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Gouvernement : le projet de loi sur le pouvoir d'achat en six questions

Le projet de loi doit être présenté jeudi après-midi en Conseil des ministres. Il sera par la suite débattu à l'Assemblée nationale au cours du mois de juillet.

Article rédigé par franceinfo, Sarah Lemoine
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
La Première ministre, Elisabeth Borne, avant un Conseil des ministres, à l'Elysée le 23 mai 2022. Photo d'illustration. (JOSSELIN CLAIR / MAXPPP)

Le très attendu projet de loi sur le pouvoir d'achat est présenté jeudi 7 juillet à 16 heures en Conseil des ministres. Alors que l'inflation continue d'accélérer (5,8% en juin sur un an, 6,8% attendu en septembre), l'exécutif envisage de dépenser 25 milliards d'euros environ pour protéger les Français face à l'envolée des prix à la consommation. Le texte sera ensuite âprement débattu à l'Assemblée nationale, à partir du 18 juillet. Faute de majorité absolue, le gouvernement va devoir faire des compromis pour voir son projet de loi adopté.

Quelles sont les mesures déjà dévoilées par l'exécutif ?

Le premier paquet de mesures vise à soutenir les revenus au sens large. Avec d'abord la revalorisation anticipée d'un large éventail de prestations sociales. Parmi elles, la pension de retraite de base, le RSA, la prime d'activité, les allocations familiales, ou l'allocation adulte handicapée. La hausse sera de 4%, versée début août avec rétroactivité au 1er juillet. Pour les aides personnalisées au logement (APL), ce sera un petit peu moins avec 3,5%.

Les 5,7 millions de fonctionnaires obtiennent une augmentation générale. Leur point d'indice, gelé depuis quasiment dix ans, augmente de 3,5%. Il s'agit de la plus forte augmentation depuis 1985 mais elle ne compensera pas l'inflation qui atteint 5,8% sur un an, selon la dernière estimation provisoire de l'Insee. Il est à noter que la hausse du point d'indice n'a que très rarement compensé l'inflation.

Quant aux deux millions d'indépendants, ils bénéficient d'une baisse de cotisations sociales. De l'ordre de 550 euros par an, pour un revenu au smic.

Une augmentation du smic est-elle prévue ?

Non, Il s'agit d'une ligne rouge pour le gouvernement. À la place, les employeurs auront la possibilité de verser jusqu'à 6 000 euros de prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, sans impôts ni cotisations sociales. C'est trois fois plus qu'actuellement. Enfin, les petites et moyennes entreprises seront incitées à mettre en place des accords d'intéressement pour mieux partager les profits générés.

La hausse du smic à 1 500 euros ou encore l'augmentation des salaires fera partie du contre-projet présenté par les députés de la Nouvelle union populaire et sociale (Nupes) afin de marquer une philosophie différente par rapport au texte du gouvernement. "Nous préférons des salaires qui créent des droits sociaux, souligne Boris Vallaud, patron du groupe des socialistes à l'Assemblée nationale. Qui permettent de vivre dignement, que des chèques occasionnels ou des primes désocialisées et défiscalisées, laissées au bon vouloir de l'employeur."

Le smic avait déjà connu une hausse, automatique, le 1er mai 2022. Face à l'inflation, et comme le prévoit la loi, une revalorisation du smic de 2,65% au 1er mai a été réalisé. Ce coup de pouce, qui concerne un peu plus de 2 millions de salariés en France, selon le ministère du Travail, avoisine la trentaine d'euros. Pour un temps plein, le salaire minimum de croissance mensuel s'établit désormais à 1 645,58 euros brut. Soit une rémunération mensuelle nette qui passe de 1 269 à 1 302,64 euros. Quant au smic horaire brut, il augmente de 28 centimes pour atteindre 10,85 euros.

Que prévoit le gouvernement face à l'envolée des prix du carburant ?

Le ministre de l'Économie a évoqué plusieurs pistes alors que les prix des carburants se maintiennent toujours au-dessus de 2 euros le litre. Et la remise de 18 centimes à la pompe ne devrait pas être prolongée jusqu'en 2023 : elle va disparaître d'ici la fin de l'année, a assuré Bruno le Maire, jeudi. 

"Nous allons remplacer les 18 centimes qui vont être ramenés à 16, 12, 10, on va le faire très progressivement mais à la fin de l'année il n'y aura plus de remise carburant, et dès le 1er octobre, en tout cas c'est la proposition que nous faisons, nous mettons en place une indemnité carburants pour les travailleurs", a déclaré le ministre sur Europe 1. Bruno Le Maire suggère ainsi le versement d'une nouvelle indemnité, versée en une fois, pour les salariés et les alternants obligés de prendre leur voiture pour aller travailler. Mais sous conditions de salaire. Est-ce que ce sera 1 500, 1 600 ou 1 800 euros par mois ? Est-ce que cette indemnité cohabitera avec le dispositif gros rouleur également évoqué ? Tout cela sera discuté lors du débat au Parlement, indique Bercy. 

Cette remise sera en tous les cas réservée aux travailleurs modestes, propriétaires d'une voiture et qui l'utilisent pour aller travailler. Elle ne sera pas automatique, il faudra en faire la demande via un formulaire sur le site internet des finances publiques. 

Quelles mesures sont prévues face à l'envolée de tarifs de l'énergie ?

Le gouvernement s'engage à maintenir le bouclier tarifaire mis en place à l'automne. Il permet de plafonner la hausse des factures d'électricité à 4% et de geler les prix du gaz à leur niveau d'octobre 2021. Le dispositif serait prolongé jusqu'à la fin de l'année 2022.

La France insoumise (LFI), le Parti communiste Français (PCF) ou encore le Rassemblement national (RN) proposent de taxer les bénéfices des entreprises qui tirent parti de l'inflation, comme TotalEnergies, ce que rejette le gouvernement. "Taxer les superprofits, ça ne va pas réduire notre consommation d'énergie", a déclaré la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, mardi sur franceinfo.

Que propose le gouvernement sur les prix des aliments ?

En attendant la création d'un chèque alimentaire, l'exécutif propose une aide alimentaire d'urgence : 100 euros par foyer, plus 50 euros par enfant à charge. Elle serait réservée à neuf millions de foyers modestes. Elle sera également débattue au Parlement.

Le projet de loi pouvoir d'achat ne comprendra pas la possibilité, pour les grandes surfaces, de pratiquer des promotions alimentaires jusqu'à 50%. La proposition faite lundi sur France Inter par Bruno Le Maire a été "écartée ce [mardi] matin", lors d'une réunion de travail autour d'Emmanuel Macron relative notamment au pouvoir d’achat.

Quelles sont les autres mesures envisagées pour redonner du pouvoir d'achat ?

L'exécutif propose de limiter la hausse des prix des loyers à 3,5% maximum, à partir du 15 octobre. Enfin, 27 millions de foyers n'auront plus à payer la redevance audiovisuelle. Elle est de 138 euros en métropole, 88 euros en Outre-mer. La Première ministre a confirmé sa suppression mercredi pendant sa déclaration de politique générale. Cette suppression inquiète les organisations syndicales des médias publics*, mais aussi des acteurs du monde la culture et les partis de gauche. Les craintes se portent notamment sur une perte d'indépendance du service public et sur la réduction des budgets de l'audiovisuel public.

Enfin, selon les informations de franceinfo, les étudiants qui touchent une bourse sur critères sociaux vont la voir augmenter de 4% dans le cadre d'une mesure réglementaire. Cette mesure ne figure pas dans le projet de loi pouvoir d'achat. Les étudiants précaires vont aussi toucher l'aide exceptionnelle de 100 euros. Et le dispositif des repas à un euro dans les restaurants universitaires est reconduit.


*franceinfo.fr est l'offre d'information numérique de l'audiovisuel public. Ses équipes et leur production, à France Télévisions et à Radio France, sont financées en partie par la redevance.

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