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Remaniement : pourquoi la majorité présidentielle à l'Assemblée nationale sort fragilisée après l'annonce du nouveau gouvernement

Quelque 21 députés de la majorité présidentielle ont été nommés ministres. Conséquence : leurs sièges ne seront pas occupés pendant plusieurs semaines à l'Assemblée nationale.

Article rédigé par Margaux Duguet, Antoine Comte
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le président de la République Emmanuel Macron et la Première ministre Elisabeth Borne, le 4 juillet 2022, à l'Elysée. (CHRISTOPHE PETIT TESSON / AFP)

L'été risque d'être agité pour l'exécutif. Après avoir perdu la majorité absolue lors des élections législatives, Emmanuel Macron va désormais devoir se passer de 21 précieux sièges à l'Assemblée nationale. Avec le remaniement annoncé lundi 4 juillet, ce sont en effet 11 députés qui ont fait leur entrée dans le nouveau gouvernement en plus des 10 députés-ministres déjà en fonction dans le premier gouvernement d'Elisabeth Borne.

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Selon le Code électoral et plus précisément l'article LO 176"les députés qui acceptent des fonctions gouvernementales sont remplacés, jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la cessation de ces fonctions, par les personnes élues en même temps qu'eux à cet effet". Autrement dit : l'ensemble des députés élus ou réélus aux dernières élections législatives et actuellement membres du gouvernement ne peuvent pas passer la main à leurs suppléants dans un délai de 30 jours.

Une majorité réduite jusqu'au 4 août

Il existe en fait deux cas de figure. Pour les 10 députés nommés ministres dès le 21 mai, le délai commence le 22 juin, au premier jour de l'ouverture de la nouvelle législature. Olivier Véran, Gérald Darmanin, Gabriel Attal, Stanislas Guérini ou encore Elisabeth Borne pourront donc être remplacés par leurs suppléants, à partir du 22 juillet prochain. En revanche, pour les 11 parlementaires qui sont devenus ministres ou secrétaires d'Etat lundi 4 juillet, comme Agnès Firmin-Le Bodo, Hervé Berville ou encore Patricia Mirallès, le délai de 30 jours débute à la date de leur nomination et se verront supplés dans un mois, à partir du 4 août.

"Ce remaniement est délicat pour Emmanuel Macron car il fait tomber la majorité à 229 députés et le risque de voir les prochains projets de lois bloqués est important", analyse le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier.

"Si l'ensemble des députés du RN et des quatre groupes politiques de la Nupes décident de voter contre les premiers textes du gouvernement, ils seront en position de force car plus nombreux que ceux de la majorité présidentielle, à 11 voix près"

Jean-Philippe Derosier, constitutionnaliste

à franceinfo

Les prochains projets de lois présentés par le gouvernement comme le texte sur "les mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat" sera par exemple examiné dans l'Hémicycle à partir du 18 juillet, soit quelques jours avant que ne siègent officiellement les 21 suppléants des députés nommés ministres. C'est le cas aussi du projet de loi sur le Covid-19 prévu à l'agenda le 11 juillet.

Pas de vote de confiance pour Borne

Ce risque de blocage divise les parlementaires de la majorité. "Il est vrai que cela peut poser problème si les votes sont serrés", reconnaît Laurent Marcangeli, le président du groupe Horizons à l'Assemblée nationale. Denis Masséglia, député LREM du Maine-et-Loire, ne cache pas non plus son inquiétude. "L'absence de 21 députés peut rendre certains votes plus compliqués dans les prochaines semaines. Ce sont également des députés expérimentés qui ne seront pas présents dans la majorité dans un moment extrêmement politique."

En revanche, plusieurs députés de la majorité veulent relativiser les conséquences d'un tel remaniement pour l'exécutif. "Je ne pense pas que ça pose une difficulté particulière. Certes, nous sommes une majorité relative mais nous avons de la marge par rapport aux autres groupes pour qu'ils atteignent la majorité devant nous", se projette Damien Adam, député macroniste de Seine-Maritime.

"On serait à 291 députés pour la majorité présidentielle et on en perdrait 15, là cela voudrait dire qu'on se fragiliserait car on passerait de la majorité absolue à la majorité relative. Mais comme nous sommes déjà à la majorité relative, l'exercice reste le même."

Aurore Bergé, présidente du groupe LREM à l'Assemblée nationale

à franceinfo

Parmi les conséquences quasi-immédiates de ces 21 sièges manquants pour la majorité : la décision de la Première ministre Elisabeth Borne de ne pas solliciter le traditionnel vote de confiance des députés lors de son discours de politique générale prévu mercredi. "On se questionnait il y a encore quelques jours pour savoir si Elisabeth Borne comptait demander la confiance de l'Assemblée comme le veut la tradition. Avec ces 21 voix en moins, il semble désormais très peu probable qu'elle prenne ce risque-là", analysait avant cette annonce le politologue Bruno Cautrès.

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