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Édito
La droite peut-elle se permettre de s’opposer à la constitutionnalisation de l’IVG ?
Le Sénat se penche mercredi 28 février sur l’inscription de l’IVG dans la Constitution, une réforme voulue par le gouvernement, et dont le sort dépend de la droite, majoritaire au sein de la Haute Assemblée. Gérard Larcher, le président du Sénat, affiche son hostilité. Il répète que la Constitution ne doit pas "être un catalogue de droits sociaux et sociétaux" et que l’interruption volontaire de grossesse n’est, selon lui, pas menacée dans l’hexagone. Mardi, il s’est contenté de réitérer ses "réserves" sur la rédaction issue de l’Assemblée nationale. Elle évoque "la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une IVG". Officiellement, le mot "garantie" hérisse la droite sénatoriale qui y voit la menace d’un "droit opposable".
Un amendement porté par le sénateur LR Philippe Bas veut donc le supprimer, mais s’il est adopté, le texte repartirait à l’Assemblée. Avant de convoquer un Congrès pour réviser la Constitution, l’exécutif doit en effet faire adopter le projet de loi dans les mêmes termes par chacune des deux Assemblées.
La droite chercherait à gagner du temps, c’est en tout cas l’accusation de la majorité. En cas de retour du texte à l’Assemblée, il n’est, d'ailleurs pas dit que les députés valident ce nouveau recul imposé par les sénateurs. Ils ont déjà amendé le texte pour remplacer le mot "droit" à l’IVG par celui de "liberté", comme le préconisait le même Philippe Bas en 2023. La droite sénatoriale fait monter les enchères et la majorité soupçonne la droite de chercher un prétexte pour enterrer un texte qui la divise et, surtout, dans une sorte de réflexe pavlovien, pour faire capoter une initiative d’Emmanuel Macron.
En opposition avec l'opinion publique
Cette stratégie est politiquement risquée. Dans les sondages, une écrasante majorité de l’opinion soutient l’inscription de l’IVG dans la Constitution. Prise à partie par de nombreuses associations et par des personnalités, par exemple Sophie Marceau, la droite court le risque de se ringardiser un peu plus sur la défense des droits des femmes de surcroît à un moment où cette cause prend enfin une place prééminente dans le débat public. Ce ne serait pas la première fois que la droite se retrouverait à contre-courant des évolutions sociétales. Elle a, par exemple, longtemps combattu le PACS ou le "mariage pour tous" avant de s’y rallier avec une dizaine d’années de retard. Sans oublier la loi Veil elle-même. Portée par un gouvernement de droite, cette réforme historique qui institua l’IVG en 1975 n’avait été adoptée que grâce au soutien massif de la gauche, les deux tiers des parlementaires de droite avaient voté contre.
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