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"Nous sommes pris pour des imbéciles" : à trois jours de Noël, le désarroi des Français coincés au Royaume-Uni à cause du Covid-19

La France vient de fermer ses frontières avec le Royaume-Uni pour au moins 48 heures, suite à l'apparition d'une nouvelle variante du coronavirus. De quoi semer le doute et l'angoisse chez de nombreux Français qui avaient prévu de rentrer pour passer les fêtes en famille.

Article rédigé par Guillemette Jeannot
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4 min
Le terminal 3 de l'aéroport londonien d'Heathrow est fermé, le 21 décembre 2020, après les décisions prises par plusieurs pays de fermer leurs frontières avec le Royaume-Uni. (NIKLAS HALLE'N / AFP)

Ils avaient tout prévu pour retrouver leurs proches en France à l'occasion des fêtes de fin d'année. Tout sauf la "suspension totale des flux de personnes" du Royaume-Uni vers la France décidée par Paris à compter du dimanche 20 décembre minuit et pour 48 heures minimum. Une mesure prise en urgence pour tenter de contenir la nouvelle variante du SARS-CoV-2 qui sévit à Londres et dans le sud-est de l'Angleterre, et qui a amené le gouvernement britannique à reconfiner plus de 16 millions d'habitants pour une durée indéterminée.

A quelques heures de leur vol ou de leur train, des milliers de Français dans la capitale britannique ou dans le sud-est du pays voient ainsi leur retour dans l'Hexagone compromis au pire des moments.

"Comme des cobayes"

"On a tous souffert de cette pandémie et nous faire ça juste avant les fêtes, c'est un double coup de massue", lâche en colère Alexandra, 44 ans, qui se prépare depuis des semaines à revoir sa famille et surtout son père malade.

Cette professeure de français et d'espagnol à Cambridge rentre tous les ans à Angers (Maine-et-Loire) pour les fêtes de fin d'année, juste après son dernier jour de travail. Cette année, voulant préserver la santé fragile de son père, elle avait décidé de se faire tester puis de s'isoler avant de partir "normalement" le lundi 21 décembre au matin. "Mon père n'a pas dormi de la nuit quand il a appris que je ne pourrais peut-être pas venir", relate Alexandra. "Cela l'affecte beaucoup et avec sa maladie de cœur, ce n'est pas conseillé."

Alexandra est d'autant plus énervée qu'elle trouve "ridicule" cette décision de "fermer les frontières deux jours avant les fêtes". Après l'annonce surprise du Premier ministre Boris Johnson, samedi 19 décembre, de nombreux Londoniens ont quitté la capitale dans l'urgence, prenant d'assaut les gares et les routes, avant que les pays voisins ne décident de fermer leurs frontières.

"Il y a très longtemps que la gravité du Covid était connue. Le gouvernement aurait dû décider bien avant de bloquer complètement les frontières et de tester tout le monde."

Alexandra

à franceinfo

"Nous sommes pris pour des imbéciles ! Encore une fois, les gouvernements européens nous considèrent comme des cobayes", tance Alexandra. Comme l'a expliqué le Premier ministre Jean Castex sur Twitter, cette suspension temporaire des liaisons pour 48 heures doit permettre de faire "la clarté sur la situation sanitaire outre-Manche" et "de travailler à une solution adaptée pour nos ressortissants présents au Royaume-Uni." 

160 euros le test PCR

A Londres, Anton, 23 ans, a également été pris de court par cette annonce. L'étudiant avait l'intention, comme chaque année, de revenir sur le continent pour fêter Noël. Mais cette fois, lui et sa famille – il vit depuis vingt ans avec ses parents et ses deux frères dans la capitale britannique – ne pourront peut-être pas rendre visite à la grand-mère dans le sud-ouest de la France. "C'est bizarre de se dire que nous ne sommes pas loin de la France et qu'on est en quarantaine sur une île", confie-t-il.

Quand le gouvernement français a précisé qu'un test PCR serait certainement nécessaire pour entrer en France, toute la famille est allée se faire dépister. "Vu les délais, nous avons été obligés de passer par une entreprise privée et c'est 150 livres (160 euros) le test", détaille Anton, irrité d'avoir à débourser une telle somme, alors que la famille avait prévu de se faire tester en France... gratuitement. Tous les cinq espèrent encore pouvoir emprunter le tunnel sous la Manche mercredi 23 décembre au matin, mais sont, comme les autres Français, suspendus aux prochaines décisions du gouvernement.

Une chance que n'aura peut-être pas Laura Cornic. Interrogée par France 2, cette Française n'a pas réussi à prendre un rendez-vous dans les temps avant son train prévu mercredi soir, et se fait donc à l'idée de passer Noël à Londres.

"C'est à nous de nous organiser"

Amel, une étudiante de 23 ans, scrute quant à elle les sites d'information. Elle est venue avec son ami vivre le second confinement à Londres chez les parents de ce dernier. Mais depuis 24 heures, elle est "anxieuse". Même si la compagnie aérienne avec laquelle elle doit voyager lui a confirmé ce matin que son avion pour le 26 décembre est maintenu, elle ne sait pas si elle sera rentrée à temps pour ses partiels le 4 janvier. La jeune femme désespère d'avoir des instructions "vraiment claires" face à ces "mesures soudaines".

"Je ne sais pas combien de temps les tests seront valables pour rentrer, s'il sera possible de se faire tester à l'aéroport. C'est à nous de nous organiser mais c'est difficile quand vous n'avez aucune information."

Amel

à franceinfo

Dimanche soir, après l'annonce de la fermeture des liaisons, Myriam, 42 ans, a passé une partie de la nuit à réorganiser son voyage. En achetant un billet d'avion pour la Suisse, d'où elle espérait rejoindre l'ouest de la France en train. Peine perdue : dans la journée de lundi, la compagnie aérienne lui a annoncé l'annulation de son vol, les autorités suisses ayant entre-temps décidé à leur tour de suspendre les liaisons avec le Royaume-Uni.

"C'est très stressant de ne pas savoir si je vais pouvoir revoir ma famille", témoigne cette baby-sitter, qui habite en Angleterre depuis quatre ans. Pour seul espoir, Myriam tient entre ses mains une ultime de chance de rejoindre la France en 2020 : un billet d'Eurostar pour le 26 décembre. Trop tard pour fêter Noël.

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