Résultats législatives : le FN fait mieux qu'attendu et obtient huit députés, selon notre estimation Ipsos/Sopra Steria
Les estimations au soir du premier tour annonçaient un à cinq sièges pour le parti de Marine Le Pen.
La déception est moins rude pour le Front national. Le parti de Marine Le Pen semble avoir réussi à inverser la tendance du premier tour. A l'issue du second tour des élections législatives, dimanche 18 juin, le Front national a obtenu huit sièges à l'Assemblée nationale, selon les résultats définitifs. Les projections au soir du premier tour annonçaient un à cinq sièges pour le parti d'extrême droite.
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Quel était l'objectif ?
Malgré le résultat plutôt décevant de Marine Le Pen au second tour de la présidentielle (33,9% des voix), les leaders frontistes espéraient obtenir plusieurs dizaines de députés au Palais-Bourbon.
Dans un entretien au Figaro, le 14 mai, Nicolas Bay, qui dirigeait la campagne du FN pour les législatives, l'affirmait haut et fort : "Le 7 mai, Marine Le Pen a franchi la barre de 50% des voix dans 45 circonscriptions, dans lesquelles nous espérons l'emporter. Dans près de 70 autres, nous avons obtenu entre 45% et 50%. Là aussi, les perspectives de victoire existent (...). Ces scores laissent entrevoir une entrée massive des députés patriotes en juin."
Quel est le résultat obtenu ?
A l'issue du second tour des législatives, le Front national décroche finalement huit sièges à l'Assemblée. Un résultat éloigné des ambitions affichées il y a quelques semaines par le parti d'extrême droite, mais meilleur que les projections au soir du premier tour, qui donnaient un à cinq sièges pour le FN.
Il y a cinq ans, le parti de Marine Le Pen avait obtenu 13,6% des voix au niveau national, et obtenu deux sièges – ceux de Marion Maréchal-Le Pen, qui a décidé cette fois de ne pas se représenter dans la 3e circonscription du Vaucluse, et de Gilbert Collard, défié cette année dans sa circonscription du Gard par la macroniste et ancienne torera Marie Sara.
"Le résultat de la présidentielle et le débat raté d'entre-deux-tours a démobilisé l'électorat du FN", jugeait le politologue Jean-Yves Camus, spécialiste de l'extrême droite. L'électorat s'est visiblement remobilisé dans l'entre deux tours des législatives.
Comment a réagi le parti ?
Marine Le Pen s'est félicitée de ce résultat. "Je remercie les électeurs d'autant plus que l'absention a atteint de nouveaux records", a souligné la présidente du FN, dénonçant à nouveau le mode de scrutin majoritaire "antidémocratique" des législatives, qui nuit à la "représentativité" de l'Assemblée nationale. "Je le redemande ce soir, il est désormais vital pour notre démocratie d'instaurer la proportionnelle aux législatives", a-t-elle lancé.
Quels résultats pour les ténors du parti ?
Marine Le Pen va quitter le Parlement européen pour l'Assemblée nationale. La présidente du Front national a été élue députée de la 11e circonscription du Pas-de-Calais, avec 58,60% des voix face à la candidate de la La République en marche, Anne Roquet (41,40%). En 2007, son adversaire socialiste l'avait nettement battue au second tour. En 2012, il ne lui avait manqué que 118 voix.
Dans la 2e circonscription des Pyrénées-Orientales, Louis Aliot, également vice-président du FN, est parvenu à devenir député. Arrivé en tête du premier tour (30,80% des voix), il n'a pas pâti des reports des voix en faveur de son adversaire de La République en marche. Louis Aliot totalise 50,56% des suffrages, contre 49,44% pour Christine Espert.
Il faisait partie des deux députés FN à avoir fait leur entrée à l'Assemblée en 2012. Candidat à sa réélection, Gilbert Collard, arrivé en tête au premier tour dans la 2e circonscription du Gard avec 32,27% des voix, garde son siège. L'ancien avocat a obtenu 50,16% des voix, contre 49,84 % pour l'ancienne torera Marie Sara, la candidate de La République en marche, également soutenue par le PS.
Quel avenir pour le parti ?
Après avoir rêvé de créer la surprise lors de l'élection présidentielle, puis de faire entrer en masse des députés à l'Assemblée nationale, le Front national se prépare à affronter de profondes divisions internes. Le constat est résumé par le journal d'extrême droite Minute : "Vingt ans pourquoi ? Vingt ans de militantisme pour quoi faire ? Une scission, des purges, un changement de présidence, un parricide, la promotion de nouveaux dirigeants, des départs et des exclusions, des recrutements, et, surtout, un changement de ligne politique et de doctrine économique, pour quoi ? Pour rien !", s'est énervé cette semaine l'hebdomadaire, sans attendre les résultats du second tour.
Le parti entend bien régler ses comptes lors du prochain congrès, prévu pour début 2018. Mais rien ne dit que les digues tiennent jusque-là. Au centre de l'attention : Florian Philippot, tenu pour responsable de l'échec du FN par certains cadres du parti. Mi-mai, le numéro deux du Front national avait déjà menacé de quitter le FN si son parti reculait sur la sortie de l'euro. Des tensions accentuées, en pleine campagne des législatives, par la création – toujours par Florian Philippot – d'un mouvement baptisé "Les Patriotes". "Personne ne connaît réellement ses intentions, mais cette association ressemble fort à une piste d'atterrissage", note le politologue Jean-Yves Camus. Après le retrait temporaire de la vie politique de sa nièce Marion Maréchal-Le Pen, Marine Le Pen va donc devoir trancher pour mettre fin à la zizanie interne.
Par ailleurs, le FN va également devoir affronter la justice, notamment dans l'affaire du financement du parti, et dans celles des soupçons d'emplois fictifs des assistants parlementaires européens. Autant de raisons pour lesquelles le parti d'extrême droite risque de connaître de nombreuses turbulences dans les mois à venir.
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