Election américaine : comment Donald Trump et Joe Biden peuvent contester les résultats
Le président américain Donald Trump revendique la victoire dans de nombreux Etats où le dépouillement est encore en cours. Joe Biden pourrait contester ces déclarations devant les tribunaux américains.
Alors que la balance penche très légèrement pour Joe Biden, rien n'est joué, car les deux candidats à l'élection américaine restent au coude-à-coude dans plusieurs Etats clés. Le président Donald Trump annonce sa victoire en Pennsylvanie, dans l'Ohio et en Caroline du Nord, des Etats où l'ensemble des bulletins sont loin d'avoir été dépouillés. Le résultat du vote populaire n'est pas remis en cause, les candidats s'attardent plutôt sur les Etats où l'écart est relativement faible pour en récupérer les grands électeurs. Franceinfo vous résume le processus de contestation des résultats électoraux aux Etats-Unis.
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Le dépouillement des bulletins par correspondance est en cours et prend du temps. Une faible avance dans les urnes pour l'un des deux candidats mercredi pourrait plonger le pays dans l'incertitude jusqu'à la fin des derniers dépouillements. Donald Trump avait prévenu : il considère le vote par correspondance comme une méthode de fraude électorale qui profiterait au camp démocrate, qu'il accuse de "voler l'élection". Il menace de saisir la Cour suprême pour bloquer le scrutin qu'il juge entaché de "fraudes massives".
We are up BIG, but they are trying to STEAL the Election. We will never let them do it. Votes cannot be cast after the Polls are closed!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) November 4, 2020
En cas de contestation des résultats dans un Etat, c'est en premier lieu la justice de cet Etat qui est compétente, car chacun fixe librement ses lois électorales. Les Etats disposent de procédures de recours propres, en justice ou par le biais d'une commission électorale, par exemple. L'Etat vérifie que sa loi a été bien respectée, auquel cas le résultat est validé. Dans le cas contraire, il peut ordonner le recomptage des voix.
Si un candidat souhaite contester une décision de justice locale, c'est le Congrès qui devient alors compétent. Mais quand la justice d'un Etat a déjà tranché les recours électoraux des candidats, le Congrès dispose d'un temps limité pour statuer : il ne peut plus intervenir à moins de six jours du vote formel des grands électeurs, fixé au 14 décembre 2020.
Les équipes juridiques des candidats sont rodées pour éviter toutes ces embûches. Elles s'échinent à trouver des points de droit que seule la Cour suprême américaine peut juger. "Pour qu'un juge fédéral soit compétent, il faut soulever une question de droit fédéral, c'est-à-dire qu'il faut qu'une loi d'un Etat méconnaisse la loi fédérale ou la Constitution", détaille Maud Michaut, doctorante en droit public américain à l'université Paris II Panthéon-Assas.
Quel que soit le candidat qui saisira en premier la Cour suprême, il n'est pas si évident que celle-ci penche du côté républicain, malgré sa majorité politique, selon Maud Michaut : "C'est dangereux, car la Cour risque sa légitimité institutionnelle si elle se prononce trop en faveur de Trump. Elle a tout intérêt à être la plus mesurée possible."
Une "armée d'avocats" au service des candidats
Les deux candidats américains sont parés pour cette bataille juridique. Joe Biden a recruté quelque 600 avocats, selon Reuters* pour s'assurer de la légalité de l'élection et tenter des recours partout où cela est possible. "Ils ont une armée d'avocats avec eux. Chaque camp a déjà lancé des actions juridiques à l'encontre de certains Etats", explique Steven R. Ekovich, politologue et professeur à l'université américaine de Paris. "Les républicains vont tenter tous les recours possibles, mais les démocrates s'y attendent, ils disposent d'un arsenal juridique considérable. Des deux côtés, on a une stratégie bien préparée", renchérit Maud Michaut.
Les délais de réception des bulletins par correspondance ont déjà causé une guerre des tribunaux entre les deux camps. Les soutiens de Donald Trump ont d'ailleurs essuyé deux revers de la part de cours suprêmes locales : la justice a autorisé le comptage des bulletins par correspondance reçus jusqu'au 6 novembre en Pennsylvanie et jusqu'au 12 novembre en Caroline du Nord. Dans le Wisconsin, en revanche, la Cour suprême d'Etat a accédé aux demandes républicaines. L'extension du délai légal de réception des bulletins de vote par correspondance a été refusée. Au total, environ 300 procédures, selon AP*, ont été entamées avant le jour de l'élection.
Les particularités définies par chaque Etat sont à l'origine des contestations. C'est ce qu'explique Anne Toulouse, journaliste et autrice du livre Dans la tête de Donald Trump (éd. Stock, 2016) : "Certains Etats décident du jour au lendemain qu'il n'y a plus besoin de cachet de la poste", pour attester de la date d'envoi d'un bulletin par correspondance. "Ces règles, on peut les contester", avance-t-elle dans une interview à franceinfo, le 3 novembre.
Le précédent historique de 2000
Le dernier cas majeur de contestation de scrutin remonte à 2000. Le républicain George W. Bush avait remporté 246 grands électeurs et le démocrate Al Gore en comptait 267, avant que le dernier Etat ne publie ses résultats. La Floride et ses 25 grands électeurs de l'époque étaient décisifs. Le score s'est révélé extrêmement serré, George W. Bush emportait l'Etat par seulement 537 voix d'avance, selon les résultats donnés au soir de l'élection.
Un recomptage des voix a été demandé par l'équipe démocrate. La Floride a accepté, mais c'est la Cour suprême des Etats-Unis qui a tranché en faveur du républicain, plus d'un mois après le scrutin. "En 2000, Al Gore pouvait apparaître comme un mauvais perdant : il avait reconnu sa défaite avant de revenir sur ses déclarations. En 2020, ce sera beaucoup plus difficile de penser cela de Joe Biden", conclut Maud Michaut.
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