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Vrai ou faux La vaccination multiplie-t-elle la charge virale par 251 en cas d'infection au variant Delta, comme l'affirme la députée Martine Wonner ?

L'ancienne élue LREM, farouchement opposée aux vaccins et au pass sanitaire, déforme en fait une étude de l'unité de recherche clinique de l'université d'Oxford située à Hô Chi Minh-Ville au Vietnam.

Article rédigé par franceinfo - Julien Nguyen Dang
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Une soignante prépare une dose de vaccin Pfizer-BioNTech contre le Covid-19 au Marigot (Martinique), le 30 août 2021. (ALAIN JOCARD / AFP)

Une dose de rappel pour les plus fragiles. Alors que les personnes de plus de 65 ans et celles présentant des comorbidités peuvent bénéficier d'une dose supplémentaire de vaccin contre le Covid-19 depuis le 30 août, la mobilisation contre la vaccination obligatoire de certains professionnels et le pass sanitaire se poursuit dans le pays. Farouche opposante aux vaccins contre le Covid-19, la députée du Bas-Rhin Martine Wonner était ainsi présente au sein du cortège strasbourgeois de la manifestation du 28 août, rapporte France Bleu.

La veille, l'élue non inscrite (ex-LREM) avançait de nouveau sur Twitter que les vaccins comportaient un danger, selon son interprétation d'une étude de la prestigieuse université d'Oxford. "Les hospitaliers au Vietnam vaccinés qui ont contracté le variant Delta ont une charge virale 251 fois supérieure [aux] non vaccinés", affirmait-elle. Et de conclure : "Les vaccinés sont de super propagateurs."

Une étude de l'unité de recherche clinique de l'université d'Oxford située à Hô Chi Minh-Ville au Vietnam s'est bien intéressée à la transmission du variant Delta au sein du personnel soignant d'un hôpital. Un variant en progression dans cet Etat du sud-est asiatique qui a poussé les autorités à confiner le pays avec l'appui de l'armée, rapporte Courrier international.

Le statut vaccinal n'entre pas en compte

Dans cette pré-publication de chercheurs destinée à la revue scientifique The Lancet et disponible en ligne* depuis le 10 août, l'équipe anglo-vietnamienne a identifié 69 cas d'infection au variant Delta parmi les 900 soignants de cet hôpital. La majorité a déclaré des symptômes, mais tous se sont remis de la maladie. Et tous avaient auparavant été vaccinés grâce au produit mis au point par AstraZeneca, un vaccin dont l'efficacité est reconnue contre les formes graves de la maladie provoquée par le variant Delta, mais qui reste limitée contre les autres formes symptomatiques, rendant donc possibles ces infections.

Un indicateur a particulièrement intéressé les chercheurs : la charge virale des personnes infectées. Autrement dit, la quantité de virus présent dans un échantillon prélevé dans le sang, la salive ou les autres sécrétions d'un patient et qui a des conséquences sur sa transmissibilité. Et le résultat est frappant : "Les charges virales des cas d'infection au variant Delta malgré la vaccination étaient 251 fois supérieures à celles des cas infectés par les anciennes souches détectées entre mars et avril 2020", exposent les auteurs de la pré-publication. Cela contredit les accusations de Martine Wonner, puisque ce n'est pas le statut vaccinal des personnes qui compte ici, mais la nature du virus. 

La faute au variant Delta, pas au vaccin

La députée semble reprendre une lecture erronée largement relayée par l'organisation antivaccin américaine Children's Health Defense* dirigée par le conspirationniste Robert F. Kennedy, qui a poussé les chercheurs à publier un communiqué* le 28 août. "Les différences de charge virale ont été entraînées par la capacité du variant Delta à induire des charges virales plus importantes, expliquent les trois représentants de l'équipe de recherche dans ce communiqué. Elles n'ont rien eu à voir avec le statut vaccinal des individus infectés".

C'est donc la nature du variant incriminé qui induirait cette quantité de virus plus élevée. Ce qui n'est pas une découverte. Plusieurs études ont montré que les patients infectés par le variant Delta présentaient en effet une charge virale bien plus importante que pour les formes initiales du Sars-CoV-2, le virus responsable du Covid-19, comme le révèle une recherche sud-coréenne, qui place ce ratio à 300, proche du chiffre donné par l'équipe anglo-vietnamienne, relate Reuters*. Une pré-publication chinoise* diffusée en juillet va quant à elle plus loin, identifiant une charge virale moyenne environ "1 000 fois supérieure" par rapport aux souches du Sars-Cov-2 décelées en 2019.

De quoi accroître la transmissibilité du virus entre les individus : une étude parue le 28 août dans la revue The Lancet Infectious Diseases juge ainsi le variant Delta 40% à 60% plus transmissible que le variant Alpha, qui avait émergé au Royaume-Uni à la fin de l'année 2020 et qui était déjà plus contagieux que la souche initiale. Interrogés par franceinfo, les chercheurs de l'université d'Oxford soulignent "que les preuves de l'efficacité des vaccins pour prévenir les formes sévères et les morts du Covid-19 sont accablantes". Et d'encourager le public à la vaccination, "un outil indispensable contre le Covid-19 et les terribles conséquences de la pandémie".

* Les liens signalés par un astérisque renvoient vers des articles en anglais.

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