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Mariage des homosexuels autorisé chez les protestants : "On ne peut pas prendre la Bible au pied de la lettre"

Le pasteur Laurent Schlumberger, président de l'Eglise protestante unie de France, revient sur la décision de son Eglise d'autoriser la bénédiction des couples gays.

Article rédigé par Clément Parrot - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le pasteur Laurent Schlumberger, président de l'Eglise protestante unie de France (EPUdF), le 14 mai 2015 à Sète (Hérault), lors du synode de l'EPUdF. (PASCAL GUYOT / AFP)

L'Eglise protestante unie de France (EPUdF) a décidé de permettre aux couples homosexuels de recevoir une bénédiction s'ils le désirent. L'EPUdF a annoncé cette ouverture à la fin de son synode qui se tenait à Sète (Hérault), dimanche 17 mai. Si l'EPUdF est la principale Eglise protestante de l'Hexagone avec 110 000 membres actifs revendiqués, d'autres branches du protestantisme ne sont pas concernées.

D'ailleurs, depuis l'annonce de cette ouverture, l'EPUdF reçoit certaines critiques. Le Conseil national des évangéliques de France (Cnef) a notamment qualifié cette décision de "consternante". Francetv info revient sur cette initiative avec le président de l'EPUdF, le pasteur Laurent Schlumberger.

Francetv info : Pourquoi avez-vous choisi d'ouvrir la bénédiction de votre Eglise aux couples homosexuels ?

Laurent Schlumberger : Depuis longtemps, notre Eglise cherche à mieux partager ses convictions, en allant à la rencontre de nos contemporains. Il s'agit de prêter attention à ce qui se passe autour de nous dans la société. Ensuite, la réflexion sur cette question a été relancée il y a deux ans avec l'adoption de la loi Taubira et les débats autour du mariage pour tous. Nous nous sommes dit que, si certaines personnes venaient nous demander une bénédiction après s'être mariées en mairie, il nous fallait pouvoir apporter une réponse. Nous avons donc organisé un débat, pas sur l’homosexualité, mais sur la manière de répondre à ces demandes.

Comment cela va-t-il se dérouler au sein de votre Eglise ?

Un couple souhaitant une bénédiction pourra simplement aller voir le pasteur de sa paroisse pour en parler. Ensuite, ce sont les conseils presbytéraux (6 à 15 personnes élues par l’assemblée générale de la paroisse) qui décideront de répondre positivement ou non à cette demande. Ils ont la possibilité de refuser, car rendre les choses contraignantes n'est pas dans notre logique. L'EPUdF n'impose pas un magistère de haut en bas, mais fonctionne dans une logique de liberté et de responsabilité.

Concrètement, le mariage n'est pas un sacrement chez les protestants, donc il s'agit simplement de bénir une union civile. Comme pour les couples hétérosexuels, cette bénédiction pourra prendre des formes très libres en fonction du couple et de sa discussion avec le pasteur. Dans la forme, il n'y aura pas beaucoup de différence avec un mariage au sein de l'Eglise catholique. 

Les chrétiens qui s'opposent à une ouverture sur le mariage homosexuel avancent souvent que la Bible s'oppose à l'homosexualité. Que leur répondez-vous ?
 
De manière factuelle, quand on lit la Bible, on s'aperçoit qu'elle parle très peu d'homosexualité, mais qu'effectivement elle en parle toujours de manière négative. A l'inverse, le couple entre un homme et une femme est valorisé. Pour autant, est-ce que la Bible est un code de la route qu'il faut prendre au pied de la lettre ? Si c'est le cas, il faut rétablir l’esclavage ou la polygamie. Peut-on considérer les données de la Bible sur l’homosexualité comme immuables ou faut-il au contraire les lire dans leur contexte historique ? Tout le monde interprète la Bible, même ceux qui affirment ne pas le faire. 
 
Pensez-vous que l'EPUdF peut influencer les autres Eglises ?
 
Ce n’était pas notre intention, on ne s’est pas dit qu’on allait faire la leçon aux autres. Il est sûr que ce débat agite tout le monde, il suffit de voir la passion lors des débats autour de la loi Taubira. Notre position ne va sans doute pas obliger l'Eglise catholique à bouger, mais, comme le soulève l'éditorial du journal La Croix, cela va nécessairement entraîner une réflexion.

Nous allons par ailleurs poursuivre le dialogue avec les autres Eglises. Je vais leur écrire cette semaine pour leur donner le texte de notre décision et leur donner des clés d’interprétation afin d'éviter les incompréhensions.

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