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Pornographie : "Cette école des violences sexistes doit cesser pour les femmes et pour les gens qui la regardent", exhorte la présidente du HCE

Sylvie Pierre-Brossolette parle de "torture" et de contrats "juridiquement nuls" à l'occasion de la publication du rapport du HCE sur la "pornocriminalité".
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Sylvie Pierre-Brossolette, présidente du Haut Conseil à l'Égalité entre les femmes et les hommes, le 27 septembre 2023 sur France Inter. (FRANCE INTER / RADIO FRANCE)

Cette "école du sexisme et des violences sexistes qu'est devenue la pornographie doit cesser pour les femmes, et pour les gens qui la regardent", exhorte mercredi 27 septembre sur France Inter Sylvie Pierre-Brossolette, présidente du Haut Conseil à l'Égalité entre les femmes et les hommes, à l'occasion de la publication du rapport du HCE sur la "pornocriminalité". Citant la procureure de la République de Paris Laure Beccuau, le HCE alerte sur la présence de "violence physique ou verbale" dans "90% des contenus pornographiques", ce qui les rend "pénalement répréhensibles".

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Pour la présidente du HCE, ces vidéos présentent des actes de "violence [qui ne sont] pas simulés". "Ce sont de vraies souffrances et de vraies femmes, ce n'est pas du montage", rappelle Sylvie Pierre-Brossolette. Elle évoque la présence dans certaines vidéos de plusieurs "pratiques illégales", d'actes de violence extrême, comme le "gang bang, quand plusieurs hommes pénètrent des femmes dans plusieurs orifices en même temps, déchirant ces orifices et laissant les femmes dans un état lamentable". Sylvie Pierre-Brossolette dénonce également "le prolapse, la descente d'organe" due à un anus ou vagin détruit après des pénétrations violentes. "C'est de la torture", alerte-t-elle. Le HCE estime par ailleurs que les "contrats de l'industrie pornographique sont nuls juridiquement". "On n'a pas le droit de contractualiser sur l'exploitation" du corps humain ni de "consentir à sa propre torture", explique Sylvie Pierre-Brossolette.

Une "impunité" face à de "puissants lobbys"

La présidente du Haut Conseil à l'Égalité considère donc qu'il "n'y a aucune raison de tolérer dans la France de 2023 ces illégalités qui font subir aux femmes des tortures insupportables et qui font voir à des mineurs ces spectacles".

"C'est la fabrique de futurs violeurs, de futurs auteurs de féminicide."

Sylvie Pierre-Brossolette, présidente du Haut Conseil à l'Égalité entre les femmes et les hommes

à franceinfo

Elle se demande "que font les pouvoirs publics" face à cette réalité, dénonçant même une certaine "impunité". Elle met en cause "les lobbys très puissants" de l'industrie pornographique, et notamment "des plateformes qui expliquent à longueur de temps [qu'il s'agit] de liberté de création, de liberté sexuelle et de cinéma". Or, la présidente du HCE insiste sur le fait que "la liberté sexuelle s'arrête là où les atteintes à l'intégrité du corps humain commencent".

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Dans son rapport, le HCE en appelle à l'État, réclamant une "politique pénale [qui] ait pour priorité la lutte contre la pornocriminalité et la poursuite des sites et plateformes dans l'illégalité". Le Haut Conseil à l'Égalité formule un certain nombre de propositions, notamment concernant Pharos, la plateforme du ministère de l'Intérieur. Le HCE préconise notamment "d'étendre le pouvoir de retrait et de blocage de Pharos". Actuellement, son action "sur la pédopornographique" est jugée par la présidente du HCE comme "insuffisante", car ayant "une conception trop restrictive des images pédopornographiques".

Sylvie Pierre-Brossolette plaide aussi pour étendre le pouvoir de retrait et de blocage de Pharos "aux atteintes à l'intégrité corporelle des personnes". Elle explique qu'une telle mesure sera "très facile" notamment grâce à "l'intelligence artificielle qui peut aider à sélectionner les séquences de violences et tortures, généralement annoncées par les mots-clés". "À ce moment-là, on demande aux hébergeurs de retirer ces séquences, s'ils ne le font pas parce qu'ils sont récalcitrants, on demande aux fournisseurs d'accès de couper", ajoute-t-elle. La présidente du HCE pointe également du doigt des manques dans le projet de loi sur le numérique : "Pour l'instant, on ne parle pas de la protection des femmes", s'inquiète-t-elle.

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