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"On est traités par le mépris" : depuis des mois, le lycée Paul-Eluard de Saint-Denis prend l'eau

Une partie du personnel du lycée Paul-Eluard de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) exerce son droit de retrait depuis ce lundi. Couloirs inondés, murs gorgés d'eau... Ces professionnels dénoncent l'état de délabrement de leur établissement.
Article rédigé par Noémie Bonnin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Bureau d'une CPE dont le plafond s'est effondré (Capture écran issue du fil Twitter "Le lycée Paul Eluard prend l'eau")

Au retour des vacances de printemps, les personnels du lycée Paul-Eluard de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) découvrent les dégats. Il y a de l'eau partout, au sol, le long des murs et dans le plafond qui s'est écroulé sur le bureau de la conseillère principale d'éducation. "Cet effondrement de faux plafond est symbolique. Huit mois de travail ont été perdus. Je n'ai plus d'ordinateur, plus de téléphone, plus aucun document. C'était le moment dont il fallait se saisir", explique-t-elle. 

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Les personnels de cet établissement s'en sont saisis pour alerter sur l'état de leurs bâtiments, notamment par des photos et vidéos postées sur les réseaux sociaux. Un quart d'entre eux exerce aussi son droit de retrait depuis lundi 22 mai. Jeudi 25 mai, à 12h30, un rassemblement a lieu devant le siège de la région Ile-de-France, à Saint-Ouen, pour dénoncer l'état de délabrement de ce lycée. 

Un plafond qui s'effondre, des murs gorgés d'eau, des couloirs inondés, c'est l'état hallucinant de ce lycée à Saint-Denis, à quelques kilomètres seulement des chantiers de construction de sites ultra modernes des Jeux olympiques. Cela fait des mois que la situation se déteriore dans ce très gros lycée populaire de Seine-Saint-Denis, 2 000 élèves dont 60% sont boursiers.

Ces élèves ne pas sont rassurés de travailler dans ces conditions. "L'eau sort des murs, c'est impossible, décrit l'une d'entre elles. Quand on entend l'eau couler, on a très peur, on peut être en danger." "C'est parce qu'on est à Saint-Denis qu'on nous délaisse un peu", confie encore une élève.

Ce sentiment d'abandon est clairement partagé par l'une des professeures d'histoire géographie. "On est traités par le mépris", dit-elle. En plus de ces problèmes d'infiltration, l'enseignante dénonce un matériel informatique en piteux état et des radiateurs cassés qui obligent tout le monde à travailler avec manteau et couverture l'hiver. "Les conditions dans lesquelles on travaille nous rappellent tous les jours à quel point nos élèves et nous-mêmes sommes méprisés. On appuie sur des interrupteurs, on se prend une 'châtaigne'. C'est ça, la réalité de ce lycée : on arrive dans des salles de classe, on ne sait pas si on est en sécurité." 

190 établissements scolaires vêtustes en Ile-de-France en 2021

Des réparations d'urgence ont été promises par le Conseil régional d'Ile-de-France, tout comme un investissement de 40 millions d'euros de rénovation énergétique mais qui sera voté en juillet. Les travaux ne pourront pas commencer avant au moins un an. 

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L'état de délabrement de ce lycée n'est pas un cas isolé, notamment en Ile-de-France. Des problèmes récurrents sont signalés ailleurs en Seine-Saint-Denis, mais aussi dans le Val-de-Marne ou en Seine-et-Marne. La Cour régionale des comptes pointait en 2021 190 établissements vétustes et la rénovation était programmée pour seulement un quart d'entre eux.

"Sur le plan d'investissement, souligne Cyril Verlingue qui représente le syndicat Snes-FSU, la Région annonce cinq milliards d'euros. Le problème, c'est qu'entre les annonces et les réalisations, le compte n'y est pas. Pour l'instant, on est autour de seulement un milliard de dépenses effectivement réalisées alors qu'on est à la moitié du Plan prévisionnel d'investissement 2017-2027." La majorité de Valérie Pécresse, présidente de la Région Ile-de-France, défend son action et dénonce le retard pris par ses prédécesseurs socialistes.

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