Témoignage "Je ne venais plus en cours" : après le suicide d’un adolescent à Poissy, une ancienne élève du même lycée dénonce des faits de harcèlement

Devant l'ancien établissement de la victime, à Poissy dans les Yvelines, il y a de la stupéfaction et de la tristesse qui prédominent après l'annonce du suicide de l'adolescent de 15 ans.
Article rédigé par Benjamin Illy
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le lycée Adrienne-Bolland à Poissy dans les Yvelines, en août 2022. (CAPTURE ECRAN GOOGLE STREET VIEW)

"On nous a juste parlé d'un élève qui s'est fait harceler et qui potentiellement s'est suicidé à cause de ce harcèlement." Après le suicide de l'adolescent de 15 ans à Poissy dans les Yvelines, la nouvelle a rapidement fait le tour du lycée professionnel Adrienne-Bolland : la victime avait signalé des faits de harcèlement scolaire dans cet établissement où il était encore scolarisé en 3e prépa métiers, jusqu'en fin d'année scolaire, avant de rejoindre un autre établissement à Paris depuis cette rentrée.

>> Suicide d'un adolescent à Poissy : le ministre de l'Education nationale dénonce "un drame de trop" et annonce l'ouverture d'une enquête administrative

"On est tous choqués, tous les élèves ont été choqués, raconte un élève. On a appris la nouvelle et je pense qu'il fallait prendre la chose très au sérieux, parce qu'aujourd'hui, malheureusement, il ne pourra pas reprendre sa vie et c'est trop tard..." Deux jeunes filles glissent également l'avoir "croisé plusieurs fois à la récréation et dans les couloirs, souvent seul. J'entendais quelques petites histoires sur lui, mais rien de plus qu'il était triste."

Le ministre de l'Éducation a annoncé l'ouverture d'une enquête administrative sur les faits de harcèlements scolaires. Le père avait déposé une main courante pour harcèlement en avril. Le parquet de Versailles appelle à la prudence sur les raisons du passage à l'acte et a ouvert de son côté une enquête pour rechercher les causes de la mort.

D'autres faits de harcèlement ?

Gabriel Attal précise qu'il avait été signalé en décembre 2022. Des brimades, des injures répétées de la part de plusieurs élèves. En mars, les parents ont été reçus, les jeunes mis en cause également. Selon nos informations, ils sont d'ailleurs toujours scolarisés dans ce lycée. Courant avril, la famille de l'adolescent qui s'est donné la mort a adressé un courrier à la direction de l'établissement, dénonçant l'absence de mesures suffisantes. Gabriel Attal affirme que l'adolescent a bénéficié d'un suivi régulier de la conseillère principale d'éducation.

Luna, 16 ans, prévient sa mère et obtient son accord pour répondre à nos questions. Elle n'est plus élève dans ce lycée. "J'étais là l'année dernière, explique-t-elle. Maintenant, je suis en CAP petite enfance-alternance." Elle est venue ici avec un message : "Je voulais être là, parce que j'ai déjà eu un début de harcèlement ici. C’est-à-dire que quand je passais dans les couloirs, ça me disait : 'Oh il y a la pute qui est là ! Oh, la grosse ! Oh, elle est trop mal habillée ! Oh, elle pue !' J'étais mal, je ne venais plus au lycée. Je me rendais malade, je ne mangeais plus..."

"Je voulais parler pour ce garçon, parce qu'il est parti. Et il n'aura pas eu la chance d'avoir des enfants, d'avoir une grande vie, d'avoir un travail et il ne pourra pas être grand-père. Il ne pourra pas être tonton. N'harcelez pas les gens, laisser les tranquilles !"

Luna, ancienne élève du lycée d'Adrienne-Bolland

à franceinfo

En attendant que l'enquête administrative fasse toute la lumière, comme l'a promis le ministre de l'Éducation, une cellule d'écoute et d'aide psychologique est mise en place au lycée Adrienne-Bolland.

Le reportage franceinfo de Benjamin Illy

Si vous avez besoin d'aide, si vous êtes inquiet ou si vous êtes confronté au suicide d'un membre de votre entourage, il existe des services d'écoute anonymes. La ligne Suicide écoute est joignable 24h/24 et 7j/7 au 01 45 39 40 00. D'autres informations sont également disponibles sur le site du ministère des Solidarités et de la Santé.

Pour signaler toute situation de harcèlement ou de cyberharcèlement, que vous soyez victime ou témoin, il existe des numéros de téléphone gratuits, anonymes et confidentiels :   le 3020 (harcèlement à l'école) et le 3018 (cyberharcèlement), joignables du lundi au samedi, de 9 heures à 20 heures.   D'autres informations sont également disponibles sur le site du ministère de l'Éducation nationale.

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