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Covid-19 : on vous résume la controverse autour de l'essai thérapeutique "sauvage" de Didier Raoult en sept actes

L'Agence nationale de sécurité du médicament va saisir la justice après la publication d'une étude controversée, signée par le professeur, accusé d'avoir "enfreint" des règles déontologiques.
Article rédigé par franceinfo
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L'ancien directeur de l'IHU de Marseille, Didier Raoult, le 20 avril 2022, à Marseille. (CHRISTOPHE SIMON / AFP)

S'agit-il d'un "énorme scandale sanitaire", comme le dénoncent des sociétés savantes, ou ces accusations émanent-elles "d'imbéciles", ainsi que l'affirme celui qu'elles visent ? Quoi qu'il en soit, Didier Raoult est de nouveau pointé du doigt, après l'ouverture en juillet dernier d'une information judiciaire contre l'Institut hospitalier universitaire (IHU) Méditerranée Infection de Marseille

Le professeur controversé est accusé par des médecins d'avoir mené un essai clinique "sauvage" géant avec l'hydroxychloroquine comme traitement contre le Covid-19, qu'il avait évoqué dans une étude pré-publiée en avril dernier. L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a annoncé, samedi 3 juin, qu'elle s'apprêtait à saisir la justice.

De ce "pré-print" aux dernières annonces de l'Agence du médicament, franceinfo revient sur les principales étapes de cette controverse scientifique en passe de devenir une affaire judiciaire.

1Didier Raoult signe une vaste étude

C'est de là que le "scandale" émane. Début avril, le professeur Didier Raoult, qui a quitté la direction de l'IHU en septembre dernier, publie avec d'autres membres de son équipe un "pré-print", c'est-à-dire une version non relue par des pairs, d'une étude. Cette dernière revient sur un essai mené entre le 2 mars 2020 et le 31 décembre 2021, période pendant laquelle 30 423 personnes positives au Covid-19 ont reçu de la part de l'IHU de l'hydroxychloroquine et d'autres molécules.

Le document insiste sur l'efficacité de ce traitement, alors que l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a rappelé en avril que "les données publiées à ce jour ne sont pas en faveur d'un bénéfice clinique de l'hydroxychloroquine associée ou non à l'azithromycine dans le traitement du Covid-19, quel que soit son contexte d'utilisation".

2Des médecins dénoncent un essai thérapeutique "sauvage"

Dans une tribune publiée par Le Monde, dimanche 28 mai, une dizaine de sociétés médicales reproche deux choses à cet essai, qui représente à leurs yeux un "énorme scandale sanitaire". D'abord, ils critiquent le traitement à l'hydroxychloroquine qu'ont reçu ces milliers de patients pendant près de deux ans. "La prescription systématique aux patients atteints du Covid-19, quels que soient leur âge et leurs symptômes, de médicaments aussi variés que l'hydroxychloroquine, le zinc, l'ivermectine ou l'azithromycine, sur des ordonnances préimprimées, s'est d'abord effectuée sans bases pharmacologiques solides, et en l'absence de toute preuve d'efficacité", peut-on lire dans cette tribune. 

De plus, les médecins estiment que Didier Raoult et son équipe ont "enfreint les règles" en ne demandant aucune autorisation à l'Agence nationale de sécurité du médicament, pourtant obligatoire pour réaliser un essai clinique. C'est "vraisemblablement le plus grand essai thérapeutique 'sauvage' connu à ce jour", dénoncent les scientifiques. Ils demandent donc des sanctions aux autorités.

3Didier Raoult fustige une "tribune d'imbéciles"

Pointé du doigt, Didier Raoult ne tarde pas à réagir à cette tribune. Sur franceinfo, le professeur émérite évoque une "tribune d'imbéciles" et persiste à dire que son protocole fonctionne contre le Covid-19 et que les études internationales ont été "truquées". Il assure que ses études sont "un travail rétrospectif" mené après que les patients ont été soignés. "C'est juste une étude observationnelle, (...) il n'y a jamais eu d'essai thérapeutique", ajoute-t-il sur BFMTV.

4L'ANSM pointe des manquements déontologiques

Le gendarme du médicament revient mardi 30 mai sur le procédé utilisé par Didier Raoult pour son étude. Pour l'ANSM, "au vu de premières analyses", l'étude sur l'hydroxychloroquine "pourrait être qualifiée de RIPH", une recherche impliquant la personne humaine "de catégorie 1". Elle aurait donc "dû bénéficier d'un avis favorable d'un comité de protection des personnes et d'une autorisation de l'ANSM". "L'ANSM poursuit ses analyses et saisira, le cas échéant, de nouveau la justice si ces dernières mettent en évidence des manquements à la réglementation des essais cliniques", précise l'agence sanitaire à l'AFP.

5 Le ministre de la Santé menace de sanctions

Le lendemain des précisions de l'ANSM, François Braun évoque de potentielles sanctions contre les signataires de cette publication. "Nous serons amenés à prendre, avec Sylvie Retailleau (la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche), toutes les mesures nécessaires envers l'ensemble des signataires", prévient au Sénat le ministre de la Santé, qui parle d'un "nouvel épisode inadmissible de cette affaire". Le même jour, une perquisition est menée à l'IHU, dans le cadre d'une enquête du parquet de Marseille sur des soupçons d'essais cliniques non autorisés, mais qui ne concerne pas à ce stade le traitement du Covid-19. 

6La direction de l'AP-HM demande le retrait de l'étude

L'étude de Didier Raoult et ses collègues a du plomb dans l'aile : vendredi 2 juin, le directeur de l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM) demande aux auteurs travaillant toujours dans son institution le retrait de cette publication. "Je pense que la réputation de l'IHU de Marseille est suffisamment gravement mise en cause aujourd'hui pour que ce papier soit retiré", explique François Crémieux, le directeur des hôpitaux marseillais.

Dans la foulée, le professeur Jean-Christophe Lagier, co-auteur et chef de service dans le pôle des maladies infectieuses, "annonce son retrait", comme l'écrit l'AP-HM sur Twitter.

7L'ANSM annonce qu'elle va saisir la justice

Sur la base de ses observations réalisées quelques jours plus tôt, l'ANSM annonce samedi 3 juin, qu'elle "s'apprête à saisir la justice" concernant la publication de cette étude. "Cette étude aurait dû bénéficier d'un avis favorable d'un comité de protection des personnes et d'une autorisation de l'ANSM pour être mise en œuvre", ajoute l'agence auprès de franceinfo.

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