Discours de politique générale de Michel Barnier : fiscalité, sécurité, proportionnelle, retraites... Ce qu'il faut retenir des annonces du Premier ministre

Du pouvoir d'achat à l'immigration, le Premier ministre a détaillé ses priorités, mardi après-midi, face à une Assemblée nationale chahutée.
Article rédigé par Alice Galopin, Mathilde Goupil
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Le Premier ministre, Michel Barnier, prononce son discours de politique générale à l'Assemblée nationale, le 1er octobre 2024. (ALAIN JOCARD / AFP)

Grand oral pour Michel Barnier. Près d'un mois après sa nomination, le Premier ministre a prononcé son discours de politique générale, mardi 1er octobre, devant les députés. Durant près d'une heure et demie, dans une Assemblée nationale chahutée, le chef du gouvernement a dévoilé les "grands chantiers" de son gouvernement

L'intervention du chef du gouvernement a débuté par la reprise d'une formule du général de Gaulle : "Faire beaucoup avec peu", ce qui est "la vie quotidienne de beaucoup de nos compatriotes". Le Premier ministre a ensuite dévoilé une série de propositions sur la situation budgétaire, l'accès aux services publics, la sécurité ou encore l'immigration. Voici ce qu'il faut retenir des principales déclarations du chef du gouvernement.

Face à une dette "colossale", une réduction des dépenses et la mise à contribution des "plus fortunés" et "des grandes entreprises"

Le Premier ministre entend d'abord reprendre la maîtrise des comptes publics, alors que le déficit public est attendu à 6% pour 2024. "La véritable épée de Damoclès", "c'est notre dette" qui est "colossale", a estimé Michel Barnier. "La charge de la dette", c'est-à-dire le remboursement des seuls intérêts de la dette, est "le deuxième poste de dépense de l'Etat, derrière l'école", a-t-il fustigé. Michel Barnier entend ramener le déficit à 5% en 2025 et atteindre l'objectif européen de 3% en 2029. Un changement de trajectoire, puisque le précédent gouvernement visait un retour sous les 3% d'ici à 2027. 

DPG : Michel Barnier annonce "une contribution exceptionnelle"

Pour y arriver, Michel Barnier annonce que l'effort budgétaire proviendra "aux deux tiers" de la réduction des dépenses publiques. Sur le volet fiscal, le chef du gouvernement demande "une participation au redressement collectif aux grandes entreprises qui réalisent des profits importants". Il entend également mettre en place "une contribution exceptionnelle" des "Français les plus fortunés".

La lutte contre le réchauffement climatique "au cœur de l'action" du gouvernement

"Nous n'héritons pas la Terre de nos ancêtres, nous l'empruntons à nos enfants", a lancé à la tribune Michel Barnier, assurant que la lutte contre le réchauffement climatique serait "au cœur de [son] action". "Nous pouvons et nous devons faire plus", a-t-il avancé, citant la prévention des "risques de plus en plus nombreux et violents", la préservation de la biodiversité et l'encouragement de l'économie circulaire.

DPG : "Je crois à une écologie des solutions", déclare Michel Barnier

Il a promu une "écologie des solutions", soulignant qu'il était possible de "trouver un chemin de réalisme et d'action". Parmi les solutions évoquées figure sans surprise le "développement du nucléaire" mais aussi des énergies renouvelables et des biocarburants pour l'aviation. Il a aussi promis d'encourager la "décarbonation des usines" et "l'innovation", notamment "pour le solaire et la géothermie"

Sur la réforme des retraites : "réfléchir à des aménagements"

Conformément à sa promesse, le Premier ministre a proposé aux partenaires sociaux de "réfléchir à des aménagements justes et raisonnables" de la réforme des retraites, notamment sur la "retraite progressive", "l'usure professionnelle", "l'égalité entre les femmes et les hommes face à la retraite".

Il leur a aussi proposé de "négocier dès les prochaines semaines sur l'emploi des seniors, sur notre système d'indemnisation du chômage"

Sur le scrutin proportionnel : Michel Barnier se dit prêt à une "réflexion"

Michel Barnier a assuré avoir "entendu les appels à davantage de représentativité" et s'est dit "prêt à une réflexion et une action sans idéologie sur le scrutin proportionnel". La proportionnelle est demandée par plusieurs formations politiques, notamment le Rassemblement national et le MoDem. 

Dans une Assemblée divisée, le Premier ministre a appelé à de "l'écoute", du "respect" et du "dialogue" entre "le gouvernement et le Parlement", et "entre toutes les forces politiques et toutes les sensibilités politiques de l'Assemblée". Michel Barnier s'est ainsi déclaré "prêt à un partage de l'ordre du jour" pour "accueillir des propositions de loi transpartisanes et ambitieuses pour le pays"

Elections provinciales en Nouvelle-Calédonie : le Premier ministre propose un report "jusque fin 2025"

Michel Barnier est revenu sur la "crise d'une gravité exceptionnelle", économique et politique, que connaît la Nouvelle-Calédonie. Il a appelé de ses vœux une "nouvelle période" durant laquelle un "consensus politique" sur l'avenir constitutionnel du territoire doit se décider, alors qu'"une mission de concertation et de dialogue", conduite par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, "se rendra en Nouvelle-Calédonie prochainement". Pour cela, il a proposé un report des élections provinciales "jusqu'à fin 2025"

Par ailleurs, le projet controversé de loi constitutionnelle sur le dégel du corps électoral, adopté en mai dernier, "ne sera pas soumis au Congrès".

Des gages sur les avancées sociales

Alors que son gouvernement compte plusieurs ministres s'étant opposés au mariage pour tous ou à la constitutionnalisation de l'interruption volontaire de grossesse (IVG), Michel Barnier a donné des gages sur le volet sociétal. "Il n'y aura aucune tolérance à l'égard du racisme et de l'antisémitisme" ni "aucune remise en cause" de l'IVG, a-t-il assuré. Sur la fin de vie, alors que les travaux parlementaires ont été interrompus avec la dissolution prononcée par Emmanuel Macron, Michel Barnier a promis que les discussions reprendraient "en début d'année prochaine".

DPG : Michel Barnier sur l'IVG et le mariage pour tous

Des mesures pour le pouvoir d'achat et l'accès aux services publics

Le Premier ministre entend également répondre aux "préoccupations" du quotidien des Français, notamment concernant leur pouvoir d'achat. "Nous revaloriserons le smic de 2% dès le 1er novembre, par anticipation de la date du 1er janvier", a fait savoir Michel Barnier, appelant les branches professionnelles dans lesquelles les minima salariaux sont inférieurs au smic à des "négociations rapides". Le chef du gouvernement veut aussi revoir le "dispositif d'allègement de charges", qui "freine la hausse des salaires au-dessus du smic"

Par ailleurs, "nous allons simplifier au maximum les normes qui pèsent sur la construction de logements neufs ou la réhabilitation des logements anciens", afin de rendre disponibles davantage de logements, a-t-il promis. L'accès à la propriété sera facilité par "l'extension du prêt à taux zéro sur tout le territoire".

Michel Barnier veut également mettre l'accent sur l'accès aux services publics, en développant les transports dans les zones rurales, en recourant à des enseignants retraités volontaires pour pallier le manque de professeurs ou à l'engagement volontaire d'"internes français et étrangers" dans les déserts médicaux via un "plan Hippocrate". Dans la même veine, le Premier ministre souhaite également donner aux infirmiers "un rôle élargi dans la prise en charge des patients".

Justice : le gouvernement entend "limiter les possibilités de réduction de peine"

Le Premier ministre a promis des forces de l'ordre "encore plus visibles et présentes sur la voie publique", notamment via la réduction du temps consacré aux "procédures administratives" et la création de nouvelles brigades de gendarmerie. Il a également souhaité la "réduction des délais de jugement, particulièrement pour les mineurs", souhaitant "la création d'une procédure de comparution immédiate pour les mineurs délinquants de plus de 16 ans" et une réflexion sur l'excuse de minorité.

Afin que les peines soient "réellement exécutées", le Premier ministre souhaite "réviser les conditions d'octroi du sursis et limiter les possibilités de réduction de peine", ainsi qu'un recours "plus important aux travaux d'intérêt général, aux amendes administratives et aux amendes forfaitaires délictuelles". Enfin, Michel Barnier a annoncé la création de places de prison et s'est dit favorable à "la création d'établissements nouveaux pour les courtes peines", notamment pour les "mineurs délinquants".

Le Premier ministre a également profité de la présentation de sa politique sécuritaire pour adresser un tacle à son ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, dont les propos sur l'Etat de droit ont fait polémique. "La fermeté de la politique pénale que les Français demandent est indissociable du respect de l'Etat de droit et des principes d'indépendance et d'impartialité de la justice auxquels je suis personnellement, profondément et définitivement attaché", a-t-il lâché, sous les applaudissements de nombreux députés.

Une maîtrise plus "satisfaisante" de la politique migratoire

Le Premier ministre a souhaité sortir de "l'impasse idéologique" dans laquelle se trouve, selon lui, le sujet de l'immigration. "Nous ne maîtrisons plus de manière satisfaisante notre politique migratoire", a-t-il estimé. Michel Barnier souhaite "un traitement plus efficace et en proximité des demandes d'asile", afin que les décisions soient connues plus rapidement. Il veut aussi "faciliter la prolongation exceptionnelle de la rétention des étrangers en situation irrégulière" afin de faciliter l'exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF).

Pour améliorer ce point, il envisage par ailleurs de conditionner davantage "l'octroi de visas à l'obtention de laissez-passer consulaires nécessaires aux reconduites à la frontière", en renégociant les accords avec les pays d'origine des migrants venant en France. Il souhaite enfin que la France puisse "rétablir des contrôles à ses propres frontières", dans le respect des règles européennes.

Une déclaration perturbée par les députés insoumis

Hostiles au gouvernement de Michel Barnier, alors que le Nouveau Front populaire (NFP) est arrivé en tête des élections législatives anticipées début juillet, les députés La France insoumise (LFI) ont brandi leur carte d'électeur dans l'Assemblée, dès le début de la prise de parole du Premier ministre.

Les députés LFI brandissent des cartes d'électeur dans l'hémicycle

S'ils ont rapidement rangé leur document, Michel Barnier s'est exprimé tout du long de sa prise de parole dans un brouhaha important, son discours étant ponctué de réactions, de soutien ou d'hostilité, de nombreux députés.

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