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Logement, transport, alimentation… Voici à quoi va ressembler le projet de loi issu de la Convention citoyenne pour le climat

Le gouvernement a présenté lundi et mardi les grandes lignes du futur texte issu des propositions de la Convention citoyenne pour le climat. D'importantes décisions, par exemple sur le logement ou les transports, n'ont pas encore été arbitrées, alors que beaucoup d'autres sont d'ores et déjà retoquées.

Article rédigé par Thomas Baïetto
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 11min
Le président de la République, Emmanuel Macron, reçoit les membres de la Convention citoyenne pour le climat à l'Elysée, le 29 juin 2020 à Paris (CHRISTIAN HARTMANN / AFP)

Que restera-t-il de la Convention citoyenne pour le climat ? Après un week-end marqué par la passe d'armes entre Emmanuel Macron et l'un de ses garants, le réalisateur Cyril Dion, le gouvernement a présenté, lundi 7 et mardi 8 décembre, les grandes lignes du futur projet de loi climat. Le texte est censé reprendre 40% des 149 propositions élaborées par ces citoyens tirés au sort. Les autres ont été écartées dès le départ, rejetées en cours de route ou intégrées dans d'autres textes, parfois dans des versions édulcorées.

Rénovation des logements, régulation de la publicité, interdiction des véhicules polluants… Ce texte porte sur des points clés des mesures imaginées pour réduire "d'au moins 40% des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 dans un esprit de justice sociale". Il doit être présenté en Conseil des ministres fin janvier.

Parmi les citoyens de la Convention, qui n'ont pas pu préparer ces rendez-vous en amont, faute de disposer de documents ou d'ordres du jour, la déception est palpable. Quelques-uns ont même décidé de boycotter ces rencontres. "Beaucoup de choses sont amoindries, elles sont reprises dans des délais plus longs ou avec une ambition réduite", résume Eric, membre du groupe "consommer". "Le voile sur ce projet de loi est encore très épais, tout ce qui est de l'ordre du détail est inaccessible", constate William Aucant, membre du groupe "se loger". "Il y a des choses intéressantes, mais encore une fois, nous n'avons pas suffisamment de détails pour le valider à 100%", regrette Agny Kpata, du groupe "produire et travailler".

Franceinfo fait le point sur les orientations retenues ou écartées par le gouvernement.

Sur le logement

Un mesure non tranchée : la rénovation obligatoire des bâtiments. C'est l'une des propositions phares de la Convention : "contraindre les propriétaires occupants et bailleurs à rénover leurs biens de manière globale". Les bâtiments sont en effet responsables de 28% de nos émissions de gaz à effet de serre, selon le Haut Conseil pour le climat. Le document de travail ne tranche pas, notant simplement "qu'une partie de ces obligations est déjà prévue par la loi énergie climat""Il y a encore des choses qui coincent sur l'obligation, ils bottent en touche parce qu'ils doivent encore voir entre eux [au sein des ministères]", témoigne William Aucant.

Des mesures reprises : l'interdiction de la location des passoires thermiques et l'arrêt des aménagements de zones commerciales artificialisant les sols. Le gouvernement reprend l'idée d'interdire la location des passoires thermiques, ces logements très mal isolés qui plongent leurs occupants dans la détresse, en 2028. La Convention visait les logements classés F et G dans les diagnostics de performance énergétique. Le gouvernement n'a pour l'instant pas précisé le critère retenu. 

Pour lutter contre l'artificialisation des sols, il s'engage sur un "principe général d'interdiction de création de nouvelles surfaces commerciales artificialisant les sols". Avec un bémol. Là où la Convention proposait une exception dans les zones où la densité commerciale est très inférieure à la moyenne nationale et départementale, le gouvernement prévoit des dérogations pour les projets inférieurs à 10 000 m2. "Cela laisse la porte ouverte à un nombre bien trop grand de dérogations", regrette le député Matthieu Orphelin (Ecologie, démocratie, solidarité) sur son blog, qui estime que ces cas représentent "90% des dossiers".

Document de travail du groupe "se loger" : rénovation des bâtiments by Franceinfo on Scribd

Document de travail du groupe "se loger" : artificialisation des sols by Franceinfo on Scribd

Sur les transports

Une mesure non tranchée : l'interdiction dès 2025 de la commercialisation des véhicules neufs très émetteurs. La Convention proposait d'interdire la vente des véhicules émettant plus de 110 g de CO2 par kilomètre en 2025, puis d'abaisser ce plafond à 95 g en 2030. Le gouvernement repousse l'échéance de 2025 et ne fixe pas encore de seuil. Ce dernier "sera précisé dans les prochains jours, sur la base des propositions de la Convention citoyenne", indique-t-il.

Des mesures rejetées ou allégées : la taxation des billets d'avion et la fermeture des lignes, l'interdiction de construction ou d'extension d'aéroports et la réduction des vols intérieurs. "Au niveau de l'avion, il n'y a pas grand-chose à cause de la crise", note Lionel, membre du groupe "se déplacer". Le gouvernement rejette l'augmentation de la fiscalité sur les billets, renvoyant à une "solution européenne" et retoque la fermeture des lignes intérieures lorsque le trajet est faisable en 4 heures de train (en portant le curseur à 2h30). S'il assure reprendre le principe de l'interdiction de construire de nouveaux aéroports et d'étendre les infrastructures existantes, il prévoit des exceptions "lorsque le besoin est justifié".

Des mesures reprises : la généralisation des tarifs réduits pour le train et la création de parkings relais. Plus consensuelles, ces mesures ont été intégrées au texte du gouvernement. Sur le premier point, il s'agit d'étendre les mesures pratiquées par certaines régions pour les TER, afin de rendre le train moins cher et plus attractif.

Document de travail du groupe "se déplacer" by Franceinfo on Scribd

Sur la consommation

Une mesure non tranchée : l'interdiction de la publicité pour les produits les plus émetteurs de gaz à effet de serre. Mesure phare du groupe "consommer", la régulation de la publicité, sur la base d'un équivalent carbone du Nutriscore utilisé pour l'alimentation, semble menacée. Le gouvernement écarte toute interdiction de la publicité pour les voitures, "car son implication immédiate pourrait notamment porter atteinte au financement des médias" et assure poursuivre "l'évaluation de la faisabilité juridique d'une interdiction de publicité sur la base du CO2 score". La seule interdiction concédée est symbolique : la publicité pour les énergies fossiles, qui n'existe pratiquement pas.

Une mesure amoindrie : la limitation de la publicité dans les espaces publics. Les citoyens souhaitaient limiter la "surexposition publicitaire" en interdisant les panneaux publicitaires dans les espaces publics extérieurs (hors information locale et culturelle). Le gouvernement reprend cette proposition pour la mettre dans les mains du maire. "Cela reste très vague", réagit Eric.

Des mesures reprises : l'interdiction des avions publicitaires et la consigne du verre en 2025. Le gouvernement a revanche repris, sans modification, les propositions d'interdire les avions publicitaires et d'instaurer une consigne pour les emballages en verre en 2025.

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Sur l'alimentation

Des mesures rejetées : la redevance sur les engrais azotés, l'interdiction des labels privés et la réduction des pesticides. Pour limiter l'impact de l'agriculture sur le climat, la Convention voulait mettre en place une redevance sur les engrais azotés, qui servirait à financer des aides pour la transition d'agriculteurs vers l'agroécologie. Le gouvernement renvoie cette éventuelle taxe à 2024, si les objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre ne sont pas respectés et si une telle mesure n'est pas prise au niveau européen entre-temps. "Renvoyer à 2024, c'est enterrer la mesure", regrette Guy, membre du groupe "se nourrir".

Pour lutter contre la prolifération des labels sur les produits alimentaires, la Convention voulait interdire ou, a minima, réguler ces derniers. Le gouvernement refuse, considérant que "certains labels privés jouent un rôle important pour encourager la production et la consommation de biens et services plus écologiques".

Concernant les pesticides, les citoyens proposaient d'inscrire dans la loi la réduction de l'usage des pesticides de 50% en 2025, puis de 75% en 2030. Dans le viseur, une interdiction totale en 2040. Le gouvernement ne reprend pas cette proposition, arguant que c'est déjà l'objectif des différents plans Ecophyto adoptés. Des plans qui échouent pour l'instant à réduire la consommation de ces produits, en nette hausse ces dernières années.

Une mesure reprise mais amoindrie : le choix végétarien dans la restauration collective publique. La Convention souhaitait qu'un tel choix soit proposé dans tous les restaurants collectifs publics en 2022. Le gouvernement propose "une expérimentation sur la base du volontariat" à partir de 2021, afin d'avoir du recul sur l'impact en termes de santé publique, de gaspillage et de faisabilité pour les petites communes.

Des mesures reprises : la compatibilité de la politique agricole avec la stratégie bas carbone et l'ajout du climat dans la stratégie nutritionnelle. La Convention voulait que le Plan stratégique nationale, déclinaison de la Politique agricole commune (PAC), soit compatible avec la Stratégie nationale bas carbone et que le Plan national nutrition santé prenne en compte des critères climatiques. Le gouvernement s'engage à ce que ce soit chose faite.

Document de travail du groupe "se nourrir" by Franceinfo on Scribd

Sur le travail et la production

Des mesures rejetées sur le plastique. La Convention proposait une série de mesures sur ce matériau particulièrement polluant : recyclage obligatoire et suppression du plastique à usage unique en 2023. Le mot "plastique" ne figure tout simplement pas dans le document de travail. Le gouvernement avait déjà annoncé sa position sur le sujet en décidant en 2019 d'interdire l'emballage plastique à usage unique à partir de 2040.

Une mesure reprise mais amoindrie : l'augmentation de la durée de disponibilité des pièces détachées. La Convention proposait de rendre obligatoire la mise à disposition de pièces détachées 15 ans après la mise en vente d'un produit, contre 5 ans aujourd'hui, pour permettre la réparation de tous les produits manufacturés vendus en France. Le gouvernement refuse d'étendre cette durée et propose simplement de "compléter la liste des catégories de produits" soumises à cette obligation.

Des mesures reprises : renforcement des clauses environnementales dans les marchés publics, du rôle des CSE d'entreprises dans la transition écologique et régionalisation des objectifs énergies. Sur ces trois points, le gouvernement reprend les propositions de la Convention citoyenne. "Chaque étape de la vie d'un marché (définition des besoins, critères de choix de l'offre et conditions d'exécution) sera couverte par l'obligation de prise en compte de l'environnement", promet-il pour la première.

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