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Histoires d'info. Petite histoire des peurs alimentaires

Les hommes ont toujours eu peur de mourir empoisonnés. Les peurs alimentaires, c’est une histoire ancienne. 

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Fin juin 2017, le distributeur Auchan avait dû rappeler des steak hachés contaminés par la bactérie E-Coli (Imgae d'illustration). (MAXPPP)

Les peurs alimentaires, c’est une histoire ancienne. Les hommes ont toujours eu peur de mourir empoisonnés. Lorsqu'on analyse les peurs alimentaires dans l’histoire, comme l’a fait l’historienne Madeleine Ferrieres dans un très beau livre intitulé Histoire des peurs alimentaires et publié aux éditions Seuil en 2002on remarque que jusqu’à une époque récente, disons au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la principale peur alimentaire qui traverse la France c’est celle du manque. Cette peur est donc d’abord quantitative avant d’être qualitative, même si, dans son livre, Madeleine Ferrières rappelle l’interdiction du pain à la levure de bière en 1668, considéré comme dangereux pour la santé, avant finalement d’être autorisé, ou encore au XIXe siècle l’angoisse liée à la vente de lait de vaches atteintes de la tuberculose au moment où Pasteur découvre la transmission possible de la tuberculose de la vache à l'homme.

Après les années 1950, on accorde une grande confiance à l’industrie agro-alimentaire. C’est l’entrée dans une période où l’on considère que les risques alimentaires, aussi bien quantitatifs que qualitatifs, s’éloignent à mesure que l’alimentation s’industrialise avec son cortège de normes strictes qui nous protègent.

Industrie agroalimentaire : la confiance perdue

Voici par exemple cette archive de 1980, bien dans l’esprit du temps. Un journaliste : "Des petites bêtes au fond des bocaux. Avec la mode des conserves familiales, on constate un accroissement des intoxications alimentaires, c'est ce que l'on appelle le botulisme. Très souvent, les conserves artisanales sont réalisées dans des conditions de sécurité peu satisfaisantes. Attention donc aux bocaux mal fermés ou aux jambons mal salés." A l'époque, le principal risque d’intoxication alimentaire provient d’un contournement de l’industrie agro-alimentaire qui, elle, est alors considérée comme un gage de sécuritaire alimentaire. Mais depuis cette période, de la crise de la vache folle au scandale des lasagnes en passant par la bactérie E. coli ou bien sûr celui qui touche aujourd’hui Lactalis, la peur s’est fixée sur l’industrie agro-alimentaire. Et par un étonnant retournement, la confiance est désormais et à nouveau accordée aux circuits les plus courts.

La réduction de la distance entre le producteur et le consommateur est un réducteur de peur alimentaire. D’une certaine manière, après quelques décennies industrialistes, on retrouve une vieille règle qui veut que plus le consommateur est prêt de ce qu'il mange, plus il est rassuré. Au Moyen Age, on avait une confiance totale pour la viande consommée parce qu’on la choisissait sur pied, de belle apparence. Pas sûr toutefois qu’on soit prêt aujourd’hui à choisir les animaux vivants, mais l’idée est là.

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