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"Gilets jaunes" : des policiers seront jugés devant le tribunal correctionnel, assure le procureur de Paris

Rémy Heitz a accordé une interview au journal "Le Parisien" dans laquelle il revient sur le traitement judiciaire des violences policières lors des manifestations de "gilets jaunes". 

Article rédigé par franceinfo
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Rémy Heitz, le 5 mars 2019, à Condé-sur-Sarthe (Orne).  (JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP)

Six mois après le début du mouvement de "gilets jaunes", le procureur de Paris s'explique sur les accusations de complaisances vis-à-vis des policiers ayant commis des violences sur les manifestants. "Il n’y a aucune volonté de ma part d’éluder" ou de "minimiser" les violences policières, affirme Rémy Heitz dans une interview accordée au Parisien, jeudi 30 mai. Il promet que certaines procédures aboutiront à des procès "d'ici la fin de l'année".

D'après le procureur de Paris, 174 enquêtes visant des membres des forces de l'ordre ont été ouvertes : 171 ont été confiées à l’inspection générale de la police nationale (IGPN) et trois à l’inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN). "57 dossiers ont été clôturés et remis à mon parquet qui est en train de les analyser, affirme-t-il. Je peux d’ores et déjà vous dire que huit d’entre elles ont justifié l'ouverture d’une information judiciaire, c’est-à-dire que la poursuite des investigations est désormais confiée à des juges d'instruction."

"Aucun policier mis en examen"

"Il s'agit notamment des dossiers où les préjudices sont les plus lourds, avec des infirmités permanentes par exemple", détaille-t-il, citant l'affaire des "gilets jaunes" qui ont été passés à tabac par des CRS dans un Burger King ou le cas d'une des figures du mouvement, Jérôme Rodrigues, gravement blessé à l'œil lors d'une manifestation. "Plusieurs dossiers ont trait à l'usage de lanceurs de balle de défense (LBD)", précise Rémy Heitz

Le procureur de Paris précise qu'"à ce stade, aucun policier ou gendarme n’a été mis en examen". "Un policier a été placé en garde à vue dans une affaire où un manifestant a été blessé et hospitalisé, mais l’enquête est toujours en cours", précise-t-il. 

Cela témoigne-t-il d'un traitement judiciaire particulier pour les forces de l'ordre, en comparaison aux nombreux "gilets jaunes" qui ont été directement renvoyés devant la justice en comparution immédiate ? Interrogé sur ce point, Rémy Heitz évoque "la complexité des investigations". "Les forces de l’ordre peuvent avoir un recours légitime à la force, ce qui n’est pas le cas des manifestants venus pour commettre des violences ou des dégradations", explique-t-il.

Toutes ces procédures vont être analysées avec beaucoup d’attention. Il y aura des classements sans suite. Il y aura aussi des renvois de policiers devant le tribunal correctionnel d’ici la fin de l’année.

Rémy Heitz

au Parisien

Près de 3 000 "gilets jaunes" en garde à vue

Dans cette interview, le magistrat donne aussi des chiffres sur le nombre de "gilets jaunes" interpellés lors des manifestations parisiennes. Depuis le 17 novembre, 2 907 gardes à vue ont été enregistrées et, parmi elles, 1 304 ont donné lieu à un classement sans suite, soit presque la moitié des dossiers. 

Faut-il en conclure que les arrestations ont été trop massives, notamment celles menées avant même le début des manifestations à Paris ? "Je réfute totalement le terme entendu parfois de garde à vue préventive, affirme le procureur de Paris. Quand des manifestants ont été retrouvés en possession de gants coqués, nous avons cherché à vérifier si c’était bien par volonté d’en découdre avec les forces de l’ordre".

Si les éléments ne tenaient pas, les magistrats en ont tiré les conséquences. La moitié des classements se sont soldés par des rappels à la loi, preuve que ces gardes à vue n’étaient pas nécessairement dénuées de fondement.

Rémy Heitz

au Parisien

Au total, "1 357 personnes ont été déférées, dont 515 jugées en comparution immédiate", ajoute le procureur de Paris. Trente dossier ont été confiés à la police judiciaire. "Il s’agit des cas les plus graves et complexes : les agressions de forces de l’ordre, les pillages d’enseignes de luxe ou le saccage de l’Arc de Triomphe…", précise-t-il.

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