: Témoignages "On se prépare à un Noël atypique" : comment le Covid-19 va chambouler les fêtes de fin d'année
S'il est possible de célébrer Noël en famille, l'exécutif appelle au respect des règles sanitaires. Dans ce contexte inédit, plusieurs Français nous racontent comment ils envisagent les fêtes.
"Nous pourrons nous déplacer et passer Noël en famille". Emmanuel Macron a voulu rassurer les Français, mardi 24 novembre, lors de son allocution sur l'allégement des mesures de confinement. Mais "il ne s'agira pas, à coup sûr, de vacances de Noël comme les autres", a temporisé le chef de l'Etat.
Alors que le pays fait face à une seconde vague de l'épidémie de Covid-19, le Premier ministre a de son côté appelé, jeudi, lors d'une conférence de presse, à "limiter le nombre de personnes à table" et à "éviter les rassemblements trop nombreux". Le gouvernement prévoit même d'adresser "des recommandations concrètes" avant les vacances, car "ces moments de rassemblement festif (...) sont particulièrement risqués", a estimé Jean Castex.
En famille, en comité restreint ou même seul... Pour savoir comment vous comptez vous organiser pour les fêtes de fin d'année, dans ce contexte inédit, nous avons lancé un appel à témoignages. Vous avez été 200 à nous répondre, et nous avons retenu sept de vos témoignages. Si certains ont fait une croix sur un Noël en famille, par crainte du virus, d'autres tentent de s'adapter, en réduisant le nombre de convives ou en établissant des règles sanitaires plus ou moins strictes. Voici ce que vous nous avez confié.
Emeline, 31 ans, mangera la bûche à la même table que sa grand-mère centenaire
"Ma grand-mère, qui vient d’avoir 100 ans, vit dans la Creuse. J'habite à Roubaix, alors je suis contente qu'on ait le droit de se déplacer pour les fêtes, pour la rejoindre. On va certainement faire un repas de Noël en famille. Et la bûche, ma grand-mère ne la mangera pas seule dans la cuisine, elle la mangera avec nous (rires). Je réfléchis à me faire tester juste avant, parce que je ne voudrais pas la contaminer. On fera attention, et on ne logera pas chez elle.
"Je vais arrêter de laisser le Covid me voler des moments de vie."
Emelineà franceinfo
La situation sanitaire nous a fait rater plein d'événements. J'ai un neveu qui est né l'année dernière, je l'ai à peine vu. Il y a eu des mariages annulés, des baptêmes où on n’a pas pu aller. A 100 ans, ma grand-mère peut décéder du jour au lendemain. Alors je me dis que c'est peut-être le dernier Noël que mes filles feront avec elle."
Alex, 21 ans, mise sur le dépistage PCR de sa dizaine d'invités
"Pour Noël, mon conjoint et moi allons inviter de la famille à la maison. On sera 14, alors on va essayer de limiter les risques au maximum. Comme nous, nos invités sont, pour la plupart, déjà isolés car ils sont en télétravail. Et nous ferons tous un test PCR, 48 heures avant Noël, à l'exception de mes grands-parents qui ne sortent pas du tout de chez eux. On avait peur de se contaminer les uns les autres, alors tout le monde est tombé d'accord sur ces conditions. Soit on ne fêtait pas Noël, soit on se préparait à un Noël atypique avec un protocole.
Il y aura aussi un plan de table adapté. Mes grands-parents seront en bout de table, et toutes les personnes qui sont à l'isolement pourront être à côté d'eux. En revanche, mes parents, qui ne sont pas en télétravail, seront à l’autre bout de la table. On portera tous le masque, sauf pour manger. Quand on se lèvera de table, pour aller chercher un plat dans la cuisine, il faudra remettre le masque, pour toujours limiter au maximum les risques."
Yolande, 58 ans, fêtera Noël "comme d'habitude"
"Nous serons une quinzaine de personnes pour Noël, de la famille et des amis, de tous les âges. Il y aura ma mère de 89 ans. Elle a très mal vécu le confinement, alors depuis, je me dis qu'on a vraiment besoin de rapports humains et amicaux. Nous allons donc faire un Noël comme d’habitude. Si certaines personnes veulent prendre des distances, elles les prendront, mais en tout cas, ce sera un moment très festif.
"Je ne crains pas le Covid, mais les conséquences du confinement."
Yolandeà franceinfo
J’habite dans un petit village de l'Aude, et je vois régulièrement ma famille et mes amis, même en ce moment. Et il était entendu depuis longtemps que nous ferions les fêtes ensemble. J'ai regardé les informations concernant les nouvelles mesures annoncées par le gouvernement, et je n'apprécie pas qu'on interfère dans ma vie privée. J'ai longuement réfléchi sur l'organisation des fêtes, et c'est un choix dont j'assume les conséquences."
Foxam, 20 ans, sera seul dans son appartement étudiant pour protéger ses proches
"Mon grand-père est mort du Covid-19, lors du premier confinement. Forcément, ça me paraît logique de ne prendre aucun risque, même si Noël est une fête familiale. On a fait un deal avec ma famille : chacun va rester dans son foyer. Je serai donc seul dans mon appartement de 17 m². On a pris cette décision il y a deux semaines. Mais déjà, cet été, on en avait discuté, et on s'était dit qu'en cas de rebond de l’épidémie, on ne prendrait pas de risques pour les fêtes.
"Je ne pourrais pas me pardonner d'avoir peut-être contaminé ma grand-mère de 89 ans. Je ne veux pas avoir ça sur ma conscience."
Foxamà franceinfo
Là, on s'organise pour planifier des appels en visio. L'idée c'est que chacun se mettra dans son salon, et on va manger, ensemble, à distance. J'ai même paramétré l'ordinateur de ma grand-mère pour qu'elle puisse aller sur Skype ou Zoom, et je lui ai expliqué comment passer des appels. Comme ça, elle est quasiment autonome."
Damien, 59 ans, médecin, appelle ses patients à la prudence
"Cette année, ce sera Noël à trois : ma femme, mon beau-père de 90 ans que nous hébergeons pendant le confinement et moi. Je suis médecin généraliste dans les Ardennes. Alors, en temps normal, je garde déjà le masque à la maison et je respecte la distanciation pour protéger mon beau-père. J'ai trois enfants, dont une fille urgentiste, et une autre, infirmière en réanimation. Toutes les deux sont très exposées au virus. On est donc complètement d’accord pour faire Noël chacun chez soi. Et puis, on est tous technophiles, alors on fera un repas Whatsapp (rires). Ça sera drôle. Il faut prendre la situation avec bonne humeur.
Ma profession a indéniablement joué un rôle dans la façon dont j'envisage ces fêtes. D'ailleurs, je demande à mes patients ce qu’ils ont prévu pour Noël. Je pense que ça fait partie de la prévention. Certains n'osent pas me confier qu'ils vont se réunir en famille. Moi je leur dis : "Suivez les recommandations. On ne vous oblige à rien, mais le bon sens ce n'est pas de risquer de se retrouver avec un proche en réanimation. Ça n'arrive pas qu'aux autres". J'espère que ma parole porte un peu, mais bon, je ne pense pas avoir le pouvoir de faire changer d’avis ceux qui ont décidé de se réunir."
Nathalie, 61 ans, optera pour un "goûter-brunch" avec distanciation physique
"Fêter Noël de façon traditionnelle me paraissait injuste en pensant aux malades du Covid, qui souffrent dans leurs chambres d'hôpital. Huit personnes assises autour d’une table, de 13 heures à 17 heures, ce n'est pas raisonnable. D'autant plus que mon fils et ma fille sont professionnels de santé, et j'entends souvent leurs témoignages.
"Ça me semblait compliqué de faire une grande tablée quand on sait que des gens sont en réanimation, pendant qu'on fête Noël allègrement."
Nathalieà franceinfo
Alors, j'ai opté pour un compromis : un goûter-brunch de 15 heures à 18 heures. Je vais installer un buffet sur une grande table, avec des dégustations salées et sucrées. Il y aura par exemple des croque-monsieur à la truffe. Chacun se déplacera pour aller se servir. Je ne vais pas non plus mettre au point un système de file d'attente avec un ticket, mais le but reste de ne pas se précipiter tous en même temps au buffet. Je vais aussi disposer des chaises en arc de cercle, autour du canapé, avec une certaine distanciation. Ainsi, nous ne nous ferons pas face pour manger, et on ne sera pas assis, à table, collés les uns aux autres. Je porterai mon masque aussi souvent que possible, et nous aérerons souvent la pièce."
Hélène, 37 ans, expatriée au Portugal, a renoncé à revenir en France pour les fêtes
"On va rester à Lisbonne, où on habite depuis août 2019, avec mon mari et nos trois enfants. On a réfléchi à rentrer en France pour les fêtes, mais c'est compliqué. Prendre l'avion, le métro, les transports en commun, avec la situation sanitaire, c'est pas simple. Sans compter qu'il y a peu d'avions, et des annulations de vol. Et puis une fois sur place, en France, il aurait fallu qu'on loge chez ma belle-mère, ou chez mes parents, qui ont plus de 70 ans. Ça aurait multiplié les risques pour, certes, passer un bon moment en famille, mais on n'a pas envie de culpabiliser si quelqu'un tombe malade après.
Ça sera un peu difficile, je pense, pour les enfants de ne pas voir leurs cousins, cousines, grands-parents... Mais ils auront des cadeaux quand même, ça va aider à faire passer la pilule (rires)".
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