Nupes : LFI, PS, EELV... Quelle est la position de chacun des partis sur la crise de l'alliance de gauche ?

Article rédigé par Thibaud Le Meneec
France Télévisions
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Temps de lecture : 6 min
De gauche à droite sur la photo, Manuel Bompard (LFI), Elsa Faucillon (PCF), Sophie Taillé-Polian (Génération.s) et Olivier Faure (PS), à Brétigny-sur-Orge (Essonne), le 9 septembre 2022. (- / AFP)
Souvent fragilisée, la coalition née en 2022 est percutée de plein fouet par les conséquences de la guerre entre Israël et le Hamas.

La décision était attendue, elle a été validée en pleine nuit : le Parti socialiste (PS) a voté, dans la nuit du mardi 17 au mercredi 18 octobre, en faveur d'un "moratoire" sur sa participation à la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (Nupes). Un an et demi après sa création, la coalition lancée après l'échec de la gauche à l'élection présidentielle de 2022 se retrouve dans une ornière, alors que plusieurs des partis qui la composent ne souhaitent pas la poursuivre en l'état. 

Après de nombreuses divergences stratégiques, sur la réforme des retraites ou les élections européennes, le conflit israélo-palestinien a fini par profondément diviser les partenaires de gauche à l'Assemblée nationale. De quoi les pousser à faire cavaliers seuls, désormais ? Franceinfo fait le point sur ce qu'il reste de cette coalition politique, selon les positions de chacun des partis qui la composent.

Chez les communistes, pas de position unique entre le camp de Fabien Roussel et les pro-Nupes

Fabien Roussel, patron du Parti communiste français (PCF), a annoncé dimanche à franceinfo qu'il ne siégeait plus au sein de l'intergroupe Nupes, une instance qui réunit de manière hebdomadaire les dirigeants des quatre groupes parlementaires. Sa position, hostile dès la naissance de l'alliance, est-elle largement partagée au sein du parti ? Oui, si l'on se réfère à sa large réélection à la tête des communistes au dernier congrès. Dimanche, le PCF a adopté une résolution selon laquelle il considère que la Nupes est "une impasse". "Il est temps d'ouvrir une nouvelle étape pour la gauche avec un nouveau type d'union, permettant le débat entre nous comme avec les citoyens et les organisations syndicales", appelle le texte.

En revanche, la situation à l'Assemblée nationale est différente, car les députés communistes sont plus favorables à la Nupes et ne souhaitent pas y mettre un terme. "Il y a un parti, et il y a un groupe", a ainsi nuancé le député Sébastien Jumel, mardi midi, en conférence de presse. "Nous considérons qu'il faut maintenir le lien nécessaire pour travailler les chemins de combats communs, peut-être avec des méthodes de travail, de respect mutuel, réactualisées", a précisé le député de Seine-Maritime.

Le Parti socialiste acte un "moratoire" et propose deux "chantiers"

C'est la dernière prise de distance en date. En Conseil national, le PS a décidé mercredi d'un "moratoire sur sa participation aux travaux de la Nupes". Concrètement, les députés socialistes ne vont plus participer à l'intergroupe de gauche au Palais-Bourbon. Déjà, mardi, ils ne se sont pas rendus à la réunion hebdomadaire de cette instance.

Par ailleurs, les socialistes pointent la responsabilité de Jean-Luc Mélenchon dans la crise actuelle, bien que le chef de file des insoumis ne soit plus député depuis juin 2022. "Jean-Luc Mélenchon, qui pourtant il y a un an et demi a incarné nos espoirs collectifs, ne peut plus prétendre être celui qui incarne l'ensemble de la gauche et de l'écologie", a aussi assuré le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, mardi matin sur France Inter, rejoint par ses collègues députés en conférence de presse. 

"Il y a la direction et Jean-Luc Mélenchon, qui est le principal problème de la Nupes. Et des députés La France insoumise (LFI) qui ne sont clairement pas à l'aise", distingue pourtant un parlementaire PS, alors que les divisions sont actuellement exacerbées au sein de LFI

Dans son communiqué, le PS souhaite "la construction d'un nouveau cadre commun" à gauche. "Nous proposons deux chantiers : s'attaquer aux désaccords de fond que les négociations de 2022 n'ont pas résolus ou qui se sont fait jour depuis lors et revoir le fonctionnement pratique de l'intergroupe", résume Boris Vallaud, patron des députés socialistes, dans L'Express. Dans le même temps, les opposants à la Nupes, comme Bernard Cazeneuve ou Nicolas Mayer-Rossignol, poussent la direction à prendre définitivement le large avec la Nupes

Les écologistes appellent à une "assemblée" de la Nupes au plus vite

Eux sont encore dans la Nupes de manière active. Contrairement aux socialistes, les députés du groupe écologiste n'ont pas suspendu leur participation aux travaux de l'intergroupe. Mardi, ses dirigeants ont proposé aux trois autres groupes de réunir une "assemblée des 151 députés" de l'alliance de gauche "le plus rapidement possible" pour tenter de dépasser les différends actuels.

"A ce stade, on constate que le fonctionnement depuis un an nous amène dans une situation difficile et sérieuse", a pointé mardi Cyrielle Chatelain, présidente du groupe, reconnaissant une situation de "crise" au sein de la Nupes. 

Les écologistes restent prudents quant à la suite : Cyrielle Chatelain a assuré mardi qu’elle ne participerait plus à l'intergroupe avec seulement trois groupes, comme c'est le cas depuis mercredi, avec la suspension actée par le PS. Mais ils ne renoncent pas à "l'union de la gauche et des écologistes" pour autant : "Nous sommes majoritaires à avoir envie que ça se passe bien, que ça s'appelle Nupes ou pas", affirmait samedi Marine Tondelier, patronne du parti Les Ecologistes, sur France Culture. "Si à un moment, il faut que ça s'appelle autrement... Peut-être qu'à un moment, il faudra en arriver là."

Pour La France insoumise, des remises en cause très mal perçues

Aux yeux de La France insoumise, force motrice de la Nupes qui représente la moitié des députés de la coalition, les critiques adressées par les partenaires de gauche passent mal. Sur X (ex-Twitter), Jean-Luc Mélenchon a ainsi accusé Olivier Faure de "rompre" l'alliance bâtie rapidement au printemps 2022. Ce sont les élus du PS qui sont le plus visés par LFI, depuis plusieurs jours. A propos du fameux "moratoire" du parti à la rose, Mathilde Panot a dénoncé le "prétexte" des questions internationales pour mettre l'alliance en pause. "Je trouve que c'est indigne dans ce moment de le faire comme ils le font", a tancé la présidente de groupe, mardi midi.

"Ils ont bien profité de la Nupes pour se faire élire quand ils en avaient besoin, maintenant, ils s'émancipent. Ils nous parlent de changement de méthode, mais on a proposé des choses il y a six mois, ils ont dit non en bloc", déplore auprès de France Télévisions un cadre de La France insoumise, "convaincu que la Nupes doit passer à une nouvelle étape". A trois ans et demi des élections présidentielle et législatives, c'est son existence qui est en jeu.

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