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Coronavirus : garde d'enfants, aide aux seniors, cours à distance... Quelles formes vont prendre les "nouvelles solidarités" espérées par Emmanuel Macron ?

Pour faire face à la situation exceptionnelle engendrée par l'épidémie, le président de la République a lancé un appel à la solidarité. Certains y ont déjà répondu, mais cela ne se fait pas sans contraintes.

Article rédigé par franceinfo
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Les élèves d'une classe sont assis devant un ordinateur portable lors d'une visite de presse dans une école primaire en Allemagne, le 4 mars 2020. (SEBASTIAN KAHNERT / DPA-ZENTRALBILD / AFP)

"Jamais de telles épreuves ne se surmontent en solitaire. C'est, au contraire, en solidaire, en disant 'nous' plutôt qu'en pensant 'je', que nous relèverons cet immense défi." Lors de son allocution jeudi 12 mars, Emmanuel Macron a appelé les Français à faire bloc face à l'épidémie de coronavirus Covid-19 et a appelé à "inventer (...) de nouvelles solidarités". Certains y ont déjà répondu, mais cela ne se fait pas sans contraintes.

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La garde d'enfants

C'est sans doute l'annonce la plus spectaculaire de l'allocution présidentielle. Face à "la plus grave crise sanitaire qu'a connue la France depuis un siècle", Emmanuel Macron a ordonné, jeudi 12 mars, la fermeture, à partir de lundi et "jusqu'à nouvel ordre", des crèches, établissements scolaires et universités. Dès lundi, environ 12 millions d'élèves seront concernés par la fermeture de quelque 62 000 établissements scolaires. Pour les parents va débuter le casse-tête de la garde.

Mais déjà sur Twitter, certains ont proposé leurs services à ces parents démunis.

"Cela me semble tout à fait naturel de proposer mon aide, assure Emma, lycéenne de 18 ans, il y a de moins en moins d'entraide et tant mieux si cette situation de crise peut faire ressurgir certaines valeurs qui ont un peu disparu." En pleine préparation d'un Bac ES, cette titulaire du Bafa espère faire profiter de sa "petite expérience" à des parents dans le besoin. Elle assure même qu'elle pourrait dépanner gratuitement ses proches, "sinon ça sera payant, notamment lorsqu'il y a des déplacements", sourit celle qui vit à Beauvais (Oise).

Adrien et Lucie, eux, vivent à Jaunay-Marigny (Vienne) près du Futuroscope et sont animateurs périscolaires dans deux écoles primaires de leur commune. "Cela ne doit pas être facile pour les parents depuis hier soir, souffle Adrien, notamment ceux qui travaillent dans le domaine médical." Travaillant au quotidien avec des enfants depuis six ans, lui aussi veut se rendre utile. "On préfererait ne pas avoir à le faire, mais on apporte une forme de soutien et de soulagement à des parents qui doivent être démunis", ajoute-t-il. S'il n'est pas mobilisé pour les permanences du service périscolaire promis par Emmanuel Macron, il est prêt à se rendre chez les gens pour garder leurs enfants.

Je m'attends à avoir plus de travail que d'habitude, car là ce sera pour la journée et non pour quelques heures.

Adrien, animateur périscolaire dans la Vienne

à franceinfo

Lucie, sa compagne, est vacataire et, pour elle aussi, faire un geste est naturel, d'autant plus que "si (elle) ne fait pas d'heures, (elle) n'est pas payée". "Autant aider que rester à ne rien faire", note-t-elle. Elle aussi se prépare à être sollicitée et a déjà une idée de ce qu'elle fera faire aux enfants : "jeux de société, activités manuelles ou sport si le temps et le lieu le permettent". Mais leur aide "ne sera pas gratuite malheureusement". Elle assure être capable de s'occuper d'un groupe comptant jusqu'à 10 enfants de 6 à 10 ans sur une journée. "J'ai les qualifications pour le faire, mais ce n'est pas un jeu et ce n'est pas quelque chose qu'on fait à la légère", prévient-elle.

Les cours à domicile

Conséquence directe de la fermeture des écoles, l'augmentation des demandes des cours à domicile ou à distance. "Notre but est évidemment qu'aucun élève ne reste sur le bord du chemin dans une période exceptionnelle comme celle-ci", a assuré Jean-Michel Blanquer jeudi soir. "La période qui s'ouvre ne doit pas être une période durant laquelle les élèves ne peuvent pas travailler", a ajouté Jean-Michel Blanquer, précisant que les élèves qui ne disposent pas d'un équipement informatique adapté (environ 5% selon le ministre) pourront être aidés, sans plus de précisions.

Début mars, le ministère de l'Education nationale avait présenté le dispositif prévu pour assurer la continuité pédagogique en cas de fermeture des établissements scolaires. Une plateforme gratuite du Cned, baptisée "Ma classe à la maison", offre la possibilité aux enseignants de proposer des activités aux élèves dans différentes matières et de tenir des classes virtuelles, de la grande section de maternelle à la terminale. Un "mail personnalisé" devrait être envoyé aux parents d'élèves dans les prochains jours, précisant les modalités de connexions à la plateforme d'enseignement à distance. "Il y aura aussi des tutoriels", a assuré le ministre.

Mais cette offre nécessite une bonne connexion internet, ce qui peut se révéler problématique. "Il faut prendre en compte cet aspect", insiste pour franceinfo Sonia Le Gouriellec, maître de conférence en sciences politiques à l'université catholique de Lille. Les gros fichiers sont à éviter, au profit de PDF plus légers, afin que tout le monde puisse télécharger. 

Elle, comme ses collègues, "savait que cette fermeture allait arriver, mais pas si tôt". Le timing pour se préparer est très court et elle s'attend à un week-end chargé. Si les outils existent pour le travail en ligne, l'enseignante prévient : "Il ne faudra pas faire de cours face caméra pendant des heures. En amphithéâtre, c'est déjà compliqué d'avoir l'attention de tout le monde, mais ça sera encore pire pour les lycéens, collégiens ou primaires de rester devant un écran." Elle conseille plutôt des capsules de 10 minutes ou des quiz, des textes à lire.

En revanche, elle ne recommande pas les cours à domicile, qui pourraient entraîner "une rupture d'équité entre les élèves". "On pourrait les rassembler dans les cafés, mais ça serait recréer des foyers potentiels, donc ce n'est pas forcément une excellente idée", glisse-t-elle. Elle met enfin en garde les élèves qui se réjouissent un peu rapidement de cette fermeture des écoles. "Je crains la redescente, car ils sous-estiment la masse de travail. Il y a quand même des examens au bout, ce n'est pas parce que les écoles ferment que ce sera plus facile", conclut-elle.

L'aide aux personnes âgées

Le président de la République a également appelé les personnes de plus de 70 ans "à rester chez elles et à limiter au maximum leurs déplacements". Dans certaines communes, comme à Aytré (Charente-Maritime), des initiatives pour faciliter l'entraide voient le jour, rapporte France 3 Nouvelle-Aquitaine. "Parmi nos locataires, 160 d'entre eux ont 80 ans et plus. Le coronavirus est l'occasion pour nous de mettre en œuvre ce programme et de promouvoir les réseaux de solidarité", explique Domitille Monvel, chargée de communication Habitat 17 Charente-Maritime, à l'origine de cette idée. Les précautions sont de mise : pas de serrage de mains, ni de bise, mais "on essaie de garder ce contact, cette proximité entre nous", assure Marc, un voisin.

Les personnes âgées, elles, sont partagées. "Par peur d'une contamination, elles ne souhaitaient pas la visite de personnes extérieures. D'autres, au contraire, ont insisté pour que nous venions. Les personnes âgées ont conscience du risque, mais sont confiantes dans les intervenantes habituelles", déclare au Parisien Matthieu Domas, directeur général du réseau APA, qui regroupe plusieurs associations spécialisées. Le dirigeant soulève également la pénurie de gel hydroalcoolique et de masques, accessoires indispensables aux auxiliaires de vie. "Le secteur de l'aide à domicile a été oublié", regrette-t-il.

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