"Il va falloir que tout le monde s’y habitue" : face au coronavirus, de nouvelles contraintes imposées aux skippers
Avec le déconfinement, les navigateurs professionnels, notamment ceux qui préparent le prochain Vendée Globe, le tour du monde en solitaire et sans escales, retrouvent la mer mais sous conditions. Les nouvelles contraintes sanitaires imposent des règles plus strictes.
C’est un ballet devenu familier sur la base sous-marine de Lorient, qui abrite de très nombreuses écuries de course au large. Les grues remettent à l’eau les bateaux les uns après les autres, des monocoques qui ont passé deux mois de plus que prévu dans leur hangar à cause du confinement. "Je suis ravi de pouvoir retourner naviguer", se félicite Thomas Ruyant (Linked Out), dont le bateau vient enfin de toucher l’eau avec deux mois de retard sur le calendrier prévu. Comme tous les membres de son équipe autour de lui, le navigateur originaire de Dunkerque porte un masque. C’est devenu la norme : "On est tous là avec des masques, on fait gaffe. Sur le bateau, on sera quatre pour naviguer et non plus sept ou huit. Il va falloir revoir la priorité de nos dossiers."
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Tous masqués, skippers et les techniciens. Dans les bureaux, à l’intérieur des immenses hangars, sur les pontons ou à bord des bateaux. Mais là, ça devient plus compliqué, comme le détaille Jérémie Beyou, l’un des grands favoris du prochain Vendée Globe. "Là, on est quatre à l’intérieur du cockpit, cinq avec vous. Ça doit faire 4-5 m², on n’est pas vraiment dans les standards de distanciation", affirme-t-il. "Néanmoins, tout le monde porte son masque, nous avons installé des bouteilles de gel hydroalcoolique, nous avons des lingettes désinfectantes notamment pour les manivelles qui servent à monter et descendre les voiles. On est plusieurs à les toucher sans gants."
Comme dans les autres écuries de course, un nouveau protocole a été mis en place chez Charal Sailing Team qui compte une quinzaine de personnes. "On a testé tout le personnel qui va naviguer, explique le directeur de la structure, Vincent Beyou. On a fait un test la semaine dernière qui s’est révélé négatif pour tout le monde. On va prendre la température de tous ceux qui vont naviguer dans les prochains jours, afin de s’assurer qu’ils peuvent tous être en proximité dans un univers un peu confiné comme peut l’être un bateau."
Prendre le moins de risques possible
Les habitudes des marins vont changer, dans un sport où l’on navigue en solitaire mais où l'on travaille en équipe, et où le contact avec le public est fréquent. Nicolas Troussel (Corum L’Epargne) est l’un des participants du prochain Vendée Globe. "Pour ma part, j’évite d’aller voir trop de gens et de rencontrer trop de personnes, en dehors de l’équipe, pour pouvoir prendre le moins de risques possible. J’évite toutes les sorties annexes." Malgré ces contraintes, Nicolas Troussel est un navigateur heureux : son bateau devait sortir de chantier le 21 mars, cinq jours après le confinement. "On était tous très impatients de voir ce beau bateau flotter.", poursuit-il.
C’est maintenant un vrai soulagement. On s’est forcés à s’adapter au mieux à la situation.
Nicolas Trousselà franceinfo
"C’est sûr qu’on aurait préféré avoir deux mois de plus, je ne vais pas le cacher, mais on sera prêt pour les échéances de cette année, poursuit-il. Je suis serein sur la manière de faire le travail."
Test et mise à l'isolement avant le départ
Les départs de course seront eux-aussi chamboulés. La prochaine sur le calendrier, c’est la Vendée - Arctique - les Sables d’Olonne, une grande boucle entre la France, l’Islande et les Açores dont le départ devrait être donné le 4 juillet prochain, avec des conditions sanitaires inédites. Les concurrents devront se soumettre à un test sérologique et seront mis à l’isolement cinq jours avant le départ. Un comble pour des coureurs en solitaire. "Ça fait un peu beaucoup, s’amuse Jérémie Beyou. Il faut qu’on réfléchisse comment gérer ça par rapport à la famille. C’est pour les proches que ce sera le plus dur. Honnêtement pour nous, une semaine avant les courses, on est déjà dans notre bulle et déjà isolés psychologiquement. On est dans des nouvelles contraintes et il va falloir que tout le monde s’y habitue."
Au final, les skippers n’ont qu’une hâte : se retrouver seul au large, loin de tout et du virus !
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