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Grève du 5 décembre : lettres, annonces, omniprésence dans les médias... Comment le gouvernement tente de désamorcer les colères

Face à une mobilisation massive, jeudi, notamment des cheminots et des professeurs, le gouvernement s'est lancé dans une opération déminage. Explications.

Article rédigé par franceinfo
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Christophe Castaner, le 25 novembre 2019, à Paris.  (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

Plus de huit conducteurs de trains sur dix en grève, un professeur des écoles sur deux qui n'a pas fait classe... Le gouvernement fait face, jeudi 5 décembre, à une mobilisation inédite contre son projet de réforme des retraites. Alors qu'une grande partie du pays est à l'arrêt, de nombreux cortèges de manifestants se sont élancés partout en France.

>> Perturbations, manifestations, réactions, trafic... Suivez en direct la grève du 5 décembre et les dernières informations

Sous tension, le gouvernement multiplie les opérations pour tenter de désamorcer la crise sociale. Franceinfo revient sur la stratégie du gouvernement, entre annonces, omniprésence médiatique et lettres adressées aux grévistes.

Face aux professeurs, Jean-Michel Blanquer promet que les "pensions ne baisseront pas" 

Mardi, Jean-Michel Blanquer a écrit une lettre aux enseignants pour tenter de calmer leur colère"Les pensions ne baisseront pas" et "pour y arriver, les rémunérations augmenteront sur l'ensemble de la carrière", a assuré le ministre de l'Education. Dans ce courrier, il promet notamment à l'ensemble des personnels enseignants "une revalorisation salariale permettant de garantir un même niveau de retraite pour les enseignants que pour des corps équivalents de la fonction publique". Jeudi 5 décembre, au matin, Jean-Michel Blanquer est venu défendre ses engagements sur France 2. 

Mais la missive, destinée à apaiser la contestation, a eu l'effet inverse pour beaucoup de professeurs. "Dans la salle des profs ce matin, certains pensaient que cette lettre était une provocation", a expliqué à franceinfo Joël Mariteau, enseignant dans un lycée de Saint-Brieuc (Côtes-d'Armor) et militant au syndicat Snes. D'autres enseignants disent que cela confirme bien leurs craintes sur la réforme des retraites. Cette lettre nous le signale clairement."

Un passage est particulièrement mal passé auprès du corps enseignant : celui où le ministre assure qu'il mettra en place "un minimum de pension à 1 000 euros par mois pour ceux qui ont une carrière complète". "Mille euros, c'est une blague, peste auprès de franceinfo Steve Larranaga, enseignant dans un lycée d'Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis). On demande aux enseignants d'avoir un bac +5 (...) Après avoir travaillé quarante-trois ans, 1 000 euros de retraite... Le minimum vieillesse est à 860 euros."

Face aux policiers, Christophe Castaner s'engage dans une lettre

Mercredi, à la veille de la grève, Christophe Castaner a, à son tour, adressé un courrier à plusieurs syndicats de policiers. Dans cette lettre, il les assure qu'ils conserveront "leurs droits à un départ anticipé" et "des niveaux de retraites comparables aux pensions actuelles" dans la future réforme des retraites.

"Les droits à un départ anticipé resteront ouverts comme aujourd'hui", s'engage le ministre de l'Intérieur, promettant également aux policiers que la réforme "permettra de maintenir des niveaux de retraite comparables aux pensions actuelles". "Ces garanties seront inscrites dans le futur projet de loi portant création du système universel" de retraite, ajoute-t-il.

>> "Des spécificités seront conservées" : lisez la lettre de Christophe Castaner adressée aux policiers

S'il reconnaît "des avancées", le "compte n'y est pas", pour Denis Jacob, secrétaire général du syndicat Alternative Police-CFDT. "Il manque toujours la question du statut de travailleur de nuit, et celle sur la prise en compte des six derniers mois de rémunération pour calculer la pension, ajoute-t-il. Ainsi que la question de quels postes compteront pour la durée minimale pour avoir les droits annoncés". 

Fermeture symbolique des commissariats, refus de rédiger des PV... Plusieurs syndicats de police, dont Alliance et Unsa, ont lancé un appel pour des "actions reconductibles" à partir de jeudi. Ils n'ont cependant pas appelé à se joindre aux cortèges de manifestants. 

Face aux salariés de la SNCF, Jean-Baptiste Djebbari va sur le terrain

Plus que tous les autres secteurs, les salariés de la SNCF et de la RATP à Paris mettent la pression sur le gouvernement en provoquant des perturbations inédites. D'après Le Parisien, la consigne a été donnée aux ministres de se rendre sur le terrain pour cette journée de grève. C'est ce que fait Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'Etat aux Transports plutôt discret jusque-là, en médiatisant ses déplacements auprès des salariés et des usagers. 

Surtout, le secrétaire d'Etat a multiplié les passages à la télévision et à la radio. Mercredi, BFMTV a diffusé un long reportage sur ce ministre "en première ligne". Jeudi matin, il était l'invité de RTL pour défendre le projet de réforme des retraites, avant de se rendre, le soir, sur le plateau de l'émission "Balance ton Post" de Cyril Hanouna, sur C8.

Face aux soignants, Agnès Buzyn confirme un dégel de 415 millions d'euros pour l'hôpital

Mercredi, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a annoncé le dégel de 415 millions d'euros avec effet "immédiat". Cette somme, mise en réserve dans le budget de l'Assurance-maladie cette année, doit être versée à l'hôpital conformément aux annonces du "plan hôpital" présenté en novembre.

Cette mesure avait déjà été annoncée par le gouvernement le 20 novembre dans le cadre de son "plan d'urgence" destiné à "redonner de l'oxygène" aux soignants après huit mois de crise dans les hôpitaux publics. Elle a été rendue possible par le fait que "l'engagement et les efforts de chacun ont permis le respect de l'objectif national des dépenses d'assurance-maladie", a souligné Agnès Buzyn, qui l'a donc une nouvelle fois martelé.

Depuis 2013, des crédits destinés au financement des hôpitaux sont gelés chaque année par le gouvernement, qui peut décider de les annuler ou au contraire de les restituer si les objectifs budgétaires sont respectés. L'an dernier, le gouvernement avait également annoncé en décembre la restitution de l'ensemble des fonds gelés. Pour 415 millions, déjà. En 2017, en revanche, les fonds bloqués avaient été restitués en deux fois, et pas en intégralité : sur 432 millions d'euros de crédits hospitaliers gelés, le gouvernement en avait reversé 166 millions en fin d'année, puis 250 millions début mars 2018.

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