Vote du plan d'économies : de gauche à droite, un enjeu pour tous les partis
Les députés doivent se prononcer aujourd'hui sur le plan d'économies de 50 milliards d'euros présenté par le Premier ministre. L'occasion pour chaque formation politique de jouer sa carte.
Au regard des tractations, discussions de couloirs et des déclarations des uns et des autres, le vote de mardi à l'Assemblée nationale sur le plan de 50 milliards d'euros d'économies du gouvernement ressemblerait presque à un deuxième vote de confiance. Pourtant, le vote de ce plan d'économies par les députés est seulement consultatif. Mais l'enjeu est hautement politique pour le nouveau Premier ministre : Manuel Valls va tester sa capacité de rassemblement dans les rangs socialistes. Et au-delà, si certains députés de l'opposition votent pour le plan ou s'abstiennent. L'enjeu est tout aussi important pour les groupes politiques, qui s'offrent là une tribune et une occasion de peser dans les débats.
L'aile gauche du PS veut déplacer le curseur
Depuis la nomination de Manuel Valls, l'aile gauche du PS entend se faire entendre pour peser face à un Premier ministre qu'elle juge trop libéral. Ce vote, même consultatif, est donc le moment de faire bouger les lignes et de ramener la politique gouvernementale davantage à gauche.
Laurent Baumel, député socialiste d'Indre-et-Loire, fait partie des onze députés socialistes de l'aile gauche du parti qui se sont abstenus le 8 avril lors du discours de politique générale de Manuel Valls. Ces mêmes élus ont, depuis, adressé au Premier ministre des contre-propositions, soutenues par une centaine de députés socialistes. Jean-Marc Germain, député des Hauts-de-Seine, vantait encore lundi 28 avril, sur son compte Twitter, les soutiens à l'appel des députés socialistes "contre l'austérité".
Le même Jean-Marc Germain déclarait également lundi soir que, malgré les déclarations du Premier Ministre, "une cinquantaine de députés" ne votera pas le plan ce mardi 29 avril.
Le PS teste sa capacité à rassembler
Face à cette fronde persistante, le Parti socialiste va devoir prouver avec ce vote qu'il peut tenir ses troupes dans un moment crucial pour le gouvernement, "un jour qui compte pour l'avenir de la France et des Français", comme l'a écrit lui-même Manuel Valls dans son courrier adressé aux députés et publié par Europe 1. Lundi soir, les socialistes ont adopté à 31 voix pour, contre 15 "contre" et une "abstention", une résolution de soutien au plan d'économies.
Et pour ramener les brebis égarées, plusieurs personnalités du PS montent au créneau. Bruno Le Roux, chef de file des députés socialistes, a clairement mis en garde ceux qui seraient tentés par l'abstention, en évoquant des "conséquences", comme le rapportent Les Echos. Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du Parti socialiste, a également alerté contre "une démarche de sécession". Interrogé sur les sanctions qui pourraient êtres prises à l'encontre des députés tentés par l'abstention, le porte-parole du PS, Carlos Da Silva a affirmé: "nous sommes dans un processus de dialogue (...) et pas de coercition".
Les déclarations de Manuel Valls, lundi, sur son plan pauvreté sont justement un pas vers cette aile gauche. Les annonces d'un geste envers les petites retraites, la hausse du RSA ou encore le coup de pouce à certains fonctionnaires suffiront-ils à convaincre les plus rebelles de se ranger derrière la majorité ? Contactée par francetv info, Annick Lepetit, députée et porte-parole du groupe PS, affirme que "tout sera fait pour avoir l'écrasante majorité". "Le travail va durer jusqu'en début d'après-midi mardi pour convaincre ceux qui ne le seraient pas", explique-t-elle.
Les radicaux de gauche s'affirment comme l'allié incontournable du PS
Ce vote est, pour le Parti radical de gauche, le moment d'affirmer sa position indiscutable d'allié du PS. Vendredi 25 avril, le président du parti a annoncé, sur i-Télé, que les députés PRG voteront "avec conviction" le plan d'économies présenté par Manuel Valls. "Car il faut redresser la France", a affirmé Jean-Michel Baylet. "Cela demande des efforts, c'est difficile, il faut convaincre, tout le monde ne comprend pas, mais il faut y aller", a-t-il argumenté. Joint par téléphone, Alain Tourret, député PRG, justifie ce vote par "la solidarité gouvernementale". "Nous n'avons pas d'autre choix, sinon il faut quitter le gouvernement, poursuit-il. C'est un bon plan, on doit profiter de la cote de popularité de Manuel Valls, qui est une fenêtre de tir exceptionnel." Là aussi, les 17 députés du groupe se réuniront mardi matin.
Le Front de gauche veut s'imposer comme la seule véritable opposition
La ligne des dix députés du Front de gauche est claire et ferme. Ils n'ont pas voté la confiance à Manuel Valls le 8 avril. Ce mardi 29 avril, ils voteront "sans ambiguïté" contre le plan de 50 milliards d'euros d'économie. Sur un échiquier politique où, dans chaque groupe, s'expriment des opinions contrastées et parfois contradictoires, le Front de gauche affiche une unité sans faille.
Joint par francetv info, le communiste André Chassaigne, président du groupe, qualifie ce plan de "déclinaison du pacte Sarkozy-Merkel". Le député estime que c'est une preuve du "refus de toute alternative politique, en opposition totale à ce que François Hollande portait pendant la campagne". Un message clair à l'électorat de gauche déçu par le pouvoir en place.
Les Verts doivent définir une nouvelle ligne
Depuis la sortie des ministres Verts du gouvernement, la position des députés écologistes évolue dans un entre-deux : ils ne sont ni alliés, ni opposants farouches. Chez Europe Ecologie-Les Verts, la position commune du groupe sera prise mardi matin après la réunion des députés, explique la députée Barbara Pompili, contactée par francetv info. Avant cela, le vote des députés écologistes oscillait toujours entre opposition et abstention.
L'élue écologiste estime que la trajectoire budgétaire est "abrupte" et peut être "dangereuse économiquement". Barbara Pompili a toutefois concédé que les annonces faites par Manuel Valls étaient "les bienvenues", notamment sur les retraites. "Nous étudierons ensemble de près la lettre reçue par le Premier ministre, avant d'arrêter une décision. C'est notre méthode", a-t-elle conclu.
L'UDI veut se faire entendre
"Le plan va dans le bon sens." La phrase n'est pas celle d'un député de la majorité, mais bien d'une figure de l'opposition. Le leader des centristes à l'Assemblée, Yves Jégo, multiplie dans la presse ces derniers jours les déclarations favorables au plan de Manuel Valls en saluant le "virage considérable" du gouvernement, comme le rapporte Le Parisien.
Et quand on pose la question d'une éventuelle posture de l'UDI afin d'exister sur l'échiquier politique, on répond, au sein du parti, qu'il s'agit là avant tout de "convictions". Yves Jégo entend poursuivre le projet de Jean-Louis Borloo d'une "opposition responsable et constructive". A condition évidemment que le "gouvernement prenne les mesures qu'il faut", poursuit-on. L'UDI souhaite ainsi que l'âge de départ à la retraite à 62 ans soit appliqué dès 2015.
Mais des députés UDI ne veulent pas non plus apparaître comme "la roue de secours de l'exécutif", comme le rapporte l'Express. Certains pourraient donc être tentés de voter contre ce plan.
Les 29 députés du groupe se réunissent ce mardi matin pour savoir qui, au sein de l'UDI, votera quoi.
L'UMP serre les rangs, malgré quelques bémols
Evidemment, le premier parti d'opposition adopte dans sa majorité une posture de principe contre le plan Valls. Interviewé ce lundi 28 avril sur Europe 1, le président de l'UMP, Jean-François Copé, affirme que le plan du Premier ministre "n'est pas à la hauteur". Jean-François Copé évoque même "une illusion d'optique".
Cependant, l'opposition montre quelques failles. Dans les rangs de l'UMP, quelques voix expriment un autre point de vue. Le député UMP Jérôme Chartier a annoncé, vendredi 25 avril, dans les colonnes du Monde, qu'il ne voterait pas contre le plan d'économies, arguant qu'il soutient ce "retour vers l'équilibre budgétaire [qui repose] sur une baisse de la dépense publique et une baisse des impôts des entreprises". Frédéric Lefebvre, député des Français à l'étranger et ancien secrétaire d'Etat sous le gouvernement Sarkozy, a aussi choisi de s'abstenir, comme le rapporte, lundi 28 avril, Le Monde.
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