Complément d'enquête : "Les Le Pen : affaires de famille"
Lors des élections départementales, un électeur sur quatre a voté pour un candidat du Front national. Un parti en pleine mutation, qui a depuis peu un nouveau visage : celui de Marion Maréchal-Le Pen. Il y a encore quelques années, elle ne voulait surtout pas faire de politique. À seulement 25 ans, après Jean-Marie et Marine, elle est en train de se faire un prénom dans la dynastie politique d'extrême droite. Quelles sont ses idées ? Quelle est sa méthode ? Peut-elle faire de l'ombre à la présidente du Front national ? La petite-fille de Jean-Marie Le Pen a accepté, pour la première fois, d'être suivie par une équipe de télévision. "Complément d'enquête" sur les pas de Marion Maréchal-Le Pen, jeudi 9 avril à 22h25.
Pas de vague Bleu Marine lors des élections départementales malgré ce qu'annonçaient les sondeurs. Le Front national progresse le 22 mars, lors du premier tour, mais ne gagne aucun département lors du second. Pourtant, les résultats de la mutation entamée par Marine Le Pen sont là : le FN rassemble un quart des votants. Et c'est peut-être dans le Vaucluse, terre d'élection de Marion Maréchal-Le Pen, que la déception pourrait être la plus cuisante. Dans ce département, le FN n'obtient que 6 élus sur 34. Paradoxalement, le soir même, la toute jeune Marion Maréchal-Le Pen apparaît souriante dans son fief de Carpentras. Elle y est acclamée par des centaines de militants. Et elle refuse de parler d'échec :"Évidemment que c'est une déception. À partir du moment où nous étions premiers dans 11 cantons, que nous avions gagné un canton dès le premier tour et qu'en termes de voix, nous sommes le premier parti du département, bien sûr que nous espérions mieux faire."
Marion Maréchal-Le Pen :
un vocabulaire digne des années 30 ?
Marion Maréchal-Le Pen est née en 1989. Pourtant, ses éléments de langage semblent hérités de Maurras. Elle parle comme son grand-père, Jean-Marie Le Pen, et utilise assez régulièrement les termes "crapules", "sortez les sortants" et "tous pourris" qui fleurent bon le poujadisme des années 50. Elle s'en prend même au Premier ministre Manuel Valls, lequel s'inquiétait, avant les élections départementales, du danger du FN qui, selon lui, "s'apprête à fracasser la France". Pour Marion Maréchal-Le Pen, Manuel Valls "n'est décidément pas digne de la fonction qui est la sienne, encore moins de la plus haute fonction de l'État". Elle ajoute même que le Premier ministre adopterait "un comportement de sous-responsable de section socialiste d'Évry". Avec la petite-fille Le Pen, on semble renouer avec ce visage de l'extrême droite que Marine Le Pen essaie de gommer depuis quelques années.
Au FN, des discours locaux différents
mais peut-être pas contradictoires
Pour la chercheuse Cécile Alduy, le FN a réussi à adapter son discours en fonction des territoires qu'il convoite. Professeur à l'université de Stanford, elle s'est spécialisée dans le langage frontiste, et explique que Marine Le Pen utilise un vocabulaire différent selon qu'elle s'adresse à un bassin ouvrier du Nord ou à un petit village du Sud-Est. Dans le Sud, Marion Maréchal-Le Pen reprendrait le discours très droitier de son grand-père. Dans le Nord, les thématiques sont économiques et sociales. Dans le Sud-Est, fief de Marion Maréchal-Le Pen, le discours reste influencé par l'héritage de la décolonisation. Le FN s'y oppose de façon frontale et se focalise sur l'immigration maghrébine. L'utilisation d'expressions telles que "Français de souche" ou "grand remplacement" par Marion Maréchal-Le Pen peut sembler contradictoire avec la ligne officielle du FN. Marine Le Pen s'interdit de les utiliser au niveau national.
Alors, qui est vraiment Marion Maréchal-Le Pen ? Quelle est sa méthode ? Affronte-t-elle Marine Le Pen avec un discours contradictoire et plus droitier ? Ou leurs discours seraient-ils complémentaires, adaptés à leurs électeurs ?
Dans les coulisses de l'autoproclamé "premier parti de France", Complément d'enquête se penche également sur l'affaire Jeanne, le micro-parti proche de Marine Le Pen. La justice vient de mettre en examen son trésorier, un ancien du GUD (syndicat étudiant d'extrême droite radicale). Comment se fait-il que cette association, qui vend aux candidats FN des kits de campagne, brasse plus d'argent que le Front national lui-même ? Quels sont les liens entre Marine Le Pen et les anciens "gudards"?
Au sommaire :
Le FN en héritage
Une enquête de Tristan Waleckx, Florian Le Moal et Olivier Broutin.
Jeanne : micro-parti, maxi-profits ?
Une enquête de Clément Le Goff, Olivier Gardette et Élodie Metge.
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