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Chaos au Sri Lanka : comment le pays, traversé par une crise économique historique, a sombré dans la violence

Des milliers de policiers et de soldats sont déployés afin d'assurer le respect du couvre-feu notamment à Colombo.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des manifestants et des partisans du gouvernement s'affrontent à Colombo (Sri Lanka), le 9 mai 2022. (ISHARA S. KODIKARA / AFP)

L'actualité au Sri-Lanka est un peu passée inaperçue, écrasée par la guerre en Ukraine. Pourtant, cela fait presque deux mois que les habitants de l'île située à la pointe de l'Inde contestent leur gouvernement à coup de défilés et de grèves générales : le pays vit sa pire crise économique depuis son indépendance en 1948.

La capitale, Colombo, a plongé dans la violence lundi 9 mai : des partisans du pouvoir, armés de bâtons et de matraques, attaquent des manifestants qui campent devant le bureau du président. Dans la foulée, plusieurs milliers de personnes envahissent la résidence du premier ministre Mahinda Rajapaksa, des propriétés de sa famille sont saccagées.

Cinq personnes sont mortes, dont un député qui s'est suicidé après avoir tiré sur la foule, ainsi que 200 blessés à travers tout le pays. Le Premier ministre a annoncé sa démission et il est tenu en lieu sûr par l'armée. Les 22 millions d’habitants vivent désormais sous couvre-feu.

Pourquoi cette flambée de violence ? Parce que les Sri-Lankais n'ont plus de quoi manger, plus de quoi se soigner : magasins et pharmacies sont vides, les prix ont augmenté de 30% rien qu'en avril, il n'y a plus d'essence dans les stations services et les coupures d'électricité peuvent durer quinze heures par jour.

Le Sri Lanka vit la plus grave crise économique depuis son indépendance en 1948. Le pays est en faillite, tout simplement. Le 12 avril, il a même dû suspendre ses paiements à ses créanciers internationaux et demander l'aide du FMI.

Le piège de la dette

Comment le pays en est-il arrivé là ? Par une accumulation d'erreurs économiques et politiques. Ça fait 20 ans que le Sri Lanka est dirigé par une seule et même famille : les Rajapaksa. Ils sont tous frères : le président et le premier ministre, mais aussi le ministre des Finances, le ministre de l'Agriculture. Jusqu'à un récent remaniement début avril, cousins et neveux se partageaient d'autres portefeuilles au gouvernement et dans l'administration. 

Nationalistes purs et dur, le clan est tombé dans le piège de la dette grâce à l'argent facilement, mais chèrement prêté par la Chine. Il a lancé de grandes infrastructures totalement inutiles, une réforme agricole qui a plongé le pays dans l’insécurité alimentaire, appliqué des baisses d'impôts alors que les caisses de l’État étaient vides. Par dessus tout ça, la pandémie qui a mis un coup de frein au tourisme et aux rentrées de devises étrangères.

Et puis, il y a la guerre : l'Ukraine était, avec la Russie, le premier client de thé noir aromatique provenant du Sri Lanka. Et Kiev n'achète plus rien. La perle de l'océan indien qui attirait les touristes du monde entier est en proie au chaos. Et même s'ils savent que ça ne changera pas leur quotidien du jour au lendemain, les manifestants demandent maintenant la tête de leur président, Gotabaya Rajapaksa, âgé de 72 ans.

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