Qui est Manès Nadel, l’un des plus jeunes visages révélés par la mobilisation contre la réforme des retraites ?
C’est un petit brun au visage très jeune. À 15 ans - il est né en 2007 - certains prédisent déjà à Manès Nadel un destin à la Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT. Notamment depuis son passage sur BFMTV fin janvier 2023, dans le cadre du mouvement d'opposition à la réforme des retraites, visionné par plus d’1,5 million d’internautes.
En seconde au lycée Buffon à Paris, dans le quartier de Montparnasse, Manès Nadel est le leader pour toute la capitale du syndicat La Voix lycéenne. Dans les manifestations, on le trouve derrière le carré de tête, dans le cortège de jeunesse, qui regroupe les différents mouvements lycéens et étudiants.
Un engagement politique né de la crise climatique
La huitième journée de mobilisation contre le projet du gouvernement, ce mercredi 15 mars, a commencé très tôt pour l'adolescent, avec le blocage toute la matinée du lycée Gaston Bachelard de Chelles, en Seine-et-Marne. Poubelles et chaîne humaine de quelques dizaines de personnes. Parce qu’au-delà des retraites, ces lycéens ont une revendication forte et immédiate : reporter le bac, dont les épreuves de spécialité commencent le 20 mars.
Même s’il est déjà très mobilisé, l’engagement syndical de Manès Nadel est très récent. Pour lui, tout démarre au début de cette année de seconde. Quatrième d’une fratrie de cinq, il est le seul engagé, même si ses frères et sœurs le soutiennent. Son père, professeur d’économie, et sa mère, dans la fonction publique, le soutiennent aussi mais ne sont pas particulièrement engagés, ni en politique ni syndicalement. Pour Manès, le déclencheur, comme pour une grande partie de sa génération, a été le climat.
"À titre personnel, ce qui a déclenché mon engagement, le déclic, ça a été la crise climatique, qui va s'accompagner d'une crise sociale."
Manès Nadel, lycéen syndiquéà franceinfo
"Pour nous, défendre les services publics, la Sécurité sociale, les retraites et notre modèle social, c'est défendre une protection des plus pauvres", raconte le jeune leader syndical à franceinfo. "Notamment quand il va y avoir le réchauffement climatique qui va aussi les frapper en premier. À ce moment-là, il faudra des services publics forts. Et quand on se bat contre des régressions sociales, on se bat pour ça aussi."
Lutter contre la réforme des retraites, mais pas que
Parmi ses autres passions, un peu de guitare. Si on lui parle d’études et de métier, il parle de sociologie. Mais sa retraite à lui ? Ça l’agace un peu qu’on lui en parle de cette façon. D’une part parce qu’il se bat aussi, dit-il, pour les autres générations, celle de ses parents notamment. Mais surtout, il tient beaucoup à démontrer que du haut de ses 15 ans, lui et ses camarades de La Voix lycéenne ont réellement travaillé le sujet. "On ne dit pas des trucs après avoir entendu les adultes de gauche, en se disant 'tiens, on est d'accord'. On a un travail très profond. On a eu un congrès récemment avec des interventions d'économistes, dont Henri Sterdyniak", co-auteur du Manifeste d'économistes atterrés.
"Plein de scientifiques nous disent qu'il n'y a pas de problème de financement des retraites, qu'il n'y a pas d'enjeu structurel. Ok, avant il y avait trois retraités pour un actif, et maintenant c'est peut-être un ou deux pour un actif. Mais la productivité a été multipliée par trois!", affirme Manès Nadel.
"Il faut répartir les richesses !"
Manès Nadel, lycéen syndiquéà franceinfo
Autant dire que malgré l'accord trouvé ce mercredi 15 mars en commission mixte paritaire sur la réforme des retraites, et un possible vote positif du Parlement jeudi 16 mars, il faudra selon lui que la rue reste mobilisée. Manès Nadel a d’ailleurs une idée assez précise aussi sur l’action syndicale elle-même. Les erreurs à ne pas reproduire selon lui : la désunion. L'adolescent n’a pas de mentor, de modèle particulier. Il échange beaucoup avec Hugo Prevost, le secrétaire national du syndicat étudiant L'Alternative.
Très suivi sur les réseaux sociaux
La notoriété de Manès Nadel a en tout cas bondi en flèche en quelques semaines. 14 600 followers sur Twitter, grâce notamment à un vrai talent de communicant et pas mal d’aplomb. Il y a quelques semaines, sur un plateau de télé, il a répondu au député Renaissance de l'Oise Éric Woerth, qui le prenait un peu de haut.
Mais si Manès Nadel est malin, il va toutefois devoir apprendre à être prudent. Récemment, une équipe vidéo du Parisien l’a suivi pour un reportage un matin de manifestation, pendant lequel il s’est mis à siffloter L'Internationale. La séquence était parfaite en télé. L’ennui pour lui, c’est qu’il avait manifestement oublié qu’il portait un micro cravate, et que la caméra a capté ce petit agacement à la fin : "On n'a pas une minute pour soi ! À un moment, j'ai sifflé L'Internationale et elle a tout de suite dégainé sa caméra". Règle n°1 : toujours s’assurer que la caméra ne tourne plus avant de reprendre la parole.
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