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Grève contre la réforme des retraites : pourquoi les enseignants se mobilisent massivement contre la réforme des retraites

La mobilisation des profs contre la réforme des retraites s'est traduite, jeudi 5 décembre, par un taux de grévistes de 51,15% dans le primaire et de 42,32% dans le secondaire (collèges et lycées) selon ministère et environ 70% d'après les syndicats.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Une classe de CM1 vide, le 4 décembre 2019 à Sausheim (Haut-Rhin). (MAXPPP)

Le secteur des transports publics ne va pas être le seul à être profondément perturbé par la mobilisation contre la réforme des retraites, qui a débuté jeudi 5 décembre. La plupart des syndicats ont en effet appelé les quelque 900 000 enseignants à la grève

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Pourquoi la réforme inquiète-t-elle instituteurs et professeurs ? Quelle sera l'ampleur de la mobilisation ? Que répond le gouvernement ? Franceinfo fait le tour de la question.

Pourquoi les enseignants protestent-ils ?

De l'aveu même du haut-commissaire aux Retraites Jean-Paul Delevoye, les enseignants font partie des perdants de la réforme des retraites, si celle-ci ne s'accompagne pas de revalorisations salariales. En effet, la future réforme prendra en compte l'ensemble de la carrière dans le calcul des pensions, contre les six derniers mois actuellement. En compensation, les primes et indemnités seraient intégrées au calcul. Sauf que "le niveau moyen des primes de la fonction publique, c'est 22%, le niveau moyen des primes des enseignants, c'est 9%. Celui de l'école maternelle, c'est 4%", a rappelé le haut-commissaire aux Retraites. "Les enseignants sont pénalisés si nous appliquons sans correction le système", a-t-il convenu.

Reçus à plusieurs reprises au ministère avec Jean-Paul Delevoye, les syndicats enseignants ont réclamé au gouvernement "un engagement solide" sur la revalorisation des salaires. A l'issue de la dernière réunion, aucune annonce de mesures "sonnantes et trébuchantes" n'a été faite, a déploré le SE-Unsa, syndicat considéré comme réformiste.

Un enseignant à la retraite touche actuellement 2 600 euros brut en moyenne (2 500 euros dans le premier degré, 2 850 euros dans le second degré). Le Snes-FSU a fait ses calculs"Pour un collègue qui démarrerait en 2025 [date prévue de l'entrée en vigueur de la réforme], la baisse de pension équivaudrait à 900 euros par mois", par rapport aux montants actuels, selon Régis Metzger, co-secrétaire général du Snuipp, premier syndicat du primaire. Pour des professeurs des écoles aujourd'hui en fonction, les pertes seraient comprises entre 300 et 600 euros, selon ses simulations.

Quelle est l'ampleur de la mobilisation ?

Le taux de grévistes annoncé par le ministère de l'Education s'est élevé à 51,15% dans le primaire et 42,32% dans le secondaire (collèges et lycées) jeudi 5 décembre. Des chiffres officiels bien inférieurs à ceux communiqués par les syndicats. "70% des enseignants du primaire sont en grève", a affirmé à l'AFP Francette Popineau, secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire. Il y a "75% de grévistes dans les collèges et les lycées, c'est historique", a aussi déclaré à l'AFP Sophie Vénétitay, du Snes-FSU (premier syndicat du secondaire).

Au SE-Unsa, on avance des chiffres assez similaires : "70% de grévistes dans le premier degré, 66% dans le second degré", selon Stéphane Crochet, secrétaire général du syndicat. "C'est du jamais vu", selon lui, "depuis le printemps 2003" où un projet de décentralisation dans l'éducation nationale et de réforme des retraites avait fortement mobilisé les enseignants.

"On ne peut pas nier que c'est une assez forte mobilisation", a reconnu, jeudi matin, le ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, tout en citant le "précédent de 2003". "En 2003, au plus fort de la mobilisation on a eu 70% de grévistes dans les collèges, 60% dans les lycées", rappelle Mme Vénétitay. "Mais c'était après plusieurs journées de grève. Donc nous sommes quasiment au niveau de 2003, mais dès le début", dit-elle.

Que répond le gouvernement ?

A la veille de cette mobilisation qui s'annonce "historique", selon plusieurs syndicats, le ministre de l'Education nationale a tenté de calmer le jeu. "La garantie que je donne aujourd'hui, c'est que les pensions ne baisseront pas", a déclaré à la presse Jean-Michel Blanquer lors d'un déplacement au rectorat de Paris, promettant, pour y parvenir, des hausses de rémunérations. Mardi, il avait déjà adressé une lettre à tous les professeurs de France, dans laquelle il s'engageait à garantir leur "niveau des pensions".

Sabine, professeure de mathématiques dans un lycée parisien, est dubitative. "Je me méfie et je crains que ce ne soit conditionné à de nouvelles contraintes, comme un allongement du temps de travail", a-t-elle déclaré à l'AFP. Comme plusieurs collègues, elle veut aussi défendre un métier "attaqué depuis plusieurs mois", selon elle, par différentes réformes.

Le climat est détestable, la cocotte-minute est sur le point d'exploser. On va exiger toujours plus des enseignants, qui sont déjà à bout.

Christophe, professeur de CP à Montreuil (Seine-Saint-Denis)

à l'AFP

Comme de nombreux enseignants, Haydée Leblanc, professeure des écoles à Abbeville (Somme) prévoit de poursuivre la grève après jeudi. "Je préfère perdre 800 euros en une année de grève, plutôt que 800 euros tous les mois quand je serai à la retraite", a-t-elle lancé à franceinfo.

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