"Gilets jaunes" : du moratoire à l'annulation, le rétropédalage du gouvernement sur la hausse de la taxe carbone en cinq actes
L'Elysée a annoncé, mercredi soir, l'annulation de l'augmentation de la taxe carbone pour 2019. La veille, le Premier ministre, Edouard Philippe, évoquait pourtant un moratoire de six mois sur cette hausse.
L'exécutif fait marche arrière et assure qu'il a entendu la "colère" grave et "insaisissable" des "gilets jaunes". Alors qu'il assurait maintenir le cap, affirmant et réaffirmant sa volonté d'augmenter la taxe sur les carburants au 1er janvier 2019, le gouvernement a finalement fait un premier pas symbolique face aux manifestants, répondant à leur première revendication : l'annulation de cette hausse.
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La taxe carbone, un prélèvement pesant sur les produits énergétiques selon leur niveau d'émission de CO2, devait passer de 44,60 à 55 euros la tonne de CO2 au 1er janvier 2019. Les taxes sur le gazole devaient ainsi augmenter de 6,5 centimes par litre l'année prochaine, et les taxes sur l'essence de 2,9 centimes par litre.
De l'annonce d'un moratoire de six mois sur cette hausse, mardi 4 décembre, à l'annulation de l'augmentation en 2019, mercredi 5, retour en cinq actes sur le rétropédalage de l'exécutif.
1Matignon annonce un moratoire de six mois
La journée de mardi marque un tournant dans la réponse du gouvernement face au mouvement des "gilets jaunes". Tôt dans la matinée, Matignon révèle à l'AFP que le Premier ministre, Edouard Philippe, va annoncer un moratoire sur la hausse des taxes sur les carburants.
Selon une source gouvernementale, la mesure a été décidée lors d'une réunion de crise, présidée par Emmanuel Macron lundi soir. Quarante-huit heures plus tôt, de graves violences ont éclaté à Paris, en marge de l'"acte 3" de la mobilisation des "gilets jaunes". La situation est critique : 133 personnes ont été blessées et 412 ont été interpellées.
Selon les informations de franceinfo, l'idée d'un moratoire de six mois sur cette augmentation était présente dans une première version du discours d'Emmanuel Macron sur la transition écologique, mardi 27 novembre. Elle a finalement été supprimée du texte final, moins d'une heure avant l'allocution du président.
2Edouard Philippe confirme ce moratoire
Lors d'une allocation depuis l'Hôtel de Matignon, le chef du gouvernement annonce, quelques heures plus tard,, un ensemble de mesures en réponse à la mobilisation des "gilets jaunes". Edouard Philippe promet alors "une suspension pendant six mois de la hausse de la taxe carbone, de la convergence diesel-essence et de la hausse de la fiscalité sur le gazole entrepreneur non routier".
Ces augmentations "ne s'appliqueront pas avant d'être débattues par toutes les parties prenantes" pendant la concertation sur les réponses à apporter aux "gilets jaunes", poursuit-il. "Il faut mettre en œuvre des mesures d'accompagnement. Si on ne les trouve pas, nous en tirerons les conséquences", lance le Premier ministre.
A ce moment-là, Edouard Philippe n'exclut donc pas l'inscription de l'augmentation dans un budget rectificatif "au printemps", à l'issue des débats sur les solutions à apporter aux "gilets jaunes".
3Le Premier ministre évoque une annulation
Changement de ton mercredi. Au cours d'un débat de cinq heures à l'Assemblée nationale sur les mesures annoncées la veille par Edouard Philippe, le Premier ministre va plus loin, dans les concessions faites aux "gilets jaunes". Il ne s'agit alors plus d'un moratoire de six mois, mais d'un abandon pour 2019.
Si nous ne trouvons pas les bonnes solutions, alors, nous n'appliquerons pas cette taxe.
Edouard Philippedevant les députés
Et le Premier ministre de conclure en annonçant que "la hausse de cette taxe est désormais abandonnée dans le PLF [projet de loi de finances] 2019". "Elle ne sera pas dans le PLF 2019 et toute solution devra être issue du débat", ajoute-t-il. Ses mesures sont approuvées par l'Assemblée nationale, par 358 voix contre 194.
4L'Elysée parle d'une hausse "annulée"
Mercredi soir, l'Elysée tente de clarifier la position du gouvernement. La présidence annonce ainsi à franceinfo que l'augmentation de la taxe carbone au 1er janvier n'est pas "suspendue, ni différée", mais purement et simplement "annulée". L'Elysée enterre donc le moratoire de six mois proposé par Edouard Philippe la veille, et déjà remis en cause par le Premier ministre lui-même quelques heures plus tôt, au Palais Bourbon.
5L'exécutif nie tout différend
Peu après cette annonce, la présidence précise ses propos dans un communiqué, relève Le Monde. L'Elysée assure alors que "le président et le Premier ministre ont souhaité de concert que la hausse de la taxe carbone prévue dans le PLF 2019 soit supprimée". Il nie ainsi tout désaveu du Premier ministre par Emmanuel Macron.
Le ministre de la Transition écologique et solidaire, François de Rugy, a justifié lui aussi les changements de direction du gouvernement, mercredi soir, sur BFMTV, lors d'un débat avec des "gilets jaunes". "Le président (...) m'a dit : 'Les gens ont eu l'impression qu'il y avait une entourloupe, qu'on leur disait c'est une suspension mais hop, ça reviendra après'", a défendu le ministre.
"Il n'y a aucun différend" entre le chef du gouvernement et le président, a insisté de son côté le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, sur France 2 jeudi matin. "La taxe sur les carburants est supprimée pour 2019, je pense que le message est suffisamment clair."
️ @BrunoLeMaire "Il n'y a aucun différend entre le Président et le Premier ministre, on tirera les leçons au moment venu." #GiletsJaunes #Les4V @telematin pic.twitter.com/n5HVaGWotK
— Caroline Roux (@Caroline_Roux) December 6, 2018
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