Coronavirus : pour les prêts aux entreprises, il faut "des normes objectives", plaide l'Association française des usagers des banques
"Ce à quoi nous assistons, c'est au bon vouloir, c'est-à-dire au cas par cas, selon les relations entre l'entreprise et son financier, sa banque.", regrette Serge Maître, le président de l'AFUB.
C'est l'une des mesures phares pour aider les entreprises face à la baisse d'activité liée au confinement : l'Etat s'est engagé à garantir jusqu'à 300 milliards d'euros de prêts bancaires aux entreprises. Depuis trois semaines, 290 000 entreprises ont fait des demandes dans ce sens, 55 milliards d'euros ont été prêtés, mais, selon une enquête de la cellule investigation de Radio France, certaines banques traînent les pieds. "Il faudrait que le gouvernement mette des normes dans l'octroi du crédit et ne le laisse pas à l'arbitraire de la banque", estime Serge Maître, le président de l’AFUB, l'Association française des usagers des banques.
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franceinfo : Cela veut-il dire que les banques ne jouent pas toujours le jeu ?
Serge Maître : Les témoignages dont nous sommes saisis illustrent tout à fait le fait que cela ne marche pas comme le prévoyait le gouvernement. Il avait prévu 300 milliards à débourser, on en est très loin. En fait, cela met sous les projecteurs la faiblesse du système. L'octroi du crédit est laissé à la liberté de la banque. C'est un crédit, on considère qu'elle seule sera le garant de l'opération, si vous voulez, de sa légitimité financière. Deuxièmement, le taux d'intérêt doit être sans marge, c'est-à-dire couvrant les frais, c'est tout. Ce sont deux mécanismes qui concourent à la résistance à laquelle on assiste aujourd'hui, qui n'est exceptionnelle. C'est cela qui nous effraye.
Que faudrait-il selon vous? Des prêts qui soient sans condition ?
Il faudrait que le gouvernement mette des normes dans l'octroi du crédit et ne le laisse pas à l'arbitraire de la banque. Ce à quoi nous assistons, c'est au bon vouloir, c'est-à-dire au cas par cas, selon les relations entre l'entreprise et son financier, sa banque. Il faut que le gouvernement ne se voile pas la face, ne joue pas les trois singes de la sagesse : je n'entends rien, je ne dis rien et je ne vois rien. Qu'il s'engage en disant que lorsque nous avons deux bilans qui sont positifs, il n'y a pas de raison qu'on vienne à refuser. Quand la banque nous dit qu'au bout d'un an, il va falloir rembourser, ce n'est pas vrai : dans les textes, il y a jusqu'à six ans pour le remboursement. Donc les risques d'insolvabilité sont quand même fort mesurés.
Vous attendez du gouvernement qu'il hausse le ton ?
Je demande un geste fort complémentaire auprès des banques, on sait très bien que le gouvernement peut les convaincre par différentes mesures. S'il s'en trouve incapable, qu'il pose des normes objectives. Parce que sinon, que fait-on ? Pour toutes les entreprises qui sont confrontées à cette situation, nous leur disons que l'étage du dessus, c'est le médiateur du crédit : c'est mis en place par l'Etat depuis plusieurs années, afin que celui-ci mette les pieds dans le plat. Mais ce n'est pas toujours évident, nous avons des dossiers qui ont eu l'aval du médiateur du crédit, et concrètement, les banques continuent de refuser.
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