L'élection de Joe Biden sera "un tournant" pour la lutte contre le réchauffement climatique, estime Pascal Canfin
Pascal Canfin, député européen LREM et président de la commission environnement, santé publique et sécurité alimentaire du Parlement européen souligne dimanche le projet ambitieux de Joe Biden, qui compte notamment revenir dans l'accord de Paris.
L'élection de Joe Biden sera "un tournant" pour la lutte contre le réchauffement climatique, a déclaré dimanche 8 novembre sur franceinfo Pascal Canfin, député européen LREM et président de la commission environnement, santé publique et sécurité alimentaire du Parlement européen.
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Il souligne le projet ambitieux du candidat démocrate qui compte notamment revenir dans l'accord de Paris. "Le vrai test politique, ce sera sa capacité à plafonner, puis à réduire la production de gaz naturel, de gaz de schiste américain qui a explosé depuis 20 ans", souligne Pascal Canfin.
franceinfo : Pensez-vous que l'arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche sera un tournant dans la lutte contre le réchauffement climatique ?
Pascal Canfin : Oui, ce sera un tournant à double titre. D'abord sur le plan international, puisque les Etats-Unis vont revenir dans l'accord de Paris dès le premier jour où Joe Biden pourra prendre le décret présidentiel qui le permettra, c'est à dire en janvier prochain. Cela va évidemment entraîner une nouvelle dynamique avec l'Union européenne, mais aussi avec la Chine. Or, on sait que si les trois plus gros émetteurs au monde, la Chine, les Etats-Unis et les Européens, s'associent vraiment pour lutter contre le dérèglement climatique, ça change la donne. Et le deuxième élément, c'est sur le plan domestique américain, il y a eu plusieurs engagements dans la campagne. Si on en croit ses intentions de campagne, ça va beaucoup plus loin que ce que Barack Obama et Hillary Clinton avaient prévu de faire. C'est très, très proche du "green deal" européen que nous sommes en train de mettre en œuvre
Biden prévoit la neutralité carbone avant 2050 mais aussi un investissement dans les énergies vertes de 2 000 milliards sur quatre ans. Ce programme ambitieux ne risque-t-il pas de se heurter à une opposition au Sénat ?
Le fait de revenir dans l'accord de Paris n'implique pas d'avoir la majorité au Sénat parce que l'accord de Paris a été conçu sur le plan juridique pour que le président des Etats-Unis puisse le signer avec un décret présidentiel, c'est d'ailleurs ce qui a permis aussi à Donald Trump de sortir les Etats-Unis juste en signant un décret présidentiel. Donc, il n'y a pas besoin de la majorité au Sénat pour faire revenir les Etats-Unis dans l'accord de Paris. Ensuite, pour mener à bien un certain nombre de politiques publiques, il peut aussi surmonter une éventuelle minorité au Sénat. Il peut s'appuyer sur les Etats fédérés, par exemple sur la Californie qui a déjà des objectifs bien plus ambitieux que ce que nous nous sommes en train de nous fixer en Europe. Il peut aussi s'appuyer sur certaines grandes entreprises américaines et contourner l'éventuel obstacle d'un Sénat contrôlé par les Républicains.
Le futur président a l'ambition de montrer que la transition écologique qui est le principal levier de l'innovation pour l'économie américaine, contrairement à Trump qui misait sur la suprématie des énergies fossiles. Est-ce que l'Amérique est prête à entendre ce discours ?
Bonne question. Il faut toujours se rappeler que la très grande différence entre les Etats-Unis et l'Europe, c'est que les Etats-Unis sont aujourd'hui le premier producteur au monde de pétrole et de gaz. Pour eux, sur le plan énergétique, la transition vers la neutralité carbone dans 30 ans, c'est une révolution encore plus importante que pour nous. Pour le reste, on est très proche : pour l'isolation des bâtiments et pour les voitures électriques, on a les mêmes enjeux. La grande différence c'est que plus de 50 % de l'électricité américaine est faite de gaz et de charbon. Donc, on voit bien que il va y avoir un défi plus important pour Biden que pour nous. Est ce qu'il est capable de l'engager ? Sur le charbon, c'est certain. Le déclin du charbon est engagé aux Etats-Unis, c'est quasiment certain que Biden va l'accélérer. Le vrai test politique, ce sera sa capacité à plafonner, puis ensuite à réduire la production de gaz naturel, de gaz de schiste américain qui a explosé depuis 20 ans.
Vous parlez de l'ambition de Joe Biden, peut-il tirer l'Europe vers le haut ?
On est en train, avec le green deal Européen, de mettre en place le plus grand plan de transition écologique à l'échelle continentale jamais réalisé, le plus grand choc d'investissement vert jamais réalisé. Je me félicite que nous convergions sur les objectifs. Nous avons, nous Européens, l'objectif de neutralité carbone, c'est aussi l'objectif américain. Et c'est aussi l'objectif chinois avec dix ans d'écart, mais c'est normal au regard de l'histoire du développement de la Chine. Donc on a l'Europe, les Etats-Unis et la Chine, qui sont en train de converger vers exactement les mêmes objectifs avec finalement le même plan d'investissements associé. C'est la seule façon d'espérer pouvoir cette bataille de la lutte contre le dérèglement climatique. Ce qui va probablement se passer, c'est que Biden va faire rentrer dans le droit américain les éléments de l'accord de Paris pour les rendre juridiquement contraignants, non pas comme accord international, mais au regard du droit américain. Cela permettra de stabiliser la lutte contre le dérèglement climatique.
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