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Accident de train en Grèce : après le drame, la colère contre un réseau ferroviaire vétuste

Trois jours après l'accident de train qui a fait près de 60 morts près de la ville de Larissa, les manifestations se multiplient. Les cheminots seront de nouveau en grève vendredi 3 mars. Le gouvernement est jugé responsable de la tragédie.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Manifestation devant les bureaux de la compagnie ferroviaire hellénique à Athènes (Grèce), le 02 mars 2023. (SOCRATES BALTAGIANNIS / ANADOLU AGENCY via AFP)

Jeudi 2 mars alors que les secours continuaient d'extraire des corps des wagons enchevêtrés et carbonisés sur les lieux de l'accident, des rassemblements ont lieu à Athènes et Thessalonique, émaillés de jets de cocktails molotov et de pierre contre les forces de l'ordre. Le chef de gare de Larissa admet avoir commis une "erreur" en laissant deux trains circuler sur la même voie, pendant une dizaine de minutes.

>> Grèce : ce que l'on sait de la collision entre deux trains qui a fait au moins 57 morts

"Ce n'est pas une erreur, mais un crime", écrit le Journal des rédacteurs (ancré à gauche), qui pointe avant tout l'incapacité du gouvernement à avoir enclenché la modernisation du réseau.

Depuis trois jours les Grecs découvrent avec stupeur qu'au sein de la société des chemins de fer, tout le monde savait que la ligne où s'est produit l'accident souffrait de graves dysfonctionnements en matière de sécurité. Un système électronique en panne, des feux de circulation qui ne fonctionnaient pas et une signalisation entièrement manuelle depuis quasiment 20 ans, comme dans d'autres régions... Il y a trois semaines, après deux collisions sans gravité, un syndicat avait alerté les salariés : "N'attendons pas l'accident pour voir les responsables verser des larmes de crocodile. Qu'attendent-ils pour intervenir ?"

"Une autocritique complète"

Aujourd'hui, le gouvernement n'a pas d'autre choix que de faire son mea culpa. Le ministre des Transports parle d'une "autocritique complète du système politique et de l'État". Malgré tout, les autorités ne sont pas prêtes à endosser seules la responsabilité de l'indigence structurelle du réseau ferroviaire et plus largement des services publics.

"Bien sûr il aurait fallu agir ces dernières années" dit Zoe Rapti, la vice-ministre de la Santé interrogée par la BBC. "Mais vous vous souvenez aussi que la Grèce a souffert pendant dix ans d'une grave crise économique. Ce qui veut dire que beaucoup de choses ont reculé ou n'ont pas pu se faire", a-t-elle plaidé.

C'est d'ailleurs dans le cadre de son plan de sauvetage, pour pouvoir bénéficier des financements internationaux qu'en 2017 la Grèce a du vendre son opérateur ferroviaire à une compagnie italienne qui cristallise aujourd'hui les critiques, pour son manque d'investissements. Sur les lieux de l'accident, des habitants ont défilé avec des pancartes : "La privatisation tue".

Devant la cour de justice européenne

Et les aides européennes ? Le quotidien de gauche Efsyn rappelle que "l'Union européenne a versé des centaines de millions" d’euros à la Grèce pour sécuriser ses lignes, mais que personne n'en a vu la couleur.

La vidéo reprise par cet internaute montre un passage à niveau de la ville d'Amyndeon : le train passe alors que les barrières sont levées. "Les habitants le savent... Mais les autres ? Nous vivons par miracle dans ce pays".

Il y a 15 jours, Bruxelles a même saisi la Cour de justice de l’Union européenne parce qu'Athènes n'a toujours pas signé un accord essentiel avec le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, un texte censé définir le cadre de financement pour la modernisation et l’entretien des voies. Les Grecs demandent une enquête pour mettre noir sur blanc les noms des responsables.

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