Au Kenya, la lutte contre l’invasion de criquets pèlerins remise en cause par le coronavirus
Depuis cinq mois les Kenyans luttent contre cet insecte, qui menace la sécurité alimentaire, mais la pandémie de Covid-19 risque d'aggraver la situation.
La lutte contre le coronavirus au Kenya pourrait nuire aux efforts nécessaires contre un autre fléau : l'invasion des criquets pélerins. Ces insectes dévorent des centaines de milliers d’hectares de cultures depuis décembre dernier dans ce pays d’Afrique, provoquant une crise alimentaire dramatique.
Cela fait cinq mois que les Kenyans tentent d'en venir à bout et la pandémie de Covid-19 pourrait mettre ces efforts à mal. En tout cas, le coronavirus est un facteur aggravant. Seul moyen pour combattre les criquets pèlerins : les insecticides. Mais avec la fermeture des frontières dans plusieurs pays à la suite de la pandémie, l’approvisionnement devient compliqué.
Il n’y a pas encore de rupture de stock mais les réserves sont au plus bas. Or, aujourd’hui, la région fait face à une deuxième vague de criquets annoncée 20 fois plus importante que la précédente. C’est une course contre la montre car c’est le moment où les paysans vont planter et il faut absolument protéger ces nouvelles cultures.
Des milliards de milliards de criquets
Les criquets pélerins sont présents depuis des semaines dans la grande région de la Corne de l’Afrique. Mais trois pays sont particulièrement touchés : le Kenya, l’Ethiopie et la Somalie. Cette invasion de criquets s’explique par deux facteurs, la chaleur couplée aux fortes pluies de la fin de l’année dernière jusqu’à février. Des pluies totalement inattendues à cette époque, censée correspondre à la saison sèche.
Pour se reproduire, les criquets ont besoin d’un sol meuble, sablonneux dans lequel les femelles peuvent déposer leurs œufs. Les pluies ont rendu ce sol pénétrable. Et les criquets ont pu se démultiplier par 20 tous les trois mois. Aujourd’hui, ils se déplacent par milliards de milliards.
Une menace pour les récoltes et les élevages
Les criquets pourraient faire basculer jusqu’à 5 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire. "Nous sommes au début de la saison agricole et un essaim qui se pose sur ce genre de production va engendrer des dégâts irréversibles", explique Cyril Ferrand, coordinateur des programmes de résilience en Afrique de l’Est pour la FAO (l’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture).
"Ces populations, sur les zones qui auront été touchées, n’auront pas de récolte au mois de juin. Cela concerne les populations d’agriculteurs, mais on a également les populations pastorales ou agro-pastorales, qui elles, vont avoir des dommages importants sur toutes les zones de pâturages, poursuit Cyril Ferrand. Et moins de fourrage, cela veut dire moins de lait et potentiellement une crise également nutritionnelle, notamment pour les jeunes enfants de moins de 5 ans".
Le bilan humain sera sans doute bien plus lourd que sera celui du Covid-19 dans la région. Or, ce que redoute la FAO c'est que la crise économique engendrée par la pandémie ne vienne assécher les fonds supplémentaires qu'il faudrait pourtant mobiliser sur la deuxième moitié de l'année pour lutter contre les criquets.
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