Complément d'enquête : "Dictatures, business : diplomates de l'ombre"
La visite à Damas de quatre députés français il y a deux mois a surpris et choqué. Que sont-ils allés faire dans le palais de Bachar Al-Assad alors que la France a rompu toute relation diplomatique avec la Syrie ? Ils sont politiciens, élus, businessmen et ne craignent pas de côtoyer des dictateurs. "Complément d'enquête", jeudi 7 mai, à 22h25, sur les "apporteurs d'affaires", lobbyistes chevronnés et négociateurs discrets. Ceux que l'on appelle "les diplomates de l'ombre"
Le 23 février, quatre sénateurs et députés ont défié la diplomatie française en se rendant à Damas pour rencontrer le président Bachar Al-Assad. Ces quatre parlementaires appartiennent aux groupes d'amitié France-Syrie à l'Assemblée nationale et au Sénat. C'était la première visite d'élus français à Damas depuis le début de la guerre en Syrie, en 2011. Une visite "à titre privé", selon eux. L'homme qui a orchestré ce voyage s'appelle Jérôme Tousaint. Il partage avec les quatre parlementaires une même conviction : fermer l'ambassade de France à Damas, en 2012, était une erreur. Selon lui, ce voyage se justifiait tant sur le plan humanitaire qu'en raison de la présence de chrétiens d'Orient à Damas. De plus, les attentats début janvier à Paris prouveraient la nécessité de rouvrir le dialogue sécuritaire avec Damas pour combattre les réseaux jihadistes. À quoi aura servi ce voyage ? "On a écouté, c'était des petits pas", explique Jérôme Tousaint.
Sur décision de Nicolas Sarkozy, en 2012, l'ambassade française en Syrie a été fermée. Depuis, la ligne officielle n'a pas changé. Malgré la montée en puissance du groupe terroriste Daech en Irak et en Syrie, François Hollande exclut toujours de renouer le dialogue avec Bachar Al-Assad. Mais quatre ans après le début du conflit, des voix divergentes commencent à se faire entendre. Par cette visite à Damas, ces parlementaires ont défié la ligne de Paris. François Hollande a lui-même condamné leur déplacement : "Cette initiative, je la condamne. Il s'agit d'une rencontre entre des parlementaires français qui n'ont été mandatés que par eux-mêmes et une dictature qui a bombardé son propre peuple."
Diplomatie de l'ombre
Peut-on appeler ces manœuvres de la "realpolitik" ? Au sommet de l'État, certains hauts fonctionnaires entretiennent des contacts avec les régimes les plus autoritaires. Comme Claude Guéant. L'ancien ministre de l'Intérieur de Nicolas Sarkozy est aujourd'hui empêtré dans un scandale politico-financier franco-libyen.
Quels intérêts ces hommes défendent-ils ? Sont-ils utiles ? Pourquoi prennent-ils autant de risques ? De Damas à Tripoli, Complément d'enquête sur ces "négociateurs" très discrets.
Au sommaire :
Mon ami le dictateur
Pour Jérôme Tousaint, défenseur des chrétiens d'Orient, l'ennemi d'hier peut devenir l'allié de demain dans la guerre contre le groupe État islamique. Voyages de députés et circuits touristiques dans un pays en guerre, Jérôme Tousaint se démène pour faire évoluer l'image du dictateur syrien.
Un reportage de Romain Boutilly et Florian Le Moal.
Guéant : de la lumière à l'ombre
Il a servi l'État au plus haut niveau avant de se retrouver mêlé à un scandale politico-financier. Du sauvetage réussi des infirmières bulgares aux affaires de financement illicite de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant a-t-il joué avec le feu ?
Un reportage de Romain Verley et Tristan Waleckx.
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