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"C’est ce qui m’a fait venir à Monaco" : la ville-État est le seul pays entièrement couvert par la 5G

Dans ce territoire de 2 km², la 5G sert notamment aux pompiers et à attirer les nouvelles entreprises. La technologie fait tout de même débat sur le Rocher et certains sont inquiets pour la sécurité informatique.

Article rédigé par franceinfo, Noémie Bonnin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Monaca est le seul pays entièrement couvert par la 5G, septembre 2020. (NOEMIE BONNIN / RADIO FRANCE)

Le coup d’envoi des enchères 5G est lancé, mardi 29 septembre, en France. Elles doivent permettre aux opérateurs d’acquérir des "blocs" de fréquences, et ouvrir la voie aux premiers services 5G dans quelques villes dès la fin de l’année 2020. Monaco est le seul pays entièrement couvert par la 5G. Et cela fait plus d’un an, juillet 2019 plus précisément, qu’elle est installée. Vu la taille du territoire, 2 km², c’est sûr qu'il est plus facile à couvrir en totalité que d’autres pays, comme la Corée du Sud, très en pointe sur la cinquième génération de réseaux mobiles.

>> Pourquoi le débat sur l'arrivée de la 5G en France est-il aussi survolté ?

Mais quand on demande dans les rues de Monaco, le premier constat est que très peu de monde bénéficie du réseau 5G sur son téléphone. "Non, je ne l'ai pas", "Mon portable n’est pas adapté pour", répondent les passants. Pour cause, les appareils capables de le capter sont encore relativement rares. Apple notamment, qui équipe 80% des habitants de Monaco, n’a pas encore sorti le sien.

Des images en temps réel pour les pompiers

La 5G a surtout, pour l’instant, des applications dans le domaine professionnel. "Autorisation du décollage et du flux vidéo", à la caserne des pompiers dans la salle de commandement opérationnel, on surveille le décollage d'un drone. Depuis une dizaine d’années, les pompiers monégasques utilisent un drone pour les aider dans leurs interventions, raconte le commandant Maxime Yvrard.

Le commandant Maxime Yvrard, au centre opérationnel des pompiers de Monaco, montre les images tournées par le drone et envoyées en temps réel grâce à la 5G, septembre 2020. (NOEMIE BONNIN / RADIO FRANCE)

Avec la 5G, le travail a beaucoup évolué. Les images sont envoyées en direct, et sont projetées en très bonne qualité. Avant à la caserne, le pilote était le seul à voir la vidéo sur son petit écran. "On voit la qualité et la fluidité de l’image pour faire de l’analyse fine des images vidéos qui nous arrivent, explique Maxime Yvrard. La 5G permet vraiment de transmettre la qualité totale de l’image. Le drone va filmer en HD et on n’a pas besoin de réduire le format et la qualité de l’image pour la transmettre puisque le tuyau est suffisamment gros pour acheminer les fichiers. Avant, ça décrochait parce que les réseaux pouvait être saturés."

Aujourd’hui il n’y a plus de saturation et on n’a plus de latence, c’est de la transmission en temps réel de l’information.

Maxime Yvrard

Les pompiers utilisent leur drone environ deux fois par mois en opération ou pour des événements particuliers, comme le Grand Prix de Formule 1.

Un argument d'attractivité pour la principauté

Les pompiers ne sont pas les seuls à utiliser cette nouvelle technologie. Pour Monaco, la 5G est devenue un argument de vente et d’attractivité. Les autorités veulent se montrer à la pointe pour attirer des entreprises. Sylvain Ordureau, président de la société Vizua, a ouvert un bureau à Monaco en février dernier. Il développe une plateforme qui vous permet de partager des images en trois dimensions. "C’est tout d’abord la 5G qui m’a fait venir à Monaco, affirme-t-il, et puis, c’est tout l’écosystème qui fait qu’une entreprise peut réussir. Vous avez des financiers qui sont assez ouverts et qui ont parié sur le numérique alors que Monaco est plus réputé pour le bâtiment et la finance."

Sylvain Ordureau, président de la société Vizua, montre sa plateforme d’images en 3D. (NOEMIE BONNIN / RADIO FRANCE)

La principauté est donc en train de se réinventer au travers de ces nouvelles technologies. Mais à Monaco la 5G est bien l'objet d'un débat comme en France. Une association s’est d’ailleurs montée il y a un an et demi. Héléna Krajewicz en est la présidente et regrette le manque d’informations, notamment sur les possibles conséquences sur la santé. Pour elle, rien n’a évolué depuis un an : "Il faut aller chercher l’information et on se rend compte qu’on est dans un flou artistique quand même assez grand. On n’est pas aujourd’hui tellement rassuré puisqu’il n’y a aucune étude réelle qui a été faite sur l’effet de ces ondes 5G sur le corps humain et la biodiversité, avant même les ondes millimétriques". La 5G millimétrique est le niveau deux de la cinquième génération de réseaux mobiles qui n’est pas encore installée. Dans le doute, l’association demande un moratoire à ce sujet.

La crainte de l'espionnage

Autre inquiétude, cette fois sur la sécurité informatique avec la crainte de plus de cyberattaques et de l’espionnage chinois. "On sait que des États comme la Russie, la Chine ou l’Iran ont essayé d’exploiter et de s’infiltrer dans des réseaux d’énergie ou de distributions d’électricité, affirme Guy-Philippe Goldstein, chercheur indépendant en cybersécurité. Donc, on doit s’attendre à ce qu’il y ait beaucoup d’acteurs malveillants, criminels ou d'États-nations qui puissent exploiter ces nouvelles opportunités. Non seulement, on peut faire de l’espionnage mais on peut surtout faire de l’interdiction de système."

À partir du moment où la 5G permet de guider ou piloter des objets connectés, des voitures ou des systèmes de transports, forcément si quelqu’un arrive à avoir la main sur ce système, il peut stopper la vie économique d’un pays.

Guy-Philippe Goldstein, chercheur indépendant en cybersécurité

Dans le viseur notamment : Huawei. L’entreprise a justement installé les antennes à Monaco. Le géant des télécoms chinois est banni désormais aux États-Unis. Après avoir longtemps hésité, la France et l’Europe se rangent petit à petit derrière la position américaine.

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