Moralisation de la vie politique : le président d'Anticor salue l'adoption de "quelques mesures emblématiques"
Le président de l'association anticorruption Anticor, Jean-Christophe Picard, salue l'adoption à l'Assemblée des projets de loi sur la moralisation de la vie politique mais regrette "qu'il n'y ait pas eu d'avancées supplémentaires obtenues par l'Assemblée".
319 voix pour, quatre voix contre : l'Assemblée a très largement voté en première lecture les projets de loi de moralisation de la vie politique, dans la nuit du vendredi 28 au samedi 29 juillet. Interdiction des emplois familiaux de collaborateurs pour la famille proche, suppression de la réserve parlementaire, instauration d'une peine complémentaire obligatoire d'inéligibilité en cas de manquements à la probité. Autant de mesures visant à restaurer la confiance dans la vie politique.
Invité de franceinfo samedi, Jean-Christophe Picard, le président de l'association anticorruption Anticor, salue l'adoption de "quelques mesures emblématiques", mais "regrette qu'il n'y ait pas eu d'avancées supplémentaires obtenues par l'Assemblée" par rapport au texte initial du gouvernement, comme l'obligation de casier judiciaire vierge pour les élus.
Quelles sont les mesures les plus importantes, selon vous ?
Jean-Christophe Picard : Il y en a plusieurs : la suppression de la réserve parlementaire, la suppression des recrutements familiaux ou encore l'interdiction pour les lobbys de rémunérer les collaborateurs d'élus…. Voilà quelques mesures emblématiques. Je remarque que c'est peu ou prou le texte proposé dès le départ par le gouvernement. On peut regretter qu'il n'y ait pas eu d'avancées supplémentaires obtenues par l'Assemblée. Le casier judiciaire vierge et l'encadrement des lobbys, par exemple, figuraient dans le programme du candidat Emmanuel Macron. On est déçus de ne pas voir ces dispositions dans la loi.
Le ministère de l'Economie va par ailleurs conserver le monopole des poursuites pénales en matière de fraude fiscale. Pourquoi est-ce une mauvaise chose ?
Normalement, dans le cadre d'une infraction, c'est le procureur qui peut poursuivre ou non. Pour ce qui est de la fraude fiscale, il doit demander l'autorisation au ministre du Budget. C'est une atteinte au principe de séparation des pouvoirs. Et cela pose surtout problème quand le ministre du Budget s'appelle Jérôme Cahuzac, ou lorsqu'il s'appelle Eric Woerth et que celui-ci est en même temps le trésorier du parti au pouvoir. Cela crée des conflits d'intérêts complètement colossaux. Et il faut savoir que le manque à gagner pour fraude fiscale en France, c'est 80 milliards d'euros par an.
Depuis jeudi, la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, est montrée du doigt pour avoir réalisé une plus-value boursière de plus d'un million d'euros quand elle était chez Danone en tant que DRH, au moment d'un plan social. Est-ce que cela montre, selon vous, que le recours à la société civile ne règle pas tout ?
Déjà, j'étais étonné qu'on nomme Mme Pénicaud au gouvernement alors qu'elle était visée dans l'affaire du voyage d'Emmanuel Macron à Las Vegas [l'agence publique Business France, dont Muriel Pénicaud était directrice générale, est soupçonnée d'avoir enfreint la réglementation sur les marchés publics en ne faisant pas d'appel d'offres]. Je pense qu'on aurait dû faire attention. Et pour ce qui est de l'affaire Danone, il faut voir si tout est légal ou pas. Ce qui est sûr, c'est que cela fait partie des pratiques déplorables qui font que certains arrivent à s'enrichir sans rien faire.
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