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Témoignages
"Ça n'arrive qu'une fois dans une vie" : deux nouveaux députés, l'un RN et l'autre PS, découvrent l'Assemblée nationale
Qui sont les nouveaux visages de l'Assemblée nationale ? Franceinfo s'intéresse à deux députés élus pour la première fois et issus des deux partis qui ont gagné le plus de sièges : le RN David Magnier, de la 7e circonscription de l'Oise, et Céline Thiébault-Martinez du PS et Nouveau Front populaire, dans la 8e circonscription de Seine-et-Marne.
À Rieux, dans l'Oise, David Magnier, en costume cravate enchaîne les coups de téléphone. Tout s'accélère pour le délégué départemental du RN de l'Oise élu dimanche avec 43,85% des voix. Il faut dire que tout va très vite : à peine élu, le Picard sort tout juste d'un rendez-vous chez la préfète. "Ça y est, on est lancé, on est député, les démarches sont entamées, raconte David Magnier, et c'est la première chose que je me suis dit ce matin en me levant. C'est vrai que c'est un grand changement dans une vie."
La politique pour exprimer "le ras-le-bol des citoyens"
Car jusqu'à maintenant, ce père de famille de 52 ans était chef de cuisine dans un lycée, à savoir : "faire les menus, faire les commandes, donc la gestion du budget..." détaille-t-il. La politique est un monde assez nouveau pour cet ancien gilet jaune qui a justement eu un déclic au moment de cette crise. "Ce qui m'a amené dans la politique, c'est un peu le ras-le-bol des citoyens et de vouloir œuvrer aussi pour changer un petit peu tout ça", se souvient David Magnier.
Et tout s'est accéléré lors des dernières élections municipales à Beauvais : "On m'a demandé de venir sur la liste du Rassemblement national, ce que j'ai accepté. Pour moi, le Rassemblement national, aujourd'hui, c'est le parti qui veut lutter pour le pouvoir d'achat, qui est contre l'immigration massive, incontrôlée, clandestine surtout, et aussi qui veut redonner de la sécurité aux Français." Après avoir été battu dans une autre circonscription en 2022, ce conseiller municipal de Beauvais a donc fini par l'emporter dans celle où il a grandi.
Directrice de mutuelle et présidente d'une ONG féministe
Autre visage et autre parcours avec Céline Thiébault-Martinez qui a remporté les élections législatives dans la 9e circonscription de Seine-et-Marne, face à un candidat RN. Rencontrée juste à côté de l'Assemblée nationale, elle est venue en transports en commun depuis la Seine-et-Marne. Sac à dos, veste en cuir noire et baskets, cette femme de 49 ans dirigeait une mutuelle jusqu'à la semaine dernière, elle était également présidente d'une ONG féministe. "Je suis désormais députée du Nouveau Front populaire, sourit-elle, parce que je suis hypercontente, parce qu'être députée, je pense que ça n'arrive pas souvent dans une vie."
Cette députée du Nouveau Front populaire a pris sa carte au PS il y a près de 20 ans et connaît déjà l'Assemblée nationale. "J'ai contribué à des travaux parlementaires en tant que présidente d'association. Donc, c'est un endroit que je connais, dont je connais le fonctionnement. Je sais ce que c'est qu'une proposition de loi, je sais comment se passent les processus d'amendements, etc..., explique Céline Thiébault-Martinez. La question maintenant, c'est : est-ce que nous serons dans de bonnes conditions pour travailler, compte tenu des attentes exprimées des Français ?"
"On change de statut"
Ces conditions de travail, elle les a découvertes pendant de longues heures lundi, jour où de nombreux députés ont fait leur rentrée au palais bourbon hier, avec tout le protocole lié à cette fonction. Cela commence sur les marches qui mènent de la cour d'honneur à l'entrée de l'Assemblée nationale avec les photographes qui ne la connaissent pas encore. Elle a évidemment reçu l'écharpe tricolore "et à partir de ce moment-là, on est pris en charge par les huissiers. Donc clairement, on change de statut. On n'est pas un citoyen dans la rue, c'est très différent".
"Le vrai déclic, ce sera aussi au moment où on entrera dans l'hémicycle la première fois."
Céline Thiébault-Martinez, députée PS de Seine-et-Marneà franceinfo
Ses premiers pas dans l'Hémicycle, ce sera le 18 juillet pour l'élection du président de l'Assemblée nationale. D'ici là, d'intenses négociations sont prévues mais elle qui a été élue notamment grâce au retrait d'une candidate centriste préfère temporiser quand la question des alliances est abordée. "II faut que je réfléchisse", dit-elle avant d'expliquer que son souhait c'est d'agir, que les députés votent des lois et trouvent donc une majorité. "Cette campagne-là, elle m'a fait prendre conscience d'une chose, c'est que si nous ne sommes pas capables de démontrer l'utilité des institutions, il est vraisemblable que ce que nous avons craint là, dimanche dernier pourrait se produire aux prochaines élections. Et on a cette responsabilité-là maintenant." Mais elle ne dit pas comment ni avec qui elle compte composer cette majorité...
"Le travail sera compliqué"
Le député RN de l'Oise ne digère toujours pas le fait que la coalition de gauche soit arrivée en tête. Étant donné que le RN n'est finalement que le troisième bloc politique à l'Assemblée national, David Magnier ne se fait pas d'illusion. "On sait déjà que par sectarisme, des personnes ne voteront pas pour nos mesures. Ils vont rester sur leur même position. Ça risque d'être tendu par moments", anticipe l'élu qui ajoute que "le travail sera compliqué".
Pour lui cette situation est notamment la conséquence du front républicain et de ce qui a été, selon lui, un rapprochement entre les macronistes et le Nouveau Front populaire. Et si Jordan Bardella reconnaît des erreurs et des efforts à faire sur la "professionnalisation de l'implantation locale du RN", David Magnier compte aussi sur l'effondrement de la gauche. "En fin de compte, le Front populaire, la 'Nupes 2', va montrer son vrai visage, encore une fois au sein de l'Assemblée et j'espère que les électeurs réfléchiront justement sur leur prochain vote, sur leur prochain choix qu'il y aura lors d'une prochaine élection" et ainsi peut-être permettre au RN de briser ce plafond de verre qui l'a jusqu'à présent empêché de devenir majoritaire à l'Assemblée nationale.
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