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Covid-19 : la campagne de vaccination des enseignants en est encore au stade de brouillon

Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a annoncé que les premiers enseignants seraient vaccinés d'ici à la fin du mois d'avril, mais uniquement ceux qui travaillent en contact avec des enfants atteints de handicap. La réouverture des établissements scolaires est pourtant prévue le 26 avril.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Une enseignante donne un cours à des élèves de CE2 à Bruyères-le-Châtel (Essonne), en janvier 2021. (MYRIAM TIRLER / HANS LUCAS / AFP)

Les enseignants vont-ils pouvoir bénéficier de la vaccination contre le Covid-19 "courant avril", comme le souhaite Jean-Michel Blanquer ? En réalité, pas tous à la fois. Invité sur franceinfo, dimanche 4 avril, le ministre de l'Education nationale a introduit l'idée d'un ciblage progressif au sein de cette catégorie professionnelle. Seront d'abord concernés les professeurs et agents qui "s'occupent des enfants en situation de handicap", puis ceux qui travaillent avec des enfants de maternelle, qui ne portent pas de masque. Le reste des enseignants devrait être éligible par la suite, selon "un raisonnement par âge", avec pour objectif "souhaitable" de "faire ça au cours des deux prochains mois"… soit à la mi-juin, juste avant les vacances d'été.

Certes, le ministre de la Santé, Olivier Véran, avait déjà cité sur France Inter, le 1er avril, le cas des enseignants "au contact d'enfants atteints de handicap" dans les unités localisées pour l'inclusion scolaire (classes Ulis). Ce qui représente, au total, "entre 50 000 et 100 000 enseignants" à vacciner "le plus rapidement possible". Mais dimanche, Jean-Michel Blanquer a donc validé une mise en place de critères de priorité plus larges au sein du personnel éducatif. Ces règles sont toujours en cours d'élaboration, a ajouté le ministre de l'Education nationale, ce qui offre encore peu de lisibilité aux intéressés.

Un ordre de priorité qui reste à définir

De quoi surprendre les syndicats. "On découvre qu'il y a peut-être un ordre de priorité qui est en train d'être établi. Donc il faut absolument qu'on en discute", a réagi sur franceinfo Sophie Vénétitay, secrétaire générale adjointe du Snes-FSU. Les écoles sont surveillées de près durant cette épidémie. Avant leur fermeture pour plusieurs semaines, le 2 avril, l'AFP comptabilisait 11 272 classes fermées sur 528 400 (2,1%) sur l'ensemble du territoire, après identification d'au moins un cas de Covid-19. Le nombre de membres du personnel testés positifs était également en hausse, passant de 2 515 à 2 771 la semaine précédente.

Selon Sophie Vénétitay, après "l'échec" des fermetures d'établissements scolaires, il faut donc vacciner largement le personnel et les professeurs volontaires afin de ne "pas rater la réouverture" prévue le 26 avril. Cet objectif ne sera sans doute pas atteint. Lundi, sur TF1, Olivier Véran a précisé que seule la vaccination des enseignants "qui travaillent en lien avec des enfants atteints de handicap" débuterait à la fin du mois d'avril. En attendant, ici et là, des initiatives locales ont été lancées. Fin mars, à Paris, les six maires d'arrondissement LR ont mis en place un système qui permet aux enseignants ayant une comorbidité de bénéficier de doses non utilisées. 

Patience, voilà donc le mot d'ordre dans les établissements scolaires. Le 31 mars, l'allocution d'Emmanuel Macron avait pourtant suscité quelques espoirs parmi les enseignants. Le président avait évoqué une "stratégie spécifique" pour "toutes les professions les plus exposées" – sans autre détail sur un ordre de priorité. Quelques jours plus tôt, à Valenciennes (Nord), il avait également déclaré qu'à "partir de la mi-fin avril", la France allait recevoir de plus en plus de vaccins, et qu'il serait alors envisageable "d'avoir des campagnes ciblées" sur plusieurs publics, dont les enseignants. Sans préciser, là non plus, d'ordre de passage pour les professionnels concernés.

Des livraisons de vaccins qui devraient augmenter

Cette approche graduée est fréquente dans les autres pays européens qui ont déjà ouvert la vaccination aux enseignants, recensés récemment dans un rapport de l'OCDE (en PDF) consacré à l'enseignement. Les enseignants éligibles sont parfois déterminés en fonction de critères d'âge (Autriche, Allemagne, République tchèque ou Lettonie) ou en fonction du niveau ou de la nature des classes concernées (Allemagne, Lettonie, Pologne, Portugal, Slovénie ou Espagne). A ce stade, souligne l'OCDE, "la quantité limitée des livraisons et les enjeux de santé publique concurrents" ne facilitent pas le choix des publics prioritaires.

L'augmentation des livraisons pourrait-elle permettre de rebattre les cartes ? Au total, plus de 12 millions de doses de vaccin sont attendues en avril, selon Alain Fischer, le président du Conseil d'orientation de la stratégie vaccinale. De nombreux responsables politiques y voient l'occasion de monter en régime pour soulager la pression épidémique dans les écoles. Dans une tribune parue dans Le JDD, le maire de Saint-Denis, Mathieu Hanotin, et le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, estiment notamment que "les dotations de doses pour le [vaccinodrome du] Stade de France en avril peuvent permettre d'accueillir les professionnels" volontaires.

La France compte 1,2 million d'enseignants et d'agents de l'Education nationale. Une petite partie, qui reste à évaluer, a pu bénéficier du vaccin car elle répondait aux critères des règles communes (comorbidités…). Mais le défi logistique reste immense, avec l'ouverture de la vaccination aux plus de 60 ans, à la mi-avril, sans compter l'ouverture de la campagne aux forces de l'ordre, également prévue à la fin du mois. La France attend près de 3 millions de doses la semaine du 5 avril, avec une montée en régime progressive. Un peu tard, toutefois, pour éviter la fermeture des écoles.

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