Affaire des assistants parlementaires FN : pourquoi Marine Le Pen refuse-t-elle de se rendre à la convocation des juges ?
La présidente du Front national est convoquée ce vendredi par les juges d'instruction du pôle financier, en vue d'une mise en examen pour abus de confiance. Mais la candidate a fait savoir qu'elle n'honorerait pas ce rendez-vous judiciaire.
Le bras de fer entre Marine Le Pen et la justice continue. Vendredi 10 mars, la présidente du Front national est convoquée par les juges d'instruction du pôle financier, en vue d'une mise en examen pour abus de confiance, dans le dossier des assistants parlementaires du FN.
Il lui est notamment reproché d'avoir salarié avec des fonds européens, sous le statut d'assistante parlementaire, l'une de ses plus proches collaboratrices, Catherine Griset, alors qu'elle exerçait des fonctions de cheffe de cabinet au siège du parti, à Nanterre. Mais Marine Le Pen a annoncé qu'elle n'honorerait pas sa convocation devant les juges. Franceinfo vous explique pourquoi.
Parce qu'elle considère que la justice "perturbe" la présidentielle
Dans un courrier transmis à la justice, Marine Le Pen s'étonne d'être convoquée 40 jours avant l'élection présidentielle alors que des investigations sont menées par le parquet de paris depuis mars 2015. La candidate frontiste dénonce une instrumentalisation politique et estime que les conditions de "légalité", de "sérénité" et de "confiance" ne sont pas réunies pour qu'elle soit entendue.
"La justice (...) ne doit pas venir perturber, pour une enquête qui pourrait se dérouler plus tard, qui aurait pu se dérouler avant, la campagne présidentielle", avait expliqué la leader frontiste au JT de TF1 fin février. "Un tel délai est courant dans les enquêtes préliminaires, rétorque une source judiciaire dans Le Parisien. D'autant que des services français et européens étaient conjointement saisis des investigations. La masse de données à éplucher était particulièrement importante."
Parce qu'elle estime que ces accusations ne sont pas fondées
La présidente du Front national estime aussi que la procédure est "mal fondée". A ses yeux, son activité de parlementaire ne doit pas être soumise au contrôle de l'autorité judiciaire, ajoute-t-elle. Une défense au nom de la séparation des pouvoirs qui rappelle celle de François Fillon dans l'affaire du supposé emploi fictif de son épouse Penelope. Problème : la séparation des pouvoirs a pour objet le contrôle mutuel et non l’immunité des représentants, rappelle 20 Minutes.
Parce qu'elle bénéficie d'une immunité parlementaire
Contrairement à un justiciable ordinaire, les juges d'instruction n'ont pas la possibilité de contraindre la députée européenne à se présenter devant eux. La raison ? L'eurodéputée bénéficie d'une immunité. Cette disposition permet aux parlementaires de ne pas être poursuivis par la justice sans l'autorisation de leur assemblée.
Pour toute mesure de coercition, les juges doivent donc obtenir la levée de son immunité auprès du Parlement européen, comme cela a été effectué dans un autre dossier, où il lui est reproché d'avoir diffusé des images d'exactions du groupe jihadiste Etat islamique sur Twitter. Mais cette procédure est longue.
Dans le dossier des assistants parlementaires, la levée de l'immunité de Marine Le Pen n'arriverait probablement pas à son terme avant la fin des élections législatives des 11 et 18 juin si elle était lancée aujourd'hui.
Parce que cette affaire ne la pénalise pas dans les intentions de vote
Malgré les soupçons qui s'accumulent, l'affaire ne semble pas pénaliser Marine Le Pen dans les sondages. "La moralité n’est pas le premier ressort du vote FN. La première raison du vote frontiste est la thématique identitaire, la priorité nationale", explique Sylvain Crépon, maître de conférences en science politique à l’université de Tours et spécialiste du Front national, dans Sud Ouest. "Même si elle est mise en examen ou si des faits sont prouvés et avérés, elle présentera ça comme une manigance, une manœuvre pour l’abattre", ajoute-t-il.
L'électorat du Front national "s'inscrit dans un registre d'opposition au système, donc ces accusations sont comprises comme une manifestation dudit 'système'", explique encore Thomas Guénolé, docteur en sciences politiques cité par Europe 1.
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