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"La hiérarchie nous a fortement encouragés à maintenir une activité" : ces patrons qui abusent du chômage partiel et continuent de faire travailler leurs salariés

Grâce à ce dispositif, l’État rembourse à certaines entreprises tout ou partie des salaires versés aux quelque 8 millions de salariés déjà concernés. Mais certains patrons profitent indûment de la solidarité nationale.

Article rédigé par Sarah Lemoine
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Les entreprises qui fraudent sur le chômage partiel s’exposent à des sanctions. (AGN?S GAUDIN / MAXPPP)

Votre employeur abuse-t-il du chômage partiel ? Depuis le début de la crise, 700 000 entreprises ou associations ont fait une demande. Grâce à ce généreux dispositif, l’État leur rembourse tout ou partie des salaires versés. Huit millions de salariés sont déjà concernés. Problème : certains patrons profitent abusivement de cette solidarité nationale.

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Vingt-quatre milliards d’euros : c’est ce que le chômage partiel va coûter à l’État, selon les dernières estimations. Et vu les sommes en jeu, le gouvernement répète qu’il sera intraitable avec les entreprises qui fraudent. Pourtant, certaines ont franchi la ligne rouge.

C’est ce que raconte ce salarié, qui souhaite rester anonyme : "Je suis chef de projet dans un grand groupe international. Dès l’annonce du confinement, j’ai été mis en chômage partiel comme la quasi-totalité des collaborateurs. Toutes mes heures sont chômées, donc je ne suis pas censé travailler du tout. Pourtant, dans mon département, la hiérarchie nous a fortement encouragés à maintenir une activité. On reçoit des mails pour évoquer les sujets en cours. On nous dit ce qui doit être fait et pour quand."

Je travaille au moins 15 à 20 heures par semaine. Pour certains de mes collègues, c’est encore plus. Ils continuent de travailler 70 à 80% de leur temps habituel. Si l’État veut trouver la fraude, il trouvera.

un salarié anonyme

à franceinfo

"Les efforts de dissimulation ne sont pas très grands, conclut le salarié. On a écrit des mails à des clients, on a fait des demandes auprès d’organismes publics."

Le ministère du Travail promet des contrôles a posteriori. Mais comment aller traquer les abus parmi des centaines de milliers d’entreprises qui bénéficient du chômage partiel ? En s’appuyant notamment sur des signalements, explique Camille Planchenault, inspecteur du travail et délégué SUD. "Pour cibler, explique-t-il, nous aurons besoin des représentants du personnel et des salariés, sachant qu’il y a un principe de confidentialité des plaintes. L’inspection du travail n’a pas le droit d’indiquer que nous avons été prévenus par telle ou telle personne."

Parfois, l'information ne sortira pas

Mais ce sera plus difficile dans certaines situations, reconnaît Camille Planchenault. "Dans les entreprises où il n’y a pas de représentant du personnel, explique l'inspecteur du travail, on peut très bien avoir des situations où l’employeur demande une activité partielle et propose de compléter, par exemple de la main à la main, le salaire, puisque le chômage partiel correspond à 84% du salaire. On risque d’avoir des difficultés dans ce type de structure, où l’information ne sortira pas, par peur ou par arrangement.

Les entreprises qui fraudent sur le chômage partiel s’exposent à des sanctions. Remboursement des sommes versées, 30 000 euros d’amende et jusqu’à deux ans de prison.

Confinement : les abus de chômage partiel - Ecoutez le reportage de Sarah Lemoine

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