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COP26 : limitation timide des énergies fossiles, pas d'aides nouvelles aux pays vulnérables... Ce qu'il faut retenir de la conférence sur la crise climatique

La COP26 s'est achevée, samedi à Glasgow, avec le vote du pacte de Glasgow pour le Climat par les quelque 200 pays présents. Franceinfo fait le bilan d'une conférence marquée par de nombreux engagements thématiques, mais dont le résultat final a déçu les pays les plus exposés.

Article rédigé par Thomas Baïetto
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Un délégué de la COP26 passe devant une sculpture d'ours polaires vêtus de gilets de sauvetage, le 1er novembre 2021, à Glasgow (Ecosse, Royaume-Uni). (OLI SCARFF / AFP)

Ils avaient deux semaines pour accélérer la lutte contre le réchauffement climatique. Avec un jour de retard sur le calendrier prévu, son président, le Britannique Alok Sharma a clos, samedi 13 novembre, la COP26 de Glasgow (Ecosse, Royaume-Uni), qui a rassemblé 196 pays et plus de 120 chefs d'Etat au chevet du climat de notre planète.

Un sommet très attendu, marqué par des avancées inédites mais jugées globalement insuffisantes par les observateurs : en l'état actuel, le monde se dirige toujours vers un réchauffement "catastrophique" de 2,7°C en 2100, selon l'ONU. Le texte des déclarations finales, regroupées sous le nom de pacte de Glasgow pour le climat, a été vivement critiquée par les ONG présentes. "Malheureusement, nous constatons que le texte est toujours loin de refléter l'urgence de la situation. Il y a un énorme décalage entre ce qu'on y lit et ce que nous dit la science", a regretté Aurore Mathieu, du Réseau action climat.

Franceinfo dresse le bilan de cette 26e conférence mondiale contre le réchauffement climatique.

De timides avancées dans le pacte final

La réduction de l'utilisation d'énergies fossiles pour la première fois mentionnée. Moteurs du réchauffement climatiques, les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) n'avaient pourtant jamais eu les honneurs d'une déclaration finale. Comme le rappelle le chercheur Stefan Aykut, elles avaient été retirées de l'accord de Paris sous la pression de l'Arabie saoudite, grand producteur de pétrole. Cette fois-ci, la communauté internationale a tenu bon.

Mais le progrès reste très limité : les pays membres sont invités à "accélérer les efforts vers la diminution progressive de l'énergie au charbon sans système de capture [de CO2] et des subventions inefficaces aux énergies fossiles". Quant aux subventions aux énergies fossiles, les pays sont seulement invités à cesser celles jugées "inefficaces". Par qui ? Selon quels critères ? Ces questions restent en suspens.

Dans la dernière ligne droite, alors que tout le monde était d'accord sur le texte, l'Inde et la Chine ont obtenu que le terme "disparition progressive" soit remplacé par "diminution progressive". La dernière d'une longue liste de modifications : les termes "accélérer les efforts vers" ne figuraient pas dans la précédente version de ces textes, négociés et renégociés depuis vendredi. Le précédent avait déjà atténué la formulation par rapport à la première, qui ne mentionnait pas les "systèmes de capture", technologie encore peu rodée, et ne précisait pas le terme "inefficaces" concernant les financements des énergies fossiles.

 L'urgence sur les 100 milliards. C'était un point crucial de la négociation pour les pays pauvres : les pays développés, historiquement responsables du réchauffement climatique, s'étaient engagés à leur verser 100 milliards de dollars par an pour les aider à faire face. La déclaration finale note "avec grand regret" que cette promesse n'a pas été tenue et les "exhorte" à le faire "urgemment" jusqu'en 2025, date à partir de laquelle cette enveloppe doit être réévaluée à la hausse. Aucune compensation du manque à gagner accumulé par ce retard n'est prévue. 

 Un appel à améliorer les engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre. L'accord de Paris repose sur les contributions déterminées au niveau national (CDN), des engagements chiffrés de réduction de gaz à effet de serre pris par chaque pays. A l'heure actuelle, ils sont insuffisants pour atteindre les objectifs de l'accord. La déclaration finale appelle chaque pays "à réviser et à renforcer" l'objectif 2030 de ces CDN d'ici à la fin 2022, "pour s'aligner" avec l'accord. Mais le texte évoque la nécessité de "prendre en compte les circonstances nationales", ouvrant la porte à ce que certains pays traînent les pieds.

 L'objectif des 1,5°C réaffirmé. La déclaration "réaffirme" les objectifs de l'accord de Paris : "Maintenir l'augmentation de la température globale bien en dessous des 2°C" et "poursuivre les efforts de limiter l'augmentation de la température à 1,5°C". Le texte reconnaît que ce dernier objectif nécessite une "rapide, profonde et soutenue réduction des émissions globales de gaz à effet de serre, notamment en réduisant les émissions de dioxyde de carbone de 45% en 2030 par rapport à 2010 et d'atteindre la neutralité carbone au milieu du siècle".

Un blocage sur les "pertes et dommages" 

 Pas de mécanisme pour les "pertes et dommages". Cette demande forte des pays les plus pauvres et les plus exposés aux effets du réchauffement climatique n'a pas été entendue. L'objectif de ces pays était d'obtenir une compensation financière pour les dommages déjà subis par les tempêtes, sécheresses et canicules provoquées par le changement climatique, un phénomène dans lequel leur responsabilité est très faible. A la place, la déclaration finale propose de lancer un dialogue sur cette question. 

Des accords thématiques en marge des négociations

 Sur la déforestation. Dès le 2 novembre, près de 180 pays, dont la France, se sont engagés à enrayer la déforestation d'ici à 2030. Cet accord prévoit de mobiliser 16,5 milliards d'euros pour la protection et la restauration des forêts. Mais ces engagements, qui font écho à ceux déjà pris, sans succès, en 2014 dans la déclaration de New York sur les forêts, ne sont pas contraignants.

 Sur le méthane. C'est une première historique pour le deuxième gaz responsable du réchauffement climatique après le CO2, longtemps ignoré par la communauté internationale. Cent sept pays, dont ceux de l'Union européenne et les Etats-Unis, se sont engagés à réduire leurs émissions de méthane de 30% d'ici à 2030, par rapport à 2020. Mais cet accord ne couvre que 45% des émissions mondiales de méthane, des pays très émetteurs comme l'Iran et la Russie ne l'ayant pas signé. L'agriculture, la principale source d'origine humaine de méthane, est très peu concernée par le texte.

 Sur le financement des énergies fossiles à l'étranger. Trente-neuf pays, dont la France, qui a longtemps traîné les pieds, ont signé un accord mettant fin aux financements à l'étranger de projets d'exploitation d'énergies fossiles sans techniques de capture du carbone d'ici à la fin 2022. Si cet engagement est tenu, plus de 15 milliards de dollars devraient bénéficier aux énergies propres, estiment des experts.

 Sur la réduction de la production de pétrole et de gaz. BOGA, pour "Beyond Oil and Gas" ("après le pétrole et le gaz"), réunit 10 pays, donc la France et l'Irlande, derrière l'engagement d'accélérer l'abandon progressif de la production de combustibles fossiles en fixant une date d'échéance (qui n'est pas encore déterminée pour l'instant). Une coalition très étroite pour le moment.

 Sur les véhicules zéro émission. Une coalition de pays, villes, régions propriétaires de flottes de véhicules ou plateformes de mobilité partagée ont annoncé vouloir "accélérer la transition vers 100% de voitures et camionnettes zéro émission" de CO2 d'ici à 2040. Mais d'importants acteurs du marché, comme la France, l'Allemagne, Volkswagen ou Stellantis n'ont pas signé cet engagement basé sur le volontariat. Il est en outre moins exigeant que la proposition de la Commission européenne de stopper la vente des voitures thermiques neuves en 2035.

De nouveaux engagements de réduction venus  d'Inde et du Brésil

La COP26 s'est ouverte par un sommet des chefs d'Etat, avec une série de discours. L'occasion pour certains de mettre à jour leurs objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Sous le feu des critiques pour sa politique environnementale, le gouvernement brésilien a créé la surprise en rehaussant ses ambitions de réduction des émissions de CO2 : moins 50% d'ici à 2030 (contre 43% précédemment) et un objectif "de neutralité carbone d'ici à 2050". Quant à l'Inde, troisième plus gros émetteur de gaz à effet de serre de la planète, elle a annoncé son intention d'atteindre la neutralité carbone en 2070.

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