Pénurie de médicaments, bronchiolite, port du masque et cyberattaques... Ce qu'il faut retenir de l'interview de Rémi Salomon

Le professeur Rémi Salomon, pédiatre à l'hôpital Necker à Paris et président de la Conférence des présidents de la commission médicale d'établissements des CHU de France, était l'invité du "8h30 franceinfo", jeudi 8 décembre 2022. Pénurie de médicaments, bronchiolite, port du masque et cyberattaques... Il répond aux questions de Marc Fauvelle et Salhia Brakhlia.

"Avoir une pénurie d'Amoxicilline est extrêmement choquant" dans "un pays riche comme la France"

Certains médicaments pour enfants sont en pénurie dans les pharmacies et sont "en tension" dans les hôpitaux. "Avoir une pénurie d'Amoxicilline est extrêmement choquant" dans "un pays riche dans la France", déplore Rémi Salomon. "L’Amoxicilline est un médicament essentiel, c’est deux tiers des prescriptions d’antibiotiques chez l’enfant", explique-t-il. Le président de la Conférence des présidents de la commission médicale d'établissement des CHU déplore la réduction de la production de ces médicaments ces deux dernières années où les virus ont moins circulés car les gens se protégeaient du Covid-19. Il "pense qu’on ne peut pas uniquement dépendre d’une logique commerciale. La puissance publique doit agir, peut-être en produisant ou au moins avoir une règlementation beaucoup plus contraignante".

Bronchiolite : "Ça reflue un peu mais ça reste quand même très intense" en région parisienne

Rémi Salomon affirme que l'épidémie de bronchiolite "reflue un peu [en région parisienne] mais ça reste quand même très intense". "Il y a plus de cas et probablement un peu plus sévères. On a plus de patients hospitalisés cette année. (…) L’impact sur l’hôpital est extrêmement fort", ajoute-t-il, alors que l'épidémie frappe les bébés français d'une manière sans précédent depuis une dizaine d'années, selon Santé publique France.

Port du masque : "C'est vraiment une décision politique"

Rémi Salomon estime que rendre le port du masque à nouveau obligatoire "est vraiment une décision politique", alors que le gouvernement et notamment le ministre de la Santé disent attendre l'avis des médecins et des scientifiques. Obligatoire ou pas, pour lui, "il faudrait que dans les transports en commun les gens portent le masque. Là où on est nombreux, où on est dans des espaces confinés, c'est là que le virus se transmet le plus, il faut porter plus le masque à ces endroits". Il recommande même aux personnes dites vulnérables de porter un masque FFP2.

Rappel de vaccin contre le Covid-19 : "On est vraiment en retard"

"On est vraiment en retard" dans la campagne de rappel de vaccin contre le Covid-19, regretteRémi Salomon. Il rappelle qu'il faut se faire vacciner à nouveau six mois après une dose de vaccin ou après avoir contracté le virus. "Le vaccin marche un peu moins bien sur la transmission [des nouveaux variants] mais c’est très efficace sur les formes graves", martèle le spécialiste. "Il faut que tout le monde aille se faire vacciner" avant les fêtes, avant de croiser des personnes à risque.

Retour des soignants non-vaccinés : "Ce débat prend trop de place"

Le débat sur le retour à l'hôpital des soignants non-vaccinés "prend trop de place", aux yeux de Rémi Salomon, qui estime toujours le vaccin "nécessaire pour les soignants". Une polémique est née car les députés du Rassemblement national ont voulu reprendre une proposition de loi de La France insoumise pour les réintégrer. Les députés LFI ont finalement retiré leur proposition de loi, pour ne pas "servir les coups de communication du RN". Le pédiatre souligne que c'est un débat "très politique" alors que "dans les hôpitaux on n’en parle pas, ça concerne très très peu de monde", moins d'1% des soignants, quelques centaines de personnes. "Ça n’apportera absolument pas la solution à la question du manque de soignants", ajoute-t-il.

Situation dans les hôpitaux : "Une vraie mutation du système de santé est nécessaire"

Rémi Salomon réclame "une vraie mutation du système de santé" qui est "en extrême tension". La période est "particulièrement compliquée", alors que l'hiver est frappé par un "rebond des maladies infectieuses" partout dans le monde, dit-il. Il assure que, confrontés à une triple épidémie cet hiver – Covid-19, grippe et bronchiolite – "les hôpitaux font toujours face mais dans des conditions difficiles". Mais "des hivers comme celui-là, il y en aura d’autres, donc il faut renforcer l’hôpital", prévient-il, réclamant une augmentation des effectifs en formant davantage de soignants et aussi la libération de "temps médical" pour les médecins en réduisant leurs tâches administratives.

Cyberattaques : "C'est vraiment un problème majeur (…) Il faut investir"

"La cyber-sécurité, c’est vraiment un problème majeur" dans les hôpitaux, s'inquiète le président de la Conférence des présidents de la commission médicale d'établissement des CHU. "Une cyberattaque dans un hôpital peut être assez catastrophique. Ça met en très grande difficulté un hôpital pendant plusieurs semaines et même pendant plusieurs mois. L'hôpital de Dax a mis un an avant de retrouver une activité complètement normale", explique-t-il. "Il faut investir", insiste Rémi Salomon, pour qui "il ne faut pas qu'on fasse des économies sur les systèmes d'information" des établissements de santé.

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