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"Notre plus jeune patient Covid a 32 ans, sans comorbidités"  : dans les services de réanimation, les soignants constatent la baisse de l'âge des malades

Alors que la barre des 1 000 patients français en réanimation a été de nouveau franchie jeudi, les services de soins critiques voient arriver des patients plus jeunes et moins vaccinés.

Article rédigé par franceinfo, Solène Leroux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le service de réanimation de l'hôpital de Perpignan (Pyrénées-Orientales), le 26 janvier 2021. (ARNAUD LE VU / HANS LUCAS / AFP)

La quatrième vague est bien là. Au 29 juillet, la France a enregistré 25 190 cas confirmés de Covid-19, contre 21 909 la semaine précédente. Et selon une publication de la Drees mise en ligne le 30 juillet, les "non-vaccinés représentent près de 85% des entrées hospitalières". Une étude qui renforce le sentiment des équipes soignantes contactées par franceinfo, qui décrivent une évolution du profil des patients. "Les gens hospitalisés chez nous ne sont pas vaccinés et la moyenne d'âge est inférieure à 60 ans, affirme ainsi une soignante de l'hôpital de Perpignan (Pyrénées-Orientales). Certains ont même la vingtaine."

Sur la cinquantaine de patients atteints du Covid-19 hospitalisés dans ce centre hospitalier fin juillet, treize se trouvaient vendredi en réanimation. La situation est particulièrement tendue dans ce département : le taux d'incidence, l'un des plus hauts de France métropolitaine, s'y établit à 625 pour 100 000 habitants au 27 juillet. Au sein de l'hôpital de Perpignan, les équipes soignantes font face à une forte hausse des hospitalisations sur les sept derniers jours et un secteur de 10 lits supplémentaires a ouvert, vendredi 30 juillet.

Des patients obèses ou immuno-déprimés

Au CHU d'Angers (Maine-et-Loire), même constat. Le dernier patient arrivé mi-juillet a été infecté par le variant Delta. "Il a plus de 70 ans et n'est pas vacciné", explique Alain Mercat, chef du service réanimation au CHU d'Angers. Six patients y sont actuellement en réanimation, dont cinq Covid longs présents depuis la troisième vague.

Sur l'ensemble des Pays de la Loire, la situation est disparate. Dans les départements côtiers de la Vendée et de la Loire-Atlantique, les mouvements dans les services sont plus importants "en raison des mutations estivales", détaille le professeur. Les hôpitaux voient arriver des patients âgés de 40 à 65 ans majoritairement non vaccinés, souvent immuno-déprimés ou souffrant d'obésité. "Il y a quelques vaccinés dont la réponse immunitaire est moins performante, comme des personnes ayant eu des cancers." A ce stade, le médecin angevin espère toutefois que la "quatrième vague, qui a commencé, ne sera qu'une vaguelette dans les services de réanimation".

A l'hôpital Saint-Antoine à Paris, "ça monte à nouveau très progressivement depuis quelques jours, décrit Bertrand Guidet, chef du service réanimation, alors que début juillet il n'y avait plus de malades." Cinq malades sont actuellement en réanimation, sur un total de neuf lits. Les capacités d'occupation peuvent être poussées jusqu'à 30 lits en réanimation, chose qui a été faite en avril dernier, au plus fort de la troisième vague.

"L'immense majorité des nouveaux patients sont des non-vaccinés. Sinon, ce sont des personnes vaccinées qui ont mal répondu à la vaccination, comme des personnes immuno-déprimées, ou encore des primo-vaccinés."

Bertrand Guidet, chef du service réanimation à l'hôpital Saint-Antoine, à Paris

à franceinfo

Là encore, les médecins constatent cette tendance à la baisse de l'âge des patients Covid hospitalisés. "Notre plus jeune patient a 32 ans, sans comorbidités, et les plus vieux ont moins de 70 ans", rapporte encore Bertrand Guidet. A son sens, c'est la preuve que la vaccination, "quoique encore imparfaite", est efficace.

Des soignants lassés et "écœurés"

Pour l'instant, le professeur note "une dissociation entre le taux de contamination actuel et les hospitalisations", de quoi lui faire dire que la hausse du nombre de cas de Covid-19 n'a pas encore atteint l'hôpital. Et même s'il se prépare à l'arrivée de la quatrième vague, il compte bien préserver le personnel. 

"On n'imagine pas rappeler les soignants pendant leurs congés : ils ont tellement donné pendant des mois, ce n'est pas possible."

Bertrand Guidet

à franceinfo

Malgré l'épuisement, toutes les équipes se préparent à vivre un été difficile. Véronique est infirmière en réanimation à Marseille (Bouches-du-Rhône) depuis deux ans et demi. "Je suis à bout. J'adore mon métier, mais nerveusement on ne va plus tenir longtemps." A l'hôpital Nord, où elle exerce, le rythme des admissions n'est jamais vraiment redescendu : "Après la réouverture des bars et restaurants, on a eu quelques semaines tranquilles, puis on est revenu à une à deux admissions Covid-19 en réanimation par semaine".

La soignante perçoit une différence avec l'été 2020, puisque 13 personnes occupent des lits en réanimation aujourd'hui, "contre une personne à la même période l'année dernière". Le plus jeune de ses patients, obèse et non vacciné, a 21 ans ; le plus âgé n'a que 63 ans. D'après ce qu'elle observe, la majorité des personnes hospitalisées a entre 40 et 50 ans. Lors de la deuxième vague à l'automne 2020, l'âge moyen des personnes hospitalisées en France était de 75 ans.

"On est écœurés de voir arriver des patients qui ne voulaient pas se faire vacciner, ou qui ont préféré attendre."

Véronique, infirmière en réanimation à l'hôpital Nord de Marseille

à franceinfo

Le 28 juillet, le service de réanimation de l'hôpital Nord a commencé une réorganisation, pour permettre une réouverture de lits supplémentaires en août. "Cette quatrième vague, on la redoute vraiment", s'inquiète Véronique.

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