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Réforme des retraites : pourquoi les syndicats comptent sur la mobilisation de samedi pour la suite du mouvement social

Pour la première fois depuis le début de la mobilisation contre le projet de réforme du gouvernement, les syndicats ont appelé à manifester un samedi, en période de vacances scolaires.
Article rédigé par Thibaud Le Meneec
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4 min
Les dirigeants syndicaux en tête de la manifestation contre la réforme des retraites, à Paris, le 7 février 2023. (JULIEN DE ROSA / AFP)

Quatre à la suite pour le mouvement social contre la réforme des retraites : après le 19 janvier, le 31 janvier et le 7 février, les syndicats ont appelé à une nouvelle journée d'action nationale, samedi 11 février. Pour l'intersyndicale, toujours opposée au projet de loi du gouvernement actuellement débattu à l'Assemblée nationale, il s'agit de mobiliser de nouveaux contestataires et de retrouver l'affluence des premiers cortèges de janvier, avant deux nouvelles initiatives nationales, les 7 et 8 mars. Franceinfo vous explique pourquoi cette journée revêt une importance particulière dans la mobilisation actuelle.

Parce que c'est le premier samedi de mobilisation

C'est la première fois, depuis le début du mouvement contre la réforme des retraites, que les syndicats organisent des manifestations le week-end. Avec ce rendez-vous donné un samedi, les syndicats espèrent rallier à eux celles et ceux qui ne peuvent pas se permettre de faire grève en semaine et perdre une journée de salaire.

La volonté des organisations professionnelles est aussi de fédérer des "cortèges particulièrement animés, festifs, familiaux, pour donner une tonalité joyeuse au mouvement social", assure à franceinfo Yvan Ricordeau, "monsieur retraites" de la CFDT. "L'objectif, c'est d'avoir dans la rue des personnes avec qui on n'a pas de contact", défend aussi Céline Verzeletti, secrétaire confédérale de la CGT. "Cela recoupe aussi des appels du champ politique, dont La France insoumise, qui organise ses journées de mobilisation le samedi", renchérit Pierre Rouxel, maître de conférences à l'université Rennes 2 et spécialiste du syndicalisme.

Parce que les vacances scolaires ont commencé

En plus d'être fixée un samedi, cette quatrième journée de mobilisation intervient alors que la zone B entame ses vacances d'hiver, une semaine après la zone A. "Ça fait un peu de personnes en moins, potentiellement", concède Céline Verzeletti. Pour les opposants au projet de loi du gouvernement, l'enjeu est aussi de conserver le soutien de l'opinion publique. Jusqu'ici, cette dernière est favorable au mouvement social, comme en témoignent plusieurs sondages diffusés depuis un mois.

"On observe l'intériorisation de l'idée par les organisations syndicales, même les plus contestataires, de la nécessité de garder de son côté l'opinion publique."

Pierre Rouxel, spécialiste du syndicalisme

à franceinfo

A ce titre, le mot d'ordre est centré sur les manifestations et beaucoup moins sur les grèves. "Le but n'est pas de provoquer le maximum d'embêtement" pour les départs et les retours de vacances, assure Yvan Ricordeau, pour qui "l'opinion publique, c'est un élément de force" dans une bataille amenée à durer. Plusieurs secteurs devraient toutefois avoir recours à la grève, comme à la RATP, mais sans "impact notable", précise la régie parisienne au Point. La SNCF, elle, n'est pas concernée par des appels à la grève. 

Parce que la dernière journée d'action a été un peu moins suivie

La troisième journée d'action, mardi, a un peu moins mobilisé que les précédentes, avec 757 000 personnes dans la rue selon le ministère de l'Intérieur, contre "près de deux millions" selon les organisateurs. Une semaine plus tôt, ces mêmes sources évoquaient respectivement 1,27 million et "plus de 2,5 millions" de manifestants. L'enjeu pour les syndicats est donc de ne pas connaître un nouveau recul, "même si les chiffres restent impressionnants", selon Pierre Rouxel.

Les centrales affichent en tout cas une relative confiance. "On n'est pas très inquiets sur la journée de samedi. Mais est-ce que ça sera au niveau du 31 janvier ? Ce n'est pas sûr", anticipe Céline Verzeletti.

"Si on est à 2 millions, ce sera toujours un niveau très élevé, cela veut dire que le mouvement ne s'essouffle pas."

Céline Verzeletti, secrétaire confédérale de la CGT

à franceinfo

"Avec tous ceux qui viendront samedi et qui ne sont pas venus aujourd'hui, on sera largement au-dessus du 31 janvier", avait de son côté parié Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, avant le défilé de mardi.

Parce que les syndicats préparent les prochaines semaines

Confrontée au risque d'essoufflement de la mobilisation, l'intersyndicale présentera en fin de matinée son plan de bataille pour la suite des événements, lors d'une conférence de presse organisée à la Bourse du Travail, à Paris. "La journée de samedi vient clore le premier cycle des grandes mobilisations", résume Pierre Rouxel.

Et les différentes centrales engagées ont déjà coché plusieurs dates dans l'agenda social des prochaines semaines : une nouvelle mobilisation est prévue le jeudi 16 février, avant une journée d'action le 7 mars, après la fin des vacances scolaires. Une initiative particulière le 8 mars, en lien avec la journée internationale des droits des femmes, est également à l'étude, selon la CFTC.

Aux yeux des organisations syndicales, la mobilisation doit gagner en ampleur "quand le texte va arriver au Sénat, début mars. C'est comme ça que les choses commencent à se discuter entre nous", explique Yvan Ricordeau. Et alors que Philippe Martinez a appelé de ses vœux des grèves "plus dures" et "plus massives", un mouvement plus intense se profile. "Il va falloir qu'en plus des manifs, il y ait un gros grain de sable dans la machine économique", appuie Céline Verzeletti. "Plus le temps passe et plus l'idée que les démonstrations de force doivent conduire le gouvernement à reculer sera questionnée au sein de l'intersyndicale", conclut Pierre Rouxel.

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