Covid-19 : quatre choses à savoir sur le rapport accablant de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la gestion de l'épidémie par le gouvernement
Menée par des députés Les Républicains, la commission critique sévèrement l'exécutif dans un rapport, adopté mercredi. La majorité condamne un "rapport partial et partiel".
Le gouvernement a-t-il été à la hauteur face à la pandémie de Covid-19 ? Une commission d'enquête de l'Assemblée nationale qui devait en partie répondre à cette question brûlante a adopté un rapport accablant pour l'exécutif, mercredi 2 décembre. La commission, menée par des députés Les Républicains, pointe une "sous-estimation du risque" ou encore un "pilotage défaillant de la crise". La majorité, elle, évoque un "rapport partial et partiel".
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Ce document n'a pas encore été rendu public. Franceinfo, qui a pu le consulter, revient sur les conditions dans lesquelles il a été produit, les principaux éléments qu'il contient et les premières réactions qu'il suscite.
1Six mois de travail, 53 auditions
Pour produire ce rapport, les députés ont enquêté pendant six mois. Ils ont mené 53 auditions, pendant environ 130 heures. Ils ont entendu, entre autres, l'ex-Premier ministre Edouard Philippe, alors à Matignon au début de la crise sanitaire, l'ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn, qui a quitté le gouvernement en février pour tenter de devenir maire de Paris, ou encore le directeur général de la santé Jérôme Salomon. "Le monde entier a été surpris par cette crise inédite, massive, brutale, mondiale", avait notamment fait valoir ce dernier, le 16 juin, affirmant que la France avait "toujours suivi les recommandations internationales" sur le port du masque.
La commission avait également entendu, le 24 juin, pendant près de trois heures, le professeur Didier Raoult, qui est à la tête de l'IHU, à Marseille. Il avait alors étrillé la gestion de la crise par les autorités et les conflits d'intérêts dans la recherche.
Des membres du conseil scientifique ont également été auditionnés, le 18 juin, comme Jean-François Delfraissy, le président de l'instance, ou encore l'épidémiologiste Arnaud Fontanet.
2Les Républicains dénoncent une gestion "chaotique" et des "failles structurelles"
La commission d'enquête a adopté le rapport mercredi matin, sans les voix des députés LREM qui se sont abstenus. Tous les autres membres se sont prononcés pour. Le rapport doit être officiellement rendu public le 7 décembre, le temps de recueillir les observations des groupes politiques. Mais les députés LR, qui ont piloté la commission, ont tenu une conférence de presse, mercredi, à l'Assemblée nationale, pour dévoiler de premiers éléments et le ton général du document.
La gestion de la crise a été "chaotique" et a révélé des "failles structurelles", a déclaré Eric Ciotti, rapporteur (Les Républicains) de la commission d'enquête. La France était "mal armée" face à la pandémie, a affirmé Damien Abad, président des députés Les Républicains.
Eric Ciotti a rappelé durant la crise le "manque d'interministériel, de déconcentration et de décentralisation", les "messages contradictoires sur les masques, des défaillances sur la politique des tests" et encore les "grands oubliés" qu'ont été les maisons de retraite et les malades hors Covid. "Plus jamais ça !", a-t-il lancé.
Pour les masques et les équipements, "nous constatons un manque d'anticipation et une sous-estimation du risque épidémique, une baisse des stocks stratégiques", avec des "problèmes de fournisseurs" pas assez diversifiés, a énuméré Damien Abad, égratignant au passage les précédentes mandatures.
La France est au "quatrième rang des pays les plus touchés en Europe", a souligné Eric Ciotti. "Des pays ont mieux fait face que d'autres", a-t-il martelé : la moyenne dans l'Union européenne a été de 532 décès pour un million d'habitants, et la moyenne en France a atteint 727 décès.
Eric Ciotti prône notamment de "retrouver une forme de souveraineté sanitaire" et de créer un "ministère de l'Anticipation des crises". Selon lui, la gestion même de la crise doit relever du ministère de l'Intérieur. Or "le ministère de la Santé l'a préemptée".
3La majorité n'a pas voté le rapport
"Nous ne pouvions voter pour un rapport partial et partiel, et nous regrettons évidemment qu'il ne reflète absolument pas la qualité des auditions et des débats que nous avons menés", a expliqué le député LREM Julien Borowczyk, président de la commission, dans une déclaration transmise à l'AFP. Le rapport a été voté par tous les députés de la commission, sauf ceux du MoDem et de LREM (qui se sont abstenus).
Interrogé à l'issue du Conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a affirmé ne pas en avoir encore pris connaissance. Mais "nous avons montré que nous étions à la fois dans la gestion et dans l'adaptation de la politique qui est menée face à un virus qui bouscule l'organisation des pays du monde entier", a-t-il déclaré.
4Le travail de la commission d'enquête se poursuit sous un autre format
La commission d'enquête de l'Assemblée nationale continue de travailler. Mais elle va poursuivre ses travaux au format de simple mission d'information, forme sous laquelle elle avait initié ses travaux dès le mois d'avril.
De plus, la commission d'enquête du Palais-Bourbon n'est pas la seule en place. Le Sénat, à majorité de droite, a aussi sa propre commission d'enquête sur la crise et doit examiner son rapport le 8 décembre.
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