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Comment se déroule le déploiement de la 5G en Corée du Sud, en Espagne et en Irlande ?

Dans Le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir tout ce qui se fait ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, nous faisons un point sur le déploiement de la 5G en Corée du Sud, en Espagne et en Irlande.

Article rédigé par franceinfo - Louis Palligiano, Mathieu de Taillac et Emeline Vin, édité par Thomas Destelle
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6 min
Un homme utilise son téléphone à côté d'un panneau 5G sur le stand de Qualcomm au Mobile World Congress (MWC) à Barcelone, le 27 février 2019. (PAU BARRENA / AFP)

La téléphonie mobile de cinquième génération continue de faire débat en France. De nombreux pays se sont lancés dans le déploiement de cette nouvelle téchnologie qui doit remplacer la 4G dans nos téléphones portables. Franceinfo s’arrête aujourd’hui sur le cas de la Corée du Sud, de notre voisin espagnol et de l'Irlande

La Corée du Sud a investi massivement dans la 5G

La Corée du Sud est connue pour être hyperconnectée. Le pays de 52 millions d'habitants a été le premier à déployer un réseau de technologie mobile de cinquième génération à l’échelle nationale, c’était en avril 2019. Un an et demi après avoir ouvert au public son réseau 5G, l’adhésion des citoyens semble largement acquise. Le pays compte déjà 8 millions d’utilisateurs, soit 11,3% des 70 millions d'abonnements mobiles au total. Cette part devrait encore grimper au second semestre, avec l’arrivée sur le marché de nouvelles versions de téléphones 5G, tels que le Galaxy Note 20 de Samsung. De plus, Séoul mène une vaste opération de séduction auprès de sa population en faisant notamment miroiter la création de 600 000 emplois et un chiffre d’affaires de 73 milliards de dollars pour les industries liées dans les cinq prochaines années.

Mais aujourd’hui, les Sud-Coréens ne profitent pas encore pleinement des apports de la 5G. Les utilisateurs de la 5G ne peuvent se connecter au réseau de dernière génération qu’un peu plus de 20% du temps, et doivent encore compter sur la 4G. La mauvaise qualité du service a d’ailleurs été à l’origine de plusieurs milliers de plaintes à son lancement. De plus, les secteurs clés de l’ère 5G, tels que l’Internet des Objets (IdO), les villes intelligentes ou les voitures autonomes sont encore en développement. Afin de proposer rapidement des services de communications et un réseau national ultrafiables, les principales firmes de télécommunications du pays ont promis d’investir l’équivalent de 19 milliards d’euros d’ici 2022.

Sur le plan sanitaire et environnemental, l’installation de plus de 115 000 stations de base 5G sur tout le territoire n’a suscité aucune inquiétude particulière. En revanche, de nombreux observateurs s’alarment du fait que la majorité des appareils connectés seraient potentiellement vulnérables aux cyberattaques. Pour pallier les risques, le gouvernement sud-coréen a donc lancé un Conseil de sécurité 5G impliquant des opérateurs de téléphonie mobile et des experts privés.

L’Espagne est allée vite mais la 5G concerne peu d’utilisateurs

Notre voisin ibérique est l’un des pays qui a été le plus rapide en Europe. Aujourd’hui les principales compagnies de téléphonie commercialisent la 5G. Internet va beaucoup plus vite en Espagne, mais tout de même pas aussi vite que ça. Sur le papier, la 5G est déployée et les quatre compagnies, Movistar, Vodafone, Orange et Yoigo la proposent à leurs abonnés, sans changement de tarif.

Dans la pratique ça reste un produit pour une minorité et on est encore aux débuts de la technologie. D’abord, les zones couvertes sont réduites, même si les opérateurs essaient de couvrir les plus grands marchés possibles. Les compagnies se concentrent donc sur les grandes villes. Orange, par exemple, ne couvre que huit villes, et uniquement leurs centres villes. En tout, cela représente entre 20 et  30% de la population espagnole. Movistar, l’opérateur historique, a pour objectif de parvenir à couvrir cette année 75% de la population.

Et puis ce n’est pas tout d’avoir une antenne 5G, il faut aussi avoir un portable adapté. Pour le moment ce sont surtout les modèles haut de gamme, autour de 1 000 euros, avec aussi quelques terminaux à 300 ou 400 euros. Enfin, dernière limitation, on parle de 5G mais on est encore au début du déploiement technologique, et les techniciens nous disent que pour le moment c’est plutôt de la 4G+ améliorée. Cela veut dire qu’on a des vitesses dix fois supérieures à la 4G, tout de même. Mais quand on sera en “vrai” 5G, on devrait atteindre 100 fois la vitesse de la 4G.

Dans d’autres pays, deux obstacles ont freiné le déploiement : l’hostilité d’une partie de la population et les soupçons à l’égard de l’entreprise chinoise Huawei. Mais en Espagne, il n’y a pas eu de grand débat sur un principe de précaution, sur de possibles effets de la 5G sur la santé public. Les théories mêlant la 5G au coronavirus ont eu un peu de répercussion dans le pays. On les a entendues dans les manifestations anti-masques ou anti-confinement par exemple, mais il n’y a pas eu de critique mesurée, d’élus appelant à la précaution ou à un moratoire sans pour autant diffuser des théories de la conspiration.

Quant à Huawei, elle a été plutôt bien accueillie en Espagne. Le journal ABC a révélé en juillet dernier que le service des renseignements espagnol, le CNI, avait mené sa petite enquête sur de possibles failles de sécurité de la technologie de l’entreprise chinoise et n’avait rien trouvé. Du coup, il n’y a pas d’instructions du gouvernement de restreindre le recours à Huawei, même si certaines compagnies décident d’elles-même de diversifier leurs fournisseurs. Telefonica, par exemple, la matrice de Movistar, tient à avoir au moins deux fournisseurs pour ne pas dépendre d’un seul. Orange travaille en Espagne avec Huawei, mais aussi avec Nokia et Ericsson.

En Irlande, des théories du complot fleurissent sur la 5G

En Irlande, plusieurs opérateurs ont déjà entamé le déploiement de la 5G sur le territoire. Mais ça ne satisfait pas tout le monde. Comme ailleurs en Europe, la nouvelle technologie est sujette à des théories du complot autour de la santé. Les opérateurs ont même réagi. Three Ireland, le troisième opérateur mobile d’Irlande, a demandé la semaine dernière au ministère des Communications de s’attaquer au problème de la désinformation autour de la 5G. C’est la troisième fois en moins d’un an. Tout particulièrement depuis le début de la pandémie de coronaviurus, la 5G est accusée de nuire à la santé des habitants. Au printemps, dans le nord de l’Irlande, des antennes ont d’ailleurs été incendiées et des techniciens agressés car soupçonnés d’installer la 5G.

Three Ireland, ainsi que plusieurs autres acteurs de la téléphonie, considèrent de manière générale que le gouvernement ne s’engage pas assez aux côtés de cette nouvelle technologie. Dans un rapport publié en août, le think tank Connect déplore le manque de stratégie générale, qui impliquerait à la fois les opérateurs et les autorités locales et nationales. Selon ce rapport, l’Irlande doit agir maintenant si elle ne veut pas passer à côté d’un marché estimé à 12 milliards de milliards de dollars d’ici 15 ans.

Car la 5G n’est vraiment pas en tête des sujets de conversation. Pour un Irlandais sur dix, rien que le haut débit n’est pas d’actualité. La couverture 4G est elle aussi très incertaine dans les zones rurales. Le gouvernement évoque assez peu ce sujet, il a d’autres priorités en ce moment. Pourtant l’Irlande est quand même bien avancée dans le déploiement. Eir, le premier opérateur, propose la 5G dans une vingtaine de villes, plutôt positif compte tenu de la taille de l’Irlande. Le deuxième fournisseur, Vodafone, est disponible dans cinq villes. Côté technologies, deux constructeurs sont pour l’instant plébiscités, Ericsson, et le chinois Huawei, à l’encontre des recommandations de la Commission européenne.

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