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Loi famille, pacte de responsabilité, "Marseillaise" : quand l'UMP décide de polémiquer

Face à un Manuel Valls qui prend son propre camp à contrepied, la droite peine à trouver des angles d'attaque.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié
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Le président de l'UMP, Jean-François Copé (C), avec les présidents des groupes parlementaires, Christian Jacob (G) et Jean-Claude Gaudin (D), le 16 mai 2014 après un entretien avec François Hollande. (ALAIN JOCARD / AFP)

Le rôle d'opposant peut parfois être ingrat. Depuis sa victoire aux municipales, la droite ne sait plus sur quel pied danser face à un Premier ministre qui reprend une partie de ses idées. Difficile, pour l'UMP, de s'opposer sur le fond au pacte de responsabilité ou à la réforme territoriale, qui contiennent des mesures jadis défendues par la droite. C'est sur le terrain sociétal que se rabat alors l'opposition, qui s'attaque au texte sur la famille présenté lundi 19 mai à l'Assemblée nationale, non sans caricature. Tour d'horizon de ces sujets où la droite donne le sentiment de critiquer pour critiquer.

La proposition de loi sur la famille

Aucune trace de procréation médicalement assistée (la fameuse PMA) dans ce texte plutôt consensuel visant à assurer "l'intérêt de l'enfant" lorsque les parents se séparent. Mais comme aux plus grandes heures du débat sur le mariage pour tous, l'UMP a décidé de faire de l'obstruction parlementaire en déposant plus de 600 amendements.

Concrètement, le texte tend à développer l'exercice conjoint de l'autorité parentale en cas de séparation, mais également à reconnaître le rôle des beaux-parents et à favoriser le recours à la médiation familiale. Les questions qui fâchent – filiation des enfants conçus par PMA, accès aux origines des enfants nés sous X, etc. – sont soigneusement évitées. Le porte-parole désigné par l'UMP pour défendre sa position sur ce texte n'est autre que Philippe Gosselin, l'un des plus farouches opposants au texte sur le mariage pour tous.

Les 50 milliards d'économies et les baisses d'impôts

Lors des deux premières années du quinquennat de François Hollande, la droite n'a cessé de critiquer les hausses d'impôts destinées à combler le déficit. Et de prôner, plutôt, une forte réduction des dépenses de l'Etat et des baisses de charges pour les entreprises. C'est justement ce que tente de mettre en place Manuel Valls avec son plan de 50 milliards d'euros d'économies (non sans provoquer une levée de boucliers à gauche) et le pacte de compétitivité.

Mais plutôt que d'apporter son concours au pacte de responsabilité, en l'approuvant ou en y apportant des réserves, les députés UMP ont préféré voter contre, comme un seul homme (à quatre exceptions près), Jean-François Copé dénonçant "une illusion d'optique". Quant aux baisses d'impôts, dont Manuel Valls vient d'élargir l'ampleur, le président de l'UMP n'y voit aucun motif de satisfaction, mais une "très grosse ficelle avant les européennes".

Baisse d'impôts : Copé dénonce une "ficelle très grosse" avant les européennes

La réforme territoriale et le calendrier électoral

Début janvier, dans une interview au Parisien, le patron de l'UMP appelait de ses vœux une réforme territoriale avec, à la clé, une suppression des départements. Une voie qu'avait entrouverte la droite lors du précédent quinquennat en créant le conseiller territorial, mais vite refermée par la gauche en 2012. Lors de son discours de politique générale, début avril, Manuel Valls a remis l'ouvrage sur le métier en annonçant une division par deux du nombre de régions et la suppression des conseils généraux.

Mais la droite, qui, sur le fond, est favorable à une telle réforme, a mis l'accent sur la nécessité d'en passer par un référendum. Une hypothèse qui, étant donné le niveau d'impopularité de François Hollande, signerait la mort de la réforme.

Autre angle d'attaque : le probable report d'un an des élections régionales et cantonales, à 2016, que pourrait induire cette réforme. Un "tripatouillage électoral", pour Jean-François Copé. Le député-maire de Nice, Christian Estrosi, considère même que cette réforme n'est qu'un "prétexte" pour repousser ces échéances. Il oublie que les élections régionales étaient initialement prévues pour 2016. Elles avaient été avancées par la droite à 2014 (sous le nom d'élections territoriales), avant d'être repoussées en 2015 par la gauche dans leur forme initiale.

"La Marseillaise" non chantée par Christiane Taubira

Depuis 2012, Christiane Taubira est la cible de nombreuses attaques venues de la droite et de l'extrême droite. "Quand on vote FN, on a la gauche qui passe, et on a Taubira", avait déclaré Jean-François Copé quelques jours après la prise de fonctions de la garde des Sceaux.

Dernière polémique en date : une Marseillaise que n'a pas chantée la ministre lors des commémorations de l'abolition de l'esclavage. Attaquée par des élus de droite et d'extrême droite, elle a répondu sur sa page Facebook dans un long texte, en affirmant que "certaines circonstances appellent davantage au recueillement qu’au karaoké d’estrade". L'expression a fait bondir Jean-François Copé, qui a demandé sa démission.

Pourtant, sur le fond, c'est un mauvais procès qui est fait à la ministre. Sur les images, François Hollande bouge à peine les lèvres et les autres ministres présents ne chantent pas davantage. Une attitude qui paraît logique puisque, au micro, c'est une cantatrice professionnelle qui interprète l'hymne. Ces élus de gauche ne sont d'ailleurs pas les seuls à être restés impassibles devant une Marseillaise, comme le montre une vidéo de Nicolas Sarkozy à la commémoration du 65e anniversaire du Débarquement de Normandie, en 2009.

La "journée de la jupe" au lycée

Tout est parti d'une initiative des lycéens siégeant au Conseil académique de la vie lycéenne de l'académie de Nantes, qui se sont mobilisés pour organiser une "journée de la jupe" dans le cadre d'une action contre les discriminations. L'idée : inviter filles et garçons à venir en classe vêtus d'une jupe le vendredi 16 mai. L'académie, via une affiche, a fait la promotion de cette initiative, mais jamais l'Education nationale n'a obligé ni même demandé aux élèves de privilégier une tenue vestimentaire.

L'histoire aurait pu passer totalement inaperçue si des responsables de la Manif pour tous ne s'étaient pas offusqués de cette initiative auprès du ministre de l'Education. Des cris d'orfraie repris jusque dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, où la députée UMP de l'Orne Véronique Louwagie a accusé le gouvernement de "sciemment cacher les actions pour poursuivre dans la voie visant à imposer la théorie du genre".

Une publicité inespérée pour ce petit happening qui s'est de fait transformé en cirque médiatique. L'an dernier, la même action n'avait rencontré qu'un écho limité : hormis "deux ou trois kilts" portés par des garçons, ce sont surtout des filles qui étaient venues en jupe, "parfois même de manière symbolique, sur des pantalons", a expliqué le recteur. Cette année, au seul lycée Clémenceau de Nantes, une centaine de garçons sont arrivés en cours en jupe. Preuve que l'indignation peut aussi être contreproductive.

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