Birmanie : la junte militaire veut relancer le tourisme pour renouveler ses stocks d’armes
Sur les sites internet des agences de tourisme, chargés d’assurer la promotion, on peut lire ce type de message : "Ayant surmonté de nombreux soubresauts politiques, la Birmanie est désormais avide de dévoiler tous ses charmes." L’agence de tourisme ajoute même que le pays a désormais renoué des relations cordiales avec la plupart des nations du monde. "C’est vraiment le moment de se laisser tenter !", assure l’agence.
Le tourisme est reparti à la hausse : près de 370 000 visas ont été accordés sur les douze derniers mois. Et des liens touristiques ont été rebâtis à la faveur de conférences données dans des hôtels cinq étoiles de la capitale Naypyidaw. La semaine dernière, par exemple, une visite de familiarisation était offerte à des agences de voyages en provenance de Russie. Donc lorsque vous lisez "relations renouées avec la plupart des pays du monde", il s’agit principalement de la Russie, de l’Inde, du Moyen-Orient et de la Chine. Même si l’on vient d’apprendre ce mardi matin que Pékin exprimait son "vif mécontentement", après avoir appris la mort de plusieurs ressortissants en marge des violents combats se déroulant au nord de la BirmanieC
Les avoirs des banques birmanes gelés
La Birmanie est très loin d’avoir retrouvé une stabilité et la junte cherche toujours à écraser les nombreux mouvements de résistance. Le pays compte plusieurs milliers de morts et 1,5 million de déplacés depuis février 2021 et le putsch contre le gouvernement d’Aung San Suu Kyi. Le pouvoir militaire a rapidement pris le contrôle des grands axes et des villes mais il ne maîtrise absolument pas les campagnes. L’état d’urgence a été reconduit pour six mois fin juillet. Les militaires sont en train d’essuyer de sérieux revers au nord et s’enlisent à l’est, dans la province de Kayah, face aux groupes armés du commandant Maui, qui résistent aux bombardements intensifs.
"Les frappes aériennes sont une des méthodes les plus brutales contre lesquelles nous ne pouvons pas nous battre. Tous les jours les civils, notre peuple, s’inquiètent de ces frappes. Elles ne sont pas ciblées, elles touchent les écoles, les hôpitaux, les villages. Des gens meurent ici, il n’y a pas qu’à Gaza, en Israël ou en Ukraine… Ne nous oubliez pas", déclarait-il.
C’est précisément à combattre les résistants que doit servir la relance du tourisme. La junte manque de devises étrangères. Les sanctions américaines et européennes ont gelé les avoirs des banques birmanes. Les militaires ont d’abord ponctionné les revenus des travailleurs expatriés. Mais ils comptent maintenant sur l’argent des voyageurs pour renouveler leur stock d’armement et de munitions. Peut-être faut-il penser à cela, si l’envie vous prend d’aller un jour "découvrir ce pays mosaïque, ses sites inoubliables et ses modes de vie ancestraux", comme le dit l’agence de tourisme.
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