toucher ces subventions, il est nécessaire de faire au moins 1% dans 50 circonscriptions au minimum. Un objectif rempli par le Parti animaliste qui revendique 255 086 voix, loin du demi-million de voix récolté lors des européennes de 2019. Mais l’organisation estime avoir réalisé plus de 1% dans 369 circonscriptions. "On a présenté trois fois plus de candidats qu'en 2017 donc c’est une réussite, explique Hélène Thouy, co-présidente du parti. En termes de score, c’est plus en demi-teinte parce qu’on aurait aimé faire davantage mais les élections ne sont pas comparables les unes aux autres. Dans l'ensemble, on est satisfait du travail qui a été accompli."

"Nous allons avoir plus de visibilité sur l'avenir"

Même satisfaction pour le Parti pirate qui revendique autour de 20 000 voix. Il va lui aussi toucher de l’argent public. Pourtant, l’organisation n’a eu les 1% que dans 15 circonscriptions. L’organisation va accéder à ce financement à la faveur d’un accord technique avec le parti Régions et peuples solidaires (R&PS), qui annonce 64 candidats à plus de 1%. "On a signé un document où R&PS s’engage à nous verser une somme pour chaque voix", indique Florie Marie, porte-parole du Parti pirate, qui a fait 0,89% dans la 7e circonscription de l’Essonne. En 2022, une voix représentait 1,64 euro. Un montant établi par l’État. Les partis politiques se sont partagé, entre 2017 et 2022, plus de 65 millions d'euros chaque année. Si cette enveloppe reste la même, l’abstention pourrait paradoxalement faire augmenter le "prix" d’une voix.

Grâce à cet accord, le Parti pirate respecte la parité car une partie de la dotation est retirée en cas de non-respect de l’équilibre entre le nombre d’hommes et de femmes candidats. Florie Marie estime que son parti va toucher environ 25 000 euros par an. "On va doubler nos recettes sur l'année pendant cinq ans, se réjouit la porte-parole. Cela va nous permettre d'avoir un peu plus de visibilité sur l'avenir." Avec comme premier objectif pour le parti : travailler sur la visibilité sur les réseaux sociaux.

"On n'a pas énormément d'argent, donc ça va nous assurer une pérennité pour les cinq années qui viennent."

Florie Marie, Parti pirate

à franceinfo

De son côté le Parti animaliste évalue autour des 350 000 euros l’aide publique qu’il recevra chaque année pendant cinq ans. Bien plus que les 67 000 euros reçus par exemple pour l’année 2022, calculé selon les législatives de 2017. "La question financière est pour nous loin d'être l'objectif principal, nuance Hélène Thouy. Si on a multiplié les candidatures, c'était surtout pour avoir la visibilité pour la cause animale." La co-présidente se félicite notamment de voir des candidats de son parti dépasser les 3% dans des circonscriptions rurales : "Ça contrebalance un peu l'argument selon lequel il n’y a que les bobos urbains qui s'intéressent à la cause animale".

Un cercle vicieux

Mais cette somme importante reste bien en-dessous des frais nécessaires pour une élection, rappelle la co-présidente du Parti animaliste. Une campagne électorale coûte très cher. L’impression de la propagande officielle (bulletins, affiches et professions de foi) pour toute la France coûte entre 1,5 et 2 millions selon Hélène Thouy. "On est très loin avec 350 000 euros, souligne-t-elle. Ça va nous permettre de développer le parti mais finalement, ce n'est pas ça qui va assurer le financement des futures élections. Il va falloir continuer à avoir des dons." La co-présidente du Parti animaliste dénonce un cercle vicieux.

"C'est la double peine car si vous êtes petits, vous avez peu de temps de parole, et donc de chances de vous faire connaître des électeurs et d'obtenir plus de voix."

Hélène Thouy, Parti animaliste

à franceinfo

Parmi ceux qui ont obtenu davantage de voix, il y a notamment le Rassemblement national qui devrait voir ses recettes progresser. Le parti d’extrême droite a récolté 1,3 million de voix de plus au premier tour qu'en 2017. Les bons résultats des formations de gauche de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) doivent également leur permettre de bénéficier de plus d’argent public, contrairement aux Républicains et à La République en marche. Mais tout n’est pas lié au nombre de voix. L’autre partie des subventions est en effet calculé selon le nombre de parlementaires. Pour 2022, un sénateur ou un député a rapporté 37 400 euros à chaque parti. Certains espèrent donc limiter les pertes grâce aux résultats du second tour des législatives, dimanche 19 juin.

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