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Alexandre Benalla, un "amateur" au service de la protection d'Emmanuel Macron

L'ancien "M. Sécurité" du chef de l'Etat fait aujourd'hui l'objet d'une procédure de licenciement après avoir été filmé en train de frapper des manifestants lors des manifestations du 1er-Mai. Il côtoyait les équipes chargées de la protection du président sans pourtant être policier.

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Emmanuel Macron, encadré par Alexandre Benalla (à gauche) et par un membre du GSPR, le 17 juin 2017 au Touquet (Pas-de-Calais). (CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP)

L'ancien "M. Sécurité" d'Emmanuel Macron est dans la tourmente. Alexandre Benalla a été placé en garde à vue, vendredi 20 juillet, pour "violences en réunion par personne chargée d'une mission de service public", "usurpation de fonctions", "port illégal d'insignes réservés à l'autorité publique" et "complicité de détournement d'images issues d'un système de vidéoprotection".

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Auparavant chargé de mission auprès du chef de cabinet de la présidence, l'homme – qui accompagnait le chef de l'Etat dans tous ses déplacements jusqu'au printemps – fait aujourd'hui l'objet d'une procédure de licenciement après avoir été filmé en train de frapper des manifestants lors des manifestations du 1er-Mai. Ce jeune homme de 26 ans était-il habilité à assurer la protection du président ? Éléments de réponse.

Un ancien "gros bras" de la campagne d'Emmanuel Macron

Alexandre Benalla a rejoint la campagne d'Emmanuel Macron pour gérer la sécurité du candidat le 5 décembre 2016, après avoir fait ses armes au sein du service d'ordre du Parti socialiste durant les primaires de 2012. Lors du quinquennat Hollande, il a également intégré le SPHP [le service de protection des hautes personnalités] d'Arnaud Montebourg en tant que chauffeur.

Lors de la dernière campagne présidentielle, il est presque impossible de s'approcher du candidat d'En marche ! sans l'apercevoir. Meetings, déplacements... Alexandre Benalla est partout et n'hésite pas à employer la force pour faire le ménage autour du postulant à l'Élysée. Lors d'une réunion publique organisée à Caen en mars 2017, un journaliste de la chaîne Public Sénat se fait ainsi empoigner et arracher son accréditation presse après avoir voulu s'approcher du candidat Macron pour faire quelques photos.

Éric Feferberg, photographe de l'AFP, rapporte également au Parisien avoir été menacé par Alexandre Benalla après avoir voulu prendre des photos d'Emmanuel Macron sous un autre angle que celui prévu par les équipes de sécurité du candidat. 

[Il] ne se présentait pas, il jouait les gros bras. Il ne fallait pas bouger.

Éric Feferberg, photographe de l'AFP

au "Parisien"

Ce type de comportements sanguins n'effraie visiblement pas Emmanuel Macron. Alexandre Benalla est en effet nommé chargé de mission auprès du chef de cabinet de la présidence à la suite de l'arrivée à l'Elysée de l'ancien ministre de l'Economie.

"Depuis quand met-on des amateurs pour s'occuper de la protection du président ?"

Alexandre Benalla se retrouve alors en charge de la protection du président de la République. On peut l'apercevoir dans le sillage d'Emmanuel Macron lors de déplacements officiels, comme lors de ses escapades privées. Il était ainsi présent pendant une balade à vélo lors d'un week-end au Touquet (Pas-de-Calais) ou juste après Noël pour des vacances au ski à La Mongie (Hautes-Pyrénées), rapporte L'Express.

Une curiosité puisque le jeune homme est loin d'avoir le profil d'un membre du groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR), déjà chargé de la protection du chef de l'Etat. Cette unité d'élite est composée à parité de policiers issus du service de la protection (SDLP) et de gendarmes de la force sécurité-protection du GIGN, spécialement entraînés pour pouvoir faire preuve d'une vigilance, d'une discrétion et d'une réactivité sans faille.

Alexandre Benalla, lui, est simple gendarme de réserve. Selon les informations de France 2, il n'a d'ailleurs plus été convoqué par la gendarmerie comme réserviste depuis 2015, année durant laquelle il a suivi une formation de cinq jours à l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) afin d'être sensibilisé "aux problématiques de sécurité et de justice". Malgré ce parcours inhabituel, il a pu bénéficier d'une autorisation de port d'arme accordée par la préfecture de police dans le cadre de ses fonctions à l'Elysée, rapporte Le Parisien.

Le contraste entre son parcours et celui du personnel d'élite du GSPR interpelle les spécialistes de la protection des personnalités importantes. Interrogé par franceinfo, Alain Le Caro, fondateur du GSPR, s'interroge sur le rôle d'Alexandre Benalla dans le dispositif qui entoure le chef de l'Etat.

En cas d'intervention, vous avez déjà le GIGN et la police. Si, en plus, quelqu'un qui ne fait pas partie du sérail s'en occupe... Même si je ne sais pas comment tout cela était organisé, cela me semble aberrant vu de l'extérieur.

Alain Le Caro, fondateur du GSPR

à franceinfo

"Depuis quand met-on des amateurs pour s'occuper de la protection du président alors qu'on a des policiers et des gendarmes qui sont des professionnels ? Résultat, on se retrouve avec des gens qui n'ont aucun sang-froid", renchérit Jean-Paul Mégret, du Syndicat indépendant des commissaires de police, cité par Le Monde.

Selon le quotidien du soir, Alexandre Benalla – malgré son manque d'expérience – et les hommes du GSPR traitaient "d'égal à égal" lorsque le premier était encore en poste. Le Monde cite également un "connaisseur de la question" : "C'est la première fois depuis le général de Gaulle qu'on contourne les services officiels." Entendu par les policiers, Alexandre Benalla devra sans doute également s'expliquer sur cette question.

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