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Ils défient Sarkozy, épisode 1 : Bruno Le Maire, le quadra ambitieux

L'ancien ministre de l'Agriculture est candidat à la présidence de l'UMP contre l'ancien président, et il croit en ses chances.

Article rédigé par Clément Parrot
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Bruno Le Maire, le 23 juin 2011.  (FRED DUFOUR/AFP)

Bruno Le Maire affiche ses ambitions. Candidat à la présidence de l'UMPl'ancien ministre de l'Agriculture de Nicolas Sarkozy se prépare à cette échéance depuis bientôt deux ans. L'énarque de 45 ans axe sa campagne sur la rénovation de son parti, affaibli depuis la guerre Copé-Fillon et l'affaire Bygmalion. Le premier tour de l'élection pour la présidence du parti doit se dérouler le 29 novembre, mais avant de récupérer l'ancien fauteuil de Jean-François Copé, le député de l'Eure va devoir franchir l'obstacle Nicolas Sarkozy.

"On ne peut pas être candidat par devoir"

Sauf à prendre le risque de l'énerver, il ne faut pas demander au quadra s'il compte aller jusqu'au bout de la bataille pour l'UMP contre Nicolas Sarkozy. "Vous plaisantez ?", répond-il sur RTL, avec une pointe d'indignation rappelant étrangement Jacques Chirac. Déterminé, Bruno Le Maire. "Je suis candidat par envie, pas par devoir, répète-t-il à francetv info pour prendre le contre-pied de la formule attribuée à l'ancien présidentOn ne peut pas être candidat par devoir." Pour son directeur de campagne, Jérôme Grand d'Esnon, "l'affrontement avec Sarkozy, ça le motive. Il le vit comme un challenge, il n'a rien à perdre".

Du côté de l'ancien président, on commence à sortir l'artillerie : "[Bruno Le Maire] écrit des livres en allemand que personne ne comprend", "quand il apparaît à la télé, les Français changent de chaîne". L'angle d'attaque du clan Sarkozy est choisi : appuyer sur l'image du technocrate froid et distant, dont Bruno Le Maire tente justement de se débarrasser depuis le début de sa campagne. Ces petites piques distillées par l'ancien président dans la presse amusent l'ancien ministre : "Ça me fait plutôt rire, ça me préoccuperait si c’était la vérité." Pour la députée UMP Laure de La Raudière, Nicolas Sarkozy lui rend presque service : "Cela crédibilise sa candidature."

"Je n'ai pas attendu Sarkozy pour faire campagne"

Alors que, pour beaucoup, l'entrée de l'ancien chef de l'Etat dans la course tue tout suspense, les proches de Bruno Le Maire répondent qu'aucune élection n'est jouée d'avance. "Il est tout à fait capable de créer la surprise et de battre Sarkozy", estime son ami Edouard Philippe"Il n’y aura pas de défaite, je ne peux pas l’envisager", affirme même Bruno Le Maire dans un sourire, conscient de sa réponse un peu convenue. 

Aucun sondage ne permet d'établir la cote de popularité de Nicolas Sarkozy auprès des militants, puisque les enquêtes se limitent aux sympathisants. Mais de l'avis de plusieurs responsables UMP, elle aurait tendance à s'effriter. Bruno Le Maire a profité de l'absence, dans la campagne, de l'ancien président pour gagner un peu de terrain : "Il y a du monde dans mes meetings, je crois que les militants sont reconnaissants car je n'ai pas attendu Nicolas Sarkozy pour faire campagne." Certains de ses partisans, comme Damien Abad, reconnaissent que le combat sera ardu, car les militants, les seuls invités à se prononcer, restent attachés au concept de l'homme providentiel. 

Les sondages auprès des sympathisants UMP ne sont pas très encourageants. Selon un sondage Harris Interactive pour LCP du 11 septembre, ils sont 56% à souhaiter voir Nicolas Sarkozy prendre la tête de l'UMP, contre 19% pour Bruno Le Maire et 2% pour Hervé Mariton"Les sondages, je m’en fous éperdument, et je pense qu'ils surévaluent Sarkozy en raison de la prime au connu", tente de se rassurer Jérôme Grand d'Esnon, qui préfère prendre exemple sur le scrutin interne de 2012, où Fillon caracolait en tête dans les sondages auprès des sympathisants, avant d'être battu par Copé chez les militants. 

"Le choix entre un ancien président et un homme nouveau"

Bruno Le Maire possède un avantage de poids. Il peut fédérer sur son nom les opposants à Nicolas Sarkozy. Entouré d'une vingtaine de parlementaires, il cherche maintenant à élargir son camp. "Il est compatible avec tout le monde et la politique, c’est comme un puzzle, il faut trouver la dernière pièce qui fait tenir le tout", illustre Damien Abad. "Le Maire peut mettre tout le monde autour de la table, Sarkozy aura beaucoup plus de mal", enfonce Jérôme Grand d'Esnon, qui ajoute que l'ancien président "n'est plus le patron naturel de la droite"

Pour convaincre, le député de l'Eure n'hésite pas à faire peur aux futurs concurrents de Sarkozy. "Il ne faut pas se tromper, si Sarkozy fait 85% des voix, c'est fini pour tout le monde, il n'y aura pas de primaire et il sera le candidat naturel en 2017", prévient-il dans Le Nouvel Observateur. Il explique à francetv info cette stratégie assumée, destinée à recueillir de nouveaux soutiens : "Je veux que chacun prenne conscience de l’importance de l’enjeu : on a le choix entre un ancien président de la République et un homme nouveau."

Cette stratégie a permis à Bruno Le Maire d'obtenir le soutien de quelques députés fillonistes comme Jean LeonettiMais la partie n'est pas encore gagnée. François Fillon comme Alain Juppé ne voient pas d'un bon œil ses ambitions présidentielles. "Bruno Le Maire vise les primaires, ce n'est un secret pour personne, et il nous faut un type qui gère le parti sans penser à la présidentielle matin, midi et soir", prévient le député Benoist Apparu, proche d'Alain Juppé. Les ténors pourraient donc décider de rester neutres dans cette bataille pour l'UMP tout en laissant certains de leurs soutiens donner un coup de main à Bruno Le Maire pour contrer Nicolas Sarkozy.

Les primaires en ligne de mire

Si les proches de Bruno Le Maire martèlent que la présidence de l'UMP et les primaires sont deux élections bien distinctes, ils ne ferment pas la porte aux ambitions de leur champion en cas de victoire en novembre. "Personne n'est naïf. Bien sûr qu’il regardera les sondages et son positionnement sur la ligne de départ en 2016", concède le député des Hauts-de-Seine Thierry Solère, un de ses fidèles. "On ne nie pas que les primaires sont dans un coin de sa tête, c'est pour cela qu'on ne tape pas trop sur les autres candidats, pour être en mesure de rassembler le moment venu", avoue un proche.

Et si Bruno Le Maire venait à échouer dans sa conquête de l'UMP ? "Dans ce cas, je pense qu’il fera quand même un bon score", estime Damien Abad. Un bon résultat lui donnerait du poids au sein du parti, et pour préparer la primaire de 2016. Contrairement à l'idée véhiculée par les sarkozystes, selon ses proches, il ne cherche pas à négocier un poste de second au sein de l'UMP"S’il ne gagne pas, il continuera à bosser afin d'élaborer un projet pour 2017", estime Laure de La Raudière. Avec, sans doute, Nicolas Sarkozy une nouvelle fois en travers de sa route. 

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